De l’espoir, mais beaucoup reste à faire…

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Ce versant de la commune de Draâ El Mizan est particulier. En plus de tous les autres problèmes dont souffrent les populations rurales, la zone 3 vit le sempiternel problème de l’alimentation en eau potable depuis des années, en raison de plusieurs facteurs, notamment celui de la sécurité. Durant toutes nos investigations, nous avons eu droit à de nombreuses contradictions à ce sujet. Convaincus que seule une sortie sur ce versant peut éclairer nos lecteurs, nous avons opté pour une virée sur les lieux. Pour se rendre sur cette zone qualifiée de dangereuse, vu qu’elle est infestée de groupes armés, il y a deux routes. Au début, nous craignons d’être surpris par leurs mauvais état. Notre accompagnateur nous a rassurés en nous annonçant que les deux axes routiers sont entièrement bitumés, si bien que nous avons choisi d’emprunter celle traversant le village de Tala Mokrane à proximité de l’hôtel Tala où l’activité est des plus normales, notamment durant cette saison estivale. Nous avons préféré commencer ce périple par le village de Bezazoua. En effet, notre guide nous a informé à l’avance sur les dangers que nous encourons en prenant le chemin qui mène de Tizi Ghennif vers ces collines d’une certaine altitude. Dès notre départ de la ville, notre accompagnateur nous interrompit pour nous montrer les lieux réputés être les points de passage des groupes armés. Avant d’arriver à Bezazoua, il nous fait le récit d’un certain jour de Ramadhan où un militaire, un douanier, un officier de police et un citoyen avaient été froidement assassinés dans deux faux barrages différents. A quelques encablures des villages concernés par ce manque d’eau, on peut tout de même admirer les figueraies qui constituent la richesse de la région. On parle beaucoup de la figue de Nézlioua, parce qu’elle est succulente et mielleuse. Connaissant bien la situation, notre guide nous conte toute la genèse du projet, qui dira-t-il, a englouti des milliards de centimes pour ne servir à rien.

Un projet obsolètePour ceux qui ne connaissent pas la région, cette zone allant de Bezazoua jusqu’à Hennia en passant par Tazrout Aouaoudha et d’autres hameaux est la plus peuplée de la commune de Draâ El Mizan. Durant, les premières années de terrorisme, Tazrout Sidi Aïssa et d’autres villages ont été abandonnés par leurs occupants. Les populations de cette localité ont véritablement souffert, car les groupes armés ont occupés ce massif en raison surtout de sa situation frontalière avec Bouira du côté d’Aomar et de Kadiria. A la fin des années 90, ce versant a bénéficié d’un projet d’AEP à partir de la chaîne de Sidi Ali Bounab. Sachant que la situation avait atteint un seuil de terreur non négligeable, même les essais et les autres travaux ont été laissés à l’abandon. Le mouvement associatif tira alors la sonnette d’alarme sur un gaspillage qui ne dit pas son nom. “M. le wali, nous avons soif. Pourtant, des conduites sont enfouies depuis des années”, tel a été l’appel lancé par le représentant de la société civile en direction du premier magistrat de la wilaya en visite à Draâ El Mizan. Près de sept ans durant, ce problème a focalisé l’attention de la population. N’ayant aucune écoute, les citoyens s’étaient mobilisés derrière leurs représentants en occupant à deux reprises le siège de l’APC en septembre 2003 et 2004. Quelques solutions furent préconisées, telle la réalisation de forages à El Mers. D’ailleurs, la population se demande pourquoi tant d’argent a été gaspillé pour rien. On ne peut pas dire que les autorités locales n’ont rien fait, mais on peut dire aussi que l’eau ne coule pas.

Les sources à la rescousse des citoyensIl était peut-être onze heures quand notre accompagnateur nous demande de nous arrêter pour discuter avec quelques petits bambins revenant de la source dite Aouaoudha. Ces trois potaches n’ont que douze ou treize ans. Au moment où des enfants de leur âge se dorent sur le sable fin des belles plages d’Algérie, Houssam, Ali et Nabil, dont les corps sont tout bronzés, ont déjà passé une bonne partie de leur journée à la fontaine du village. Nous les avons interpellés, ils s’arrêtent net. Au début, ils ont refusé de nous répondre. Mis en confiance, ils nous diront : “Chaque jour, c’est comme ça. On se lève à quatre heures du matin pour aller puiser cette eau à la fontaine”, dit l’un d’eux. Quant au deuxième, il ajoutera : “Dernièrement, nous avons vu des personnes regarder ces conduites. On nous a dit que nous aurons de l’eau, mais rien encore”.La réponse de ce gamin suppose que des essais auraient été faits, mais l’eau ne coule toujours pas. Un citoyen s’intéresse à notre discussion et prend la parole : “Ici, mes enfants, c’est l’enfer. Il n’y a rien, ni travail, ni eau, ni pain, c’est la misère. Les services de l’hydraulique sont passés la dernière fois, mais on ne sait jamais quand on aura cette eau. La citerne coûte jusqu’à mille deux cents dinars”. Effectivement, beaucoup de citoyens de cette région nous ont fait la même réponse. Si ces enfants ont puisé ce liquide, ô combien précieux de cette source, cela ne veut pas dire que leurs camarades de Raouchda et de Ouled Kouhail ne font pas cette corvée quotidienne. En quittant ces potaches, nous continuons notre route vers d’autres villages.

Des essais, mais toujours pas d’eauDans toutes nos discussions avec les personnes rencontrées, il nous a été donné d’apprendre que les élus locaux ainsi que le directeur de l’hydraulique de Tizi Ouzou ont multiplié leurs sorties sur le terrain. “L’eau est enfin arrivée dans les conduites principales”, a répondu l’une d’elles. A une autre d’expliquer : “Les essais sont en cours, il y a beaucoup de fuites. Certaines ont été réparées. mais une chose est sûre, nous avons toujours soif”. De leur côté, les élus promettent de régler cette situation. “Actuellement, nous faisons des essais. Une fois que ces derniers seront terminés, nous installerons les fontaines publiques avant la réalisation des bretelles manquantes”, nous a déclaré un élu. Du côté du mouvement associatif, les propos sont les mêmes : “de l’eau, et ça suffit”. Avant de revenir à Draâ El Mizan, d’autres citoyens ont tenu à nous signaler qu’en dépit de l’insécurité qui règne dans de nombreux hameaux, le réseau de l’éclairage public est inexistant et dans les lieux où quelques lampadaires existent ces derniers n’éclairent pas suffisamment, si bien que les incursions nocturnes sont fréquentes. Cette sortie avec un compagnon qui a requis l’anonymat nous a permis de traverser cette zone, qui il y a quelques années était classée “zone rouge”. Nous promettons à nos lecteurs d’autres petits reportages dans les villages les plus reculés de la région.

H. N.

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