Rôle de l’enseignant dévoyé, spécificité de l’école altérée

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Souvent mal formé, de tout temps sous-payé (en dépit des dernières augmentations salariales sommes toutes insignifiantes), il assiste impuissant, à l’évaporation de son prestige d’antan et à la dévalorisation inquiétante de sa fonction ! Ce ne seront certainement par les réformettes appliquées ces dernières années qui le réconforteront !

L’école, qui constituait pourtant, au lendemain de l’indépendance, une véritable alternative, est complètement dévoyée aujourd’hui, et le praticien, acculé de toutes parts, est assimilé à un simple fonctionnaire stérile et bureaucratique. Système oblige ! Pris ainsi dans les serres du fonctionnariat, il n’arrive toujours pas à sortir des ornières et concilie très mal son activité pédagogique et sa vie privée, faite de morosité, de déceptions continues et de l’indifférence officielle. Il n’arrive pas à joindre les deux bouts. Certains enseignants, poussés par les impératifs familiaux et la difficile conjoncture socioéconomique actuelle, sont contraints d’exercer une activité parallèle : commerce, élevage, transport public, maçonnerie… Ce qui porte un coup fatal à leur crédibilité malheureusement !

Emporté ainsi dans les tourbillons des mutations sociale, politique et économique, sans cesse renouvelées, l’enseignant semble perdre ses repères et son statut sa fragilise davantage ! Les plus tenaces font œuvre de résistance et se contentent de faire ce qu’ils peuvent dans l’indifférence totale. Les autres tiennent difficilement l’équilibre sur un terrain miné ! Le reste, faute d’une meilleure adaptation à un monde en pleine mutation, brandissent désespérément, les archaïsmes moyenâgeux et prennent en otage l’école avec la bénédiction plus que douteuse de quelques “décideurs” plus préoccupés à gérer leurs carrières qu’à améliorer le sort de l’école.

Les récentes réformes du système éducatif demeurent insuffisantes en dépit de la bonne volonté affichée en haut lieu et en l’absence d’une formation solide et adaptée à la nouvelle donne pédagogique. Le passage de l’optique de l’enseignement, donc de la transmission unilatérale des savoirs, souvent figés ou morts, à l’optique de l’enseignement/apprentissage, donc installation de compétences d’ordre non seulement linguistique mais également social et culturel, n’est pas évident pour tous les enseignants et les encadreurs ! Le problème est aggravé par l’encadrement administratif complètement stérile et archaïque ! La gestion bureaucratique, unilatérale et jacobine prime sur la gestion pédagogique, et ce à tous les niveaux ! L’ensemble du personnel administratif a lui aussi besoin d’une formation adéquate et d’une gestion plus ouverte, plus moderne et moins contraignante qu’elle l’est aujourd’hui. Un constat amer évident pour tout le monde mais personne n’agit pour changer cette fatalité ! Améliorer le système éducatif et le rendre plus performant, exige la collaboration et le concours de tous les partenaires de l’action éducative et ne saurait être du ressort de l’enseignant seul. Cette lacune est malheureusement exploitée abusivement par un certain courant idéologique qui veut former non pas des citoyens, comme l’indiquent clairement les instructions officielles, mais des croyants, de préférence dociles. L’école fait ainsi les frais des compromissions assassines et s’enfonce inexorablement dans les abîmes de l’intolérance et du fanatisme religieux digne du Moyen Age ! Les premières conséquences dramatiques nous les subissons et plusieurs générations en sont déjà touchées de plein fouet, traumatisées à vie. Le pire est à venir sans un sursaut salutaire des forces vives de la nation qui doivent prendre conscience de la gravité de la situation. Le gouvernement a cédé sous la pression de ces forces obscurantistes et a daigné satisfaire plusieurs de leurs revendications, entre autres l’introduction de l’éducation islamique dans les épreuves du baccalauréat ! Il fallait voir le zèle affiché par certains enseignants de cette matière et les abus qu’ils commettent à l’encontre des enfants innocents notamment les filles pour les pousser à arborer la tenue dite islamique ! Cela se fait en toute impunité et au nez et à la barbe touffue ou complices ! Dés lors il n’est pas étonnant de voir, dans certains établissements scolaires, toutes élèves voilées ! Que peut faire alors un simple enseignant consciencieux dans cet échiquier complexe si ce n’est de se résigner ? Certes, l’école à elle seule ne peut panser toutes les plaies béantes de la société, encore moins masquer tous les errements d’un système voué aux gémonies, mais elle joue quand même un rôle déterminant ! Pourvu qu’il y’ait une véritable volonté politique à même de juguler certains phénomènes étranges et fortement préjudiciables non seulement à l’école mais par ricochet à toute la société dont les effets pervers se font déjà sentir… Ainsi, la bouche semble bouclée et le processus de déstabilisation se met irrémédiablement en place pour dévoyer le rôle de l’enseignant et altérer la spécificité de l’école. Il convient donc d’œuvrer à les libérer afin de sauver les meubles ou ce qui en reste.

B. Hakim

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