Les sources d’El Manfouka et d’El Moumadha

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Leurs eaux sorties des entrailles de la terre sur le flanc de la montagne d’Achtoug juste en dessous d’une grotte féérique d’une légende très répandue dans la région : des explorateurs français ont laissé présager, partant du bruissement d’eau qu’on entend dans les profondeurs de cette grotte qui s’apparente à un ruisseau qui coule, qu’un jour, celui-ci remonterait à la surface et inonderait tout le flanc situé en contrebas de la montagne jusqu’à l’oued Soummam.Bien qu’elles soient millénaires et prenant racine de la nappe phréatique du Sud algérien (Bousaâda) comme l’a laissé entendre un ingénieur en hydraulique ayant étudié la carte de la région, les premiers habitants qui les ont mises en valeur furent les Byzantins qui ont installé leur forteresse sur un petit plateau (Ighoudhan) bordé par une rivière où convergent les eaux des deux sources. Les autochtones de l’époque les utilisaient pour l’irrigation des cultures, la fabrication des outils dans l’artisanat et l’alimentation des bêtes et des humains. Les Arabes en firent de même après avoir chassé les Byzantins et ayant subi une destruction de cette forteresse, on ne sait si par l’avènement d’une guerre, des forces de la nature ou par l’effet du temps (l’usure). La population abandonnant le lieu s’est amplifiée en s’éparpillant et en créant quatre villages de renaissance (Seddouk Ouadda, Ighil n’Djiber, Tibouamouchine et Seddouk Ouffela).Cheikh Belhaddad, en arrivant sur les lieux a découvert leurs vertus, notamment leurs débits constants durant les quatre saisons et ne s’était pas fait attendre pour élire domicile et fonder une zaouia. Les colons français de même, bien qu’installés sur le vaste plateau de Tizi et Djamaâ, Seddouk centre actuel, à une dizaine de kilomètres ont vite repéré leurs eaux potables qu’ils ont captées et amenées jusqu’en ville où ils ont construit des fontaines publiques. Le surplus a été laissé pour les habitants des villages Seddouk Ouffela, et Seddouk Ouadda, qui les utilisaient dans le temps pour le fonctionnement des moulins à grains installés le long de la rivière d’Imane et pour l’irrigation des cultures. A cette époque, Seddouk est réputé pour la production de la citrouille. “Awi thakhsaith ar Seddouk”, disait une légende pas assez lointaine.A l’indépendance, le modernisme a pénétré les villages et les citoyens s’imprégnant de la vie citadine ont abandonné les fontaines publiques pour les branchements d’eau courante dans les foyers. L’augmentation des populations et le manque d’entretien de ces deux sources qui n’ont connu aucune amélioration ont fait qu’elles ne suffisaient plus à alimenter les quatre villages d’Amdoune Seddouk, et le chef-lieu communal. Pour cela, une décision a été prise par le maire des années 1970, d’alimenter la ville de Seddouk de la nappe phréatique de l’oued Soummam, laissant les eaux des deux sources pour les quatre villages.Quelques années seulement s’étaient écoulées pour que ces villages ressentent à leur tour un besoin supplémentaire en eau suite au rétrécissement comme peau de chagrin des deux sources dont les débits ont diminué considérablement. L’assemblée populaire des années 1980 au lieu de réaliser un forage sur les lieux des deux sources pour capter le maximum d’eau n’a pas trouvé mieux que d’alimenter les trois villages (Seddouk Ouadda, Ighil n’Djiber et Tibouamchine) de la nappe phréatique de l’oued Soummam d’une eau fade utilisée uniquement pour le ménage et laissant les eaux potables de ces deux sources pour la consommation.Ces dernières années, même avec l’alimentation des deux sources et de la nappe phréatique de l’oued Soummam, les trois villages (Seddouk Ouadda, Ighil n’Djiber et Tibouamchine avec l’augmentation de leurs populations qui va toujours crescendo représentaient encore un besoin en ce précieux liquide. Les populations pour étancher leur soif pendant des années et durant les saisons estivales iront chercher l’eau de ces sources dans les fontaines publiques installées séculairement juste en dessous sur le chemin de Seddouk Ouffela à quelque 3 km. Des chaînes interminables se constituaient de jour comme de nuit par des citoyens venant de partout.Pour ce faire, Tibouamouchine et Seddouk Ouadda deux villages visiblement éprouvés par des années de sécheresse où l’insuffisance de l’eau potable induite par le rétrécissement des débits des deux sources s’est faite ressentir ont, à compter de 1994, multiplié les démarches auprès des autorités locales demandant une distribution judicieuse et équitable des eaux de ces deux sources pour quatre villages et constatant avec désolation que leur demandes restaient à chaque fois vaines. Devant la passivité de la municipalité ils ont essayé tant bien que mal de solutionner à leurs dépens leurs déboires en initiant des forages grâce aux efforts conjugués entre les populations locales et leurs communautés émigrées.Si Seddouk Ouadda a réalisé une bonne affaire en captant la source millénaire et séculaire d’Ighzer Netsrougoua dont le débit constant en hiver comme en été leur donne une entière satisfaction, Tibouamouchine ce parent pauvre, ce village le plus important de la commune de Seddouk, fort de plus de 1500 hab, a préfèré réaliser deux forages de 50 m chacun, qui finalement, n’ont pas apporté de solution finale, puisque ce village traîne toujours un manque d’eau avec une distribution par quartier de 1h toutes les 48h, servie de nuit.Ces deux sources qui ont été jadis des facteurs de communion et de solidarité entre les populations à Amdoune Seddouk sont devenues à un certain moment des points de divergences entre ces mêmes populations qui ont théoriquement et traditionnellement les mêmes droits sur elle. Force est de constater, on ne sait par quelle bénédiction et en vertu de quel droit, certains s’arrogent le droit d’arroser des jardins pendant que d’autres n’ont pas le minimum pour étancher leur soif.

L. Beddar

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