Mouloud Mammeri, 30 ans déjà

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Mouloud Mammeri est né le 28 décembre 1917 à Taourirt Mimoun (Ath Yenni). C’était un humaniste et un grand homme de culture. Il découvre, comme il le disait lui-même, l’anthropologie sur le tard. C’est ainsi qu’il se penche sur la connaissance de ses ancêtres, les Berbères. En montagnard fier de sa descendance, mais aussi en aristocrate soucieux de la beauté et de la précision, il se mettra au service de sa culture.

Contre vents et marées et jugulant les obstacles de la bêtise humaine, il sera un fervent défenseur de cette culture millénaire, essentiellement orale et injustement marginalisée. C’est ainsi qu’il se transformera en anthropologue, linguiste et, en véritable militant, enquêtera, collectera, analysera et publiera sur les Berbères, leur langue, leur littérature et leur société, en langue française, mais surtout et aussi en langue amazighe. «L’Ahellil du Gourara» sera écrit en français mais «Yennayas Cheikh Mohand» en tamazight.

Son premier roman «La Colline oubliée» sera publié en 1952. Puis suivirent «Le Sommeil du Juste» en 1955, «L’Opium et le Bâton» en 1965, et enfin «La Traversée», en 1982. Mouloud Mammeri a aussi écrit des pièces théâtrales : «Le Banquet», «La Mort absurde des Aztèques», en 1973, «Le Foehn» ou «La Preuve par neuf», en 1982, et enfin «La Cité du soleil», en 1987.

Il publiera aussi des recueils de poésie : «Les Isefra de Si Mohand», en 1969, «Poèmes kabyles anciens», en 1980, et deux recueils de contes berbères de Kabylie «Machaho Telem Chaho», en 1980. En plus de sa contribution précoce à la promotion de la langue berbère (publication de «Précis de grammaire berbère», de «Tajerrumt n’tmazight» et de «Yennayas Cheikh Mohand»), c’est sous sa direction que seront publiées les revues «Lybica» et «Awal» ainsi que le lexique «Amawal».

Ce que beaucoup de gens ignorent, c’est que Mouloud Mammeri, de son nom de guerre «Si Bouakaz», est l’auteur et rédacteur du texte lu par M’hamed Yazid à l’assemblée de l’ONU pour l’indépendance de l’Algérie. Il nous quittera tragiquement en cette nuit du 25 au 26 février 1989 au volant de sa 205 alors qu’il revenait du Maroc où il avait donné une conférence.

Mais avant de nous quitter, il nous dira : «Quel que soit le point de la course où le terme m’atteindra, je partirai avec la certitude chevillée que, quels que soient les obstacles que l’histoire lui apportera, c’est dans le sens de sa libération que mon peuple (et à travers lui les autres) ira. L’ignorance, les préjugés, l’inculture peuvent entraver ce libre mouvement, mais il est sûr que le jour inévitablement viendra où l’on distinguera la vérité de ses faux-semblants. Tout le reste est littérature».

Tamila Souami

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