S. Ait Hamouda
La France occupait l’Algérie et l’Algérie était peuplée d’indigènes corvéables à merci. Les Algériens s’étaient mobilisés pour la libération de la France des Nazis, ils servirent de chair à canon et donnèrent leur vie pour une cause qui leur était étrangère. Le 8 mai 1945, la fin de la deuxième guerre mondiale, les indigènes crurent que la victoire les concernait aussi, que c’était aussi la leur, puisqu’ils ont participé à la libération du monde libre en général et de la France en particulier. Ils se sont gourés, ils se sont fait avoir une seconde fois, ils se sont fait blouser à tel point qu’ils ont reçu la réponse du pays qu’ils ont aidé à se débarrasser du joug des Allemands, un massacre qui n’avait rien à envier à ceux des Nazis.
Saâl Bouzid, un jeune scout de 22 ans qui était le porte- drapeau, a reçu une balle mortelle, il a été transporté chez le docteur Mostefai, où il a rendu son souffle. Il a été le premier martyr, le premier qui a montré la voie à suivre, le premier dans une liste interminable de cadavres de Sétif, Guelma et Kherata. On assassine a vue, on jette les Algériens dans les fours à chaux, on les balance des gorges, on les tue sans sommations. Kateb Yacine était collégiens à Sétif, il se rappelle de cet épisode : «Ma maitresse me trouva dans l’hôtel, elle me dit : Alors monsieur Kateb, vous l’avez votre révolution ?»
Il rentre dare-dare chez lui à Lafayette et les gendarmes sont venus le chercher et l’embarquèrent en prison. «C’est en prison que j’ai découvert le peuple qui était devant moi mais que je n’avais jamais vu jusque-là… J’ai découvert là mes personnages.» Sa mère perdit la raison. C’est ce que provoqua le 8 mai 1945 comme victime directe et collatérale. Aujourd’hui que l’on évoque cette date repère dans la mémoire de chaque Algérien et Algérienne, l’on se souvient par devoir mémoriel de ce que l’on a subi, de ce que l’armée coloniale nous infligea comme punition. Mais vint le 1er novembre 1954.
S. A. H.
