Accueil National Son fils s’oppose à la statue érigée à l’effigie de son père

Béjaïa Clôture hier du colloque dédié à Jean El Mouhoub Amrouche : Son fils s’oppose à la statue érigée à l’effigie de son père

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Une première ! Cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie, l’hommage a fini par avoir lieu. Une réhabilitation de l’un des

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personnage les plus emblématiques de la culture algérienne.

Du moins, c’est l’objectif fixé par les organisateurs de ce colloque : « Nous sommes ici pour poser une pierre, à vous de construire l’édifice », a déclaré Tassadit Yacine, l’une des organisatrices de l’événement. En rappelant le combat de Jean Amrouche, elle insista sur « sa mise à l’écart par la pensée unique ». « C’est dans le but de remédier à l’oubli et à la part pervertie de l’histoire de l’Algérie, que cette rencontre se doit de réussir », asséna-t-elle. De son côté le modérateur de la séance, F. Bouhmila, de la ‘’Ballade Littéraire’’, évoqua l’importance de tirer de l’oubli cette figure dont l’œuvre est ignorée par les institutions, d’où la nécessité de « faire la lumière sur un personnage important méconnu chez nous ». Après lecture d’un extrait d’un poème de J. Amrouche, Omar Fetmouche, Directeur du TRB, revient, pour sa part, sur le devoir de mémoire pour terminer son intervention en citant un auteur russe, Rassoul Gamzatov : « Si tu tires sur le passé à coups de fusil, l’avenir te tirera dessus à coups de canon ». L’invité d’honneur, le fils de Jean Amrouche, Pierre Amrouche, a pris la parole avec émotion : « Ce jour revêt un caractère essentiel, aucun hommage n’a été rendu à mon père, et celui-ci coïncide avec le Cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie et de sa mort », a-t-il dit. Madjid Merdaci, de l’université de Constantine, est revenu, dans sa communication, sur l’engagement de Jean Amrouche : « L’important, c’est la qualité de l’engagement de l’homme », affirma-t-il. Et cet engagement a été au centre des débats. Les interventions ont essayé de lever le voile sur l’apport de cet homme de lettres au combat pour l’indépendance. « Jean Amrouche est un intellectuel chevillé par la question nationale », déclara l’orateur. Il serait même en avance par rapport à son temps, selon les propos de Tassadit Yacine quand elle affirma que Jean Amrouche militait pour la diversité des partis en Algérie : « Il était pour le FLN politique et non pour le FLN idéologique », a-t-elle ajouté. Pierre Amrouche, en plus du rappel du parcours biographique et littéraire de son père, a exprimé sa désolation pour la stigmatisation dont a été victime celui-ci, non pas du fait de sa religion, mais plutôt parce que c’était un intellectuel, « et les intellectuels dérangent toujours », lâchera-t-il. En réponse à un intervenant qui insistait à propos des archives qui devaient être mises à la disposition des spécialistes, P. Amrouche s’est dit opposé à tout transfert de celles-ci vers l’Algérie : « Elles sont et resteront, pour le moment, en France, car l’Algérie n’est pas prête à les recevoir, ceci dit, je ne m’oppose pas au duplicata », a-t-il déclaré. A propos de la stèle érigée en hommage à son père, la posture de l’orateur est pour le moins surprenante. Il dit s’opposer à l’érection de celle-ci et se déclare contre toute idée de projet au Carré de martyrs : « parce que mon père n’a jamais pris les armes », expliqua-t-il. Trois axes ont articulé l’intervention d’Hervé Sanson, de l’Université de Paris. A partir de la figure du chiasme (comparaison littéraire), l’intervenant pose une dichotomie grâce à laquelle il donne une lecture des tiraillements vécus par « l’éternel Jugurtha », du fait de sa double culture. La problématique oralité/écriture a été ainsi revisitée à l’aune des textes de Jean El-Mouhoub Amrouche autant que celle, entre autres, de la tradition et de la modernité.

Cette figure de croisement, le chiasme, qui « renverse l’ordre établi » offre dès lors l’occasion d’une « explicitation » des positions d’El-Mouhoub Amrouche. Celui-ci semble, selon le conférencier, « conscient de l’orientation arabo-islamiste qu’allait prendre l’Algérie».

Nabila Guemghar

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