La filière du lait en souffrance !

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Le sachet est cédé à 23, 30 DA au distributeur pour finir à  25 DA chez le consommateur. C’est justement cette marge, jugée insuffisante, qui semble décourager les distributeurs d’investir dans ce créneau.

Le centre de collecte de lait de la wilaya de Bouira, sis dans la commune d’Aïn Bessam, est une filiale de la laiterie de Draâ Ben Khedda.Près de 400 éleveurs de la wilaya de Bouira, mais aussi de la région Est de Médéa, écoulent leur produit dans ce centre. Pour cette année, le centre enregistre, nous affirme un responsable rencontré sur place,   « une hausse de 20% de matière collectée par rapport à l’an dernier ». Cette hausse est justifiée par l’aide de l’Etat consacrée au secteur de l’agriculture, dont le segment de l’élevage qui a vu le nombre de producteurs augmenter à Bouira. En termes de production laitière,  un bond quantitatif a été enregistré : De 58 millions de litres en 2008 et  près de 90 millions de litres en 2011, 100 millions  de litres sont attendus à l’horizon 2014, selon Rachid Morsli, DSA de Bouira. Tout ceci, à priori, permet la disponibilité du lait en sachet. Pourtant, ce dernier, et depuis déjà quelques mois, n’arrive pas à satisfaire les besoins de la population. A ce propos, la consommation journalière est estimée à 100 000 sachets pour une population 700 000 habitants. Cependant, la laiterie de Draâ Ben Kheda destine 40 000 sachets à la consommation de Bouira. Les  60 000 sachets manquants demeurent donc une problématique pour assurer une alimentation correcte en lait, au quotidien.

Peu d’engouement pour la distribution 

A Bouira, quatre  distributeurs se partagent la tâche d’alimenter en lait les territoires de la wilaya. Chacun dispose de trois, voire quatre camions,  pour assurer la livraison.  Le sachet est cédé 23, 30 DA au distributeur pour finir à  25 DA chez le consommateur. C’est justement cette marge, jugée insuffisante, qui semble décourager les distributeurs d’investir dans ce créneau. « Lors du transport et des chargements des sachets, il arrive que plusieurs sachets de lait soient endommagés, et de ce fait, les commerçants se retrouvent avec du lait invendable. Ainsi en plus de cette perte, le quota destiné au commerçant se retrouve amoindri et c’est donc un manque à gagner pour tout le monde », dira Mohand distributeur de son état. A la lumière du peu de gain que cela induit, très peu d’investisseurs sont attirés par ce créneau. 

Des subventions dont ne profitent pas au consommateur

Les subventions de l’Etat pour maintenir le prix du sachet de lait à 25 DA sont hélas parfois « détournées » au profit de fabricants de produits laitiers qui ont investi dans des fromageries. Des produits fabriqués à base de lait (fromages, yaourts …) subventionnés, faut-il le souligner, mais la subvention ne profite pas aux consommateurs. A Bouira, la filière de la collecte de lait est assurée également par deux leaders en la matière. Ces deux privés sont implantés à Aïn Bessam et au chef-lieu de wilaya. Toutefois, ces investissements privés ne sont pas vus d’un très bon œil par certains : «  le lait est subventionné par l’Etat et des privés profitent de cette brèche pour acheter du lait qui sera destiné à la fabrication de yaourts et de fromages….il y a comme une incohérence sur le marché », disent-ils. De ce fait, ce lait qui ne sera pas bu, fera défaut sur les étals, au bénéfice du fromages et autres produits laitier dérivés. 

Les éleveurs face à la cherté des aliments

Sur le volet production, certains éleveurs affirment, à demi mot, se débarrasser de leurs vaches durant la saison hivernale et ce à cause de l’absence de pâturage : « Nous rencontrons des problèmes pour nourrir nos vaches en hiver car le fourrage n’est pas rentable pour la production de lait, l’herbe vient à manquer dans les champs et le quintal d’aliment à 3.800 da est excessivement cher pour nous…. ». Pour exemple, un quintal d’aliment permet à peine de nourrir une vache pendant 04 jours, sans compter le fourrage. Pour les éleveurs ayant un cheptel d’une cinquantaine de têtes, le budget réservé à l’aliment est important. « Il nous est difficile de nous approvisionner régulièrement en aliment en quantité suffisante, en plus du fait que nous sommes dépendants des centres de collecte qui nous achètent le lait ». Ainsi, les éleveurs disent réduire leur cheptel en hiver pour «  éviter des frais ». On ignore le sort réservé aux vaches durant la période hivernale, mais toujours est-il que le cheptel se reconstitue dès l’arrivée des beaux jours. Pour booster la production laitière et permettre à la population de ne plus dépendre des laiteries des wilayas avoisinantes, la création d’une laiterie à Bouira serait plus qu’indispensable. C’est justement dans cette optique que la zone industrielle de Lakhdaria  a été choisie pour recevoir certains projets dont une laiterie. 

Les laiteries de Tiaret et de M’sila à la rescousse

Depuis quelques temps, suite à la perturbation de la distribution du lait en sachet en provenance de Drâa Ben Khedda, les Bouiris découvrent d’autres marques de lait en provenance notamment des laiteries de M’sila et Tiaret. L’approvisionnement en lait depuis ces deux wilayas a fortement endigué la crise et profité aux consommateurs. Il y a lieu de souligner aussi que le lait de vache en sachet  a toujours été disponible. Seulement, cédé à 50 DA le litre, celui-ci n’a jusque là pas suscité grand intérêt auprès du consommateur, notamment celui à revenu moyen.    

Ousama.K et H.B

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