Sour El Ghozlane rêve toujours…

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Depuis que la question d'un nouveau découpage administratif du pays est mise sur la table du gouvernement, suivant les orientations du président de la République données en mai dernier, on assiste, dans la wilaya de Bouira, à une remontée en surface de vieilles attentes et d'anciennes revendications tendant à faire de Sour El Ghozlane une wilaya.

Le problème remonte au premier découpage après l’Indépendance, lorsque, en 1974, a été créée la wilaya de Bouira sur la base de deux territoires revenant aux anciens départements de la Grande Kabylie (Tizi-Ouzou) et du Titteri (Médéa). Ces deux territoires formeront une vaste wilaya de 4 454 km2, allant du sommet de Lalla Kedidja, sur le Djurdjura, jusqu’à la plaine steppique de Lachouaf, frontalière avec la wilaya de M’Sila. Lorsque le gouvernement ajoutera d’autres wilayas en 1984, pour passer de 31 à 48 wilayas, la revendication de faire de Sour El Ghozlane une wilaya revient au sein de la société civile locale et de l’élite universitaire. Non seulement cette demande est restée sans suite, mais, pire encore, elle se heurtera à une autre revendication de même nature qui finira par la neutraliser; c’est celle de la ville de Bousaâda, vieille cité maghrébine, laquelle, à son tour, n’avait pas « gobé » l’érection de M’Sila comme chef-lieu de wilaya en 1974. Avec les dimensions géographiques et l’importance démographique de l’époque, il était impossible d’avoir côte à côte deux wilayas, à savoir Sour El Ghozlane et Bousaâda, dont les chefs-lieux sont distants d’une centaine de kilomètres. C’est une distance relativement faible sur la vastitude des Hauts Plateaux. « Coincées » entre Bouira et M’Sila, les villes de Sour El Ghozlane et Bousaâda ne cessent de nourrir l’espoir d’être érigées en wilayas. Les discussions ont été très animées dans la rue, dans les cafés et dans les bureaux de l’administration, depuis que le gouvernement a fait état du projet d’un nouveau découpage territorial. Le sujet est d’autant plus commenté que le Président, dans ses orientations au gouvernement, a insisté sur la priorité accordée aux régions du Sud et des Hauts Plateaux. Il est vrai que le découpage actuel est marqué par une disharmonie et des disparités criardes. Aussi bien sur le plan humain que sur le plan naturel (écologique), le zoning adopté en 1974 ne répond à aucune norme de gestion rationnelle des ressources. Actuellement, la wilaya de Bouira administre un territoire du nord au climat subhumide, fait de montagnes, avec une population regroupée densément dans des villages kabyles et exerçant une agriculture de montagne (arboriculture, particulièrement l’olivier, élevage bovin), l’artisanat et dans le secteur des services. Le territoire du sud constitue la porte des Hauts Plateaux. C’est une région steppique, à l’habitat dispersé dont la population vit de l’élevage ovin en extensif et des céréales. Le couvert végétal se limite à quelques touffes d’alfa et d’armoise blanche. Le pastoralisme est la vocation première de cette zone qui s’ouvre sur la grande steppe des Hauts Plateaux. La pluviométrie n’y dépasse pas les 200 mm/an, tandis que sur la partie nord, le Djurdjura, elle dépasse les 1200 mm/an. L’autre pôle géographique et humain, c’est celui de l’Atlas blidéen sur lequel est située la région de Lakhdaria. Cette zone de l’Isser, allant jusqu’aux confins de Tablat (wilaya de Médéa), a toujours espéré constituer une wilaya. Le projet mort-né de 2006 l’avait bien intégré dans cette perspective. Il en est de même de la région Est de la wilaya, à savoir la daïra de M’Chedallah, qui aurait été intégrée, dans le même projet de 2006, à la future wilaya d’Akbou. Le contraste naturel qui caractérise l’actuelle wilaya de Bouira  a, bien entendu, entraîné des différences de modes de vie et des difficultés de gestion assez diversifiées. Autrement dit, aucun système normatif ou standardisé ne peut être adopté d’une façon uniforme, dans le domaine de la gestion du foncier, de l’urbanisme, des infrastructures, des travaux publics et de l’aménagement du territoire. Ce sont là des spécificités qui surgissent souvent dans la gestion quotidienne au niveau des différents services de la wilaya. La nouvelle carte du territoire que compte mettre en place le gouvernement pourra-t-elle rattraper les erreurs du passé en travaillant à l’harmonisation optimale de la gestion de l’espace et des ressources?

Amar Naït Messaoud

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