La violence en milieu scolaire a la peau dure

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Les écoles de la wilaya de Bgayet sont-elles devenues un terreau de la violence et de maltraitance ? À se fier aux nombreux échos émanant d’éducateurs, d’encadreurs et de parents d’élèves, on est tenté de répondre par l’affirmative.

«L’usage de la violence sous toutes ses formes est en flagrante contradiction avec la mission assignée à l’institution pédagogique, qui consiste à faire épanouir cette frange vulnérable», conteste d’emblée une psychologue officiant dans une unité de dépistage et de suivi (UDS) d’Akbou. S’il est vrai que des professeurs se voient menacés par des élèver du CEM ou du lycée, qu’en est-il de l’enfant, pas plus haut que trois pommes, dont l’instituteur lui fait subir des sévisses corporels et autres actes, aussi vexatoires qu’humiliants ? Une théorie éducative traumatisante à laquelle recourent certains instituteurs du palier primaire, justifiant leur geste par le souci d’entretenir une discipline de fer et «pour le bien de l’enfant». «Je reçois régulièrement en consultation des cas d’enfants traumatisés et qui ne songent qu’à une chose : ne plus retourner à l’école », dira, atterrée, une psychologue de Seddouk. «C’est une œuvre de destruction de l’enfant qui se manifeste par le décrochage scolaire et, plus tard, peut déboucher sur la délinquance et même la dépression », alerte-elle. Des cas de violence sont aussi signalés par nombre de parents d’élèves de la région d’El Kseur, lesquels se sont élevés contre cette pratique anti pédagogique, aussi agressive que sauvage. «J’ai été témoin de scènes scandaleuses où des mioches de 7 à 10 ans se sont fait maltraiter par leurs enseignants, sous l’œil passif, voire complice, de la direction de l’établissement», soutient un parent d’élève du quartier Berchiche. Ce phénomène, qui semble se répandre comme une traînée de poudre, ne favorise pas moins l’échec scolaire en fin de parcours, né du climat délétère qu’instaure des éducateurs, sensés être des parangons en matière de psychopédagogie de l’enfant. Pour avoir roulé sa bosse, des décennies durant, dans le secteur de l’éducation, un directeur d’école de Tazmalt confirme que « de plus en plus d’enfants scolarisés subissent de mauvais traitements». L’on ne se contente plus, s’indigne-t-on, de sermonner l’enfant, lui administrer la punition «modérée» comme le mettre au piquet, lui assener une «falaka» sur le bout des doigts, ou encore en lui faisant recopier dix fois la table de multiplication ou une conjugaison dans les différents temps. Ces sanctions, quoi que contestables, ont fait leur temps. L’heure est plutôt aux coups de colère de l’instituteur qui décharge son fiel avec démesure et à ses coups de poings qui envoient l’infortuné chérubin parfois dans les «décors», avant de tomber dans les vapes. Cet usage musclé de l’enseignant entraînera, sans nul doute, la perte d’intérêt chez le gosse, et subséquemment, la fugue ou l’abandon de l’école. Pourtant, la loi 0864 du 23 janvier 2008, en vigueur depuis 2009, portant orientation sur l’éducation nationale, dispose, entre autre, que «les châtiments corporels, les sévisses moraux et toutes formes d’actes vexatoires sont proscrits dans les établissements scolaires et les contrevenants s’exposent à des sanctions administratives, avec poursuites judiciaires». Sustenté dans un humus chargé de violence et de brutalité et pétri dans le moule anti pédagogique, n’est-ce pas que l’enfant frappé apprend à frapper les autres, en s’identifiant à ses bourreaux ?

N. Maouche

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