Sécurité économique et sécurité nationale vont de pair

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Jamais sans doute, la sécurité économique du pays, en relation avec le concept de la sécurité nationale, n’a été martelée avec autant d’insistance et de références à des défis que l’Algérie se doit de relever urgemment. En effet, le discours du président Bouteflika à l’occasion de la fête du 24 février, lu hier à Oran par Mohamed Ali Boughazi, conseiller à la présidence de la République, se veut le condensé des préoccupations économiques et sociales du pays dans un contexte fait de déprime des prix du pétrole et d’environnement régional où la paix perd de plus en plus ses droits de cité. « La sauvegarde de la sécurité globale de notre pays, qui accapare tous nos efforts, suppose une mobilisation de l’ensemble de nos forces vives pour garantir notre sécurité économique », explique Bouteflika, en rappelant que « les acquis sociaux, la réduction durable du niveau de chômage ainsi que les nombreuses réalisations socio-économiques n’ont pu être obtenus que grâce au rétablissement de la paix et à la stabilité qui ont prévalu tout au long de ces dernières années ». À cette occasion, le président a appelé à « fructifier les hydrocarbures conventionnels et non conventionnels ainsi que les énergies renouvelables dont dispose le pays ». En effet, on sait que les hydrocarbures conventionnels enregistrent des diminutions de production depuis au moins 2011. L’attaque de plate-forme gazière de Tiguentourine a affecté le potentiel d’exportation du pays. Cela s’est imbriqué par la suite à la chute des prix sur les marchés mondiaux. Les hydrocarbures non conventionnels, comme le gaz de schiste qui a soulevé une polémique, rapidement récupérée par la classe politique, peut être une autre ressource pour le pays, à condition, comme le souligne le président de « veiller scrupuleusement à assurer la sauvegarde de la santé de la population et la protection de l’environnement ». Quant aux énergies renouvelables, l’Algérie est partie pour prendre option pour le solaire et l’éolien. Il s’agit de mettre la technologie adéquate, elle existe et est à la portée de l’Algérie, au service de ce nouveau type d’énergie connue pour être propre et renouvelable. L’occasion du 24  février a aussi conduit le président Bouteflika à rappeler que « la décision historique de nationalisation des hydrocarbures avait été le point d’orgue de la concrétisation du parachèvement de l’indépendance à travers la conquête de la souveraineté économique ». Cette dernière a permis, rappelle Bouteflika, de mettre la ressource pétrolière au service du développement national comme un prolongement des acquis de la révolution armée. Le tissu industriel, rendu possible par les recettes en hydrocarbures est, aujourd’hui, « en passe d’être densifié et mieux intégré à travers la multiplication des petites et moyennes entreprises fortement créatrices d’emplois ». Allusion est ici faite à la nouvelle politique industrielle du pays, appuyée sur l’entreprise publique réhabilitée dans ses missions de production des biens et services, d’une part, et la promotion du secteur privé d’autre part. Bouteflika tient à souligner la part du secteur privé dans l’économie nationale: « Je ne recommanderai jamais assez de ne rien ménager pour obtenir et maintenir, pour toujours, une totale symbiose entre ces deux secteurs (public et privé). L’avenir de notre pays en dépend ». L’héritage du secteur public, ayant été géré par des portefeuilles de holdings, puis des Sociétés de gestion des participations (SGP), a été regroupé à partir d’avant-hier, 23 février, dans 12 groupes industriels devant faire bénéficier l’entreprise publique d’une « autonomie totale », selon les termes du ministre de l’Industrie et des Mines, Abdessalem Bouchouareb. Malgré les difficultés et les aléas du marché mondial en hydrocarbures, « de grands projets de gazoducs transcontinentaux ont été réalisés. Avec des capacités modernes d’exportation significative, notre pays dispose, aujourd’hui, des moyens lui permettant de conforter sa capacité de desservir de multiples marchés à travers le monde », a noté Bouteflika dans son discours. À la même occasion, il est revenu sur la satisfaction du marché intérieur en produits énergétiques, particulièrement les efforts faits dans le domaine de l’électrification et du raccordement des foyers au gaz naturel. Ce dernier « a atteint un taux de pénétration des plus importants au monde », souligne-t-il, précisant aussi que le niveau de vie des Algériens est tiré à la hausse grâce aux revenus énergétiques. 

 Austérité et revivification du Pacte économique et social 

Cependant, cela ne peut durer plus longtemps. Autrement dit, cette typologie de développement, basée sur une ressource unique, doit céder la place à une véritable diversification économique, selon le président. Cette diversification « demeure une priorité des pouvoirs publics pour conforter la croissance et renforcer la résilience de l’économie face aux chocs externes », souligne-t-il. En plus de la diversification qui est censée explorer toutes les potentialités en friche du pays, Bouteflika aborde aussi le volet de la compétitivité des entreprises dans les branches déjà existantes. Une compétitivité qui, avec la diversification, ne cesse  » de constituer pour nous une priorité pour exploiter tout le potentiel de croissance que recèlent plusieurs autres secteurs créateurs de richesses et d’emplois, et renforcer la résilience de notre économie notamment face à des chocs externes ». Pour faire face au nouveau contexte de la contraction des recettes budgétaires, le président de la République affirme que « les secteurs de l’industrie, de la pétrochimie, de l’agriculture, du tourisme et des nouvelles technologies de l’information et de la communication doivent être dynamisés ».

Sur le plan des dépenses, le président appelle à une « gestion rigoureuse et prudente » des recettes d’exportation. Ces dernières devraient être orientées prioritairement « vers la mise en place de bases nécessaires au développement durable de l’économie nationale et en accélérant le rythme de mise en œuvre et d’approfondissement des réformes ».

Le président Bouteflika prononce le mot tant redouté par plusieurs ministres et qui l’évitent au maximum dans leur discours: il s’agit du mot « austérité » de laquelle le président dira qu’elle « ne sera point suffisante pour juguler la crise induite par la baisse des cours pétroliers ». Cette franchise se veut également un appel à la revivification du Pacte économique et social de croissance, signé par la tripartite (gouvernement, syndicat, patronat), et par lequel le gouvernement entend « promouvoir, dans un cadre consensuel, une croissance durable génératrice d’emplois et de richesses reposant sur une plus forte contribution des secteurs productifs public et privé censés, à terme, de prendre le relais du Trésor public dans le financement des programmes de  développement ».

A. Naït Messaoud

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