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La réforme du système éducatif, une lueur d’espoir : Comment associer l’apprenant à son apprentissage

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En 2003, le ministère de l’Éducation nationale, s’appuyant sur les orientations de la Commission nationale de la réforme du système éducatif (CNRSE), chargera la Commission nationale des programmes (CNP) de la conception des programmes scolaires et de la proposition des méthodes appropriées pour leur mise en œuvre.

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Il s’agit de passer du paradigme de l’enseignement à celui de l’enseignement/apprentissage, basé sur une nouvelle approche qu’est l’approche par compétences dans le cadre d’une méthodologie nouvelle qu’est la pédagogie de projet. La pédagogie de projet prônée par le ministère de l’Éducation nationale comme méthodologie d’apprentissage génère des apprentissages autres que les apprentissages théoriques ou académiques. Il s’agit des apprentissages qui portent sur des savoir-faire et des savoir-être. Elle permet à l’apprenant d’être au centre de l’apprentissage. Ce dispositif basé essentiellement sur le montage de projets rend l’apprenant plus actif et plus entreprenant. C’est par ce processus que les membres du groupe recherchent les informations et les partagent. Ils construisent de nouvelles connaissances et de nouvelles compétences. Le sentiment d’insécurité que le sujet ressent dans son isolement s’éclipse progressivement après son intégration dans un groupe donné. Ainsi, la coopération entre les différents membres du groupe, l’assiduité et la responsabilité individuelle et collective l’entraide, les encouragements et le milieu convivial qui caractérisent la vie du groupe sont autant d’affects qui aident l’apprenant à s’épanouir et à sortir de son isolement. Le processus de réalisation d’un projet peut le conduire à fréquenter différents espaces générateurs d’apprentissages aussi utiles les uns que les autres. Apprendre par projets implique l’apprenant dans son apprentissage, ceci l’amènera à consentir des efforts pour progresser sans pour autant qu’il soit obligé. L’apprentissage par projet s’oppose, donc, à la méthode classique qui consiste en un transfert du savoir du maître à l’apprenant. Toutefois, la mise en place de cette nouvelle méthodologie n’arrive pas à se concrétiser réellement dans notre système éducatif. La réalisation de ce projet passe d’abord par la formation des enseignants. Pour répondre aux exigences des nouvelles orientations du système éducatif algérien, l’enseignant doit prendre du recul vis-à-vis des rituels pédagogiques figés et stéréotypés, il doit réfléchir à son action pédagogique et ne pas rester guidé et attaché aux manuels et aux méthodes toutes faites mais surtout à interpréter les contenus du programme en termes de compétences à installer. Cette nouvelle pratique pédagogique nous mènera sans aucun doute à réfléchir sur un autre grand chantier qu’est l’évaluation. Processus visant à apprécier objectivement tous les aspects reliés aux apprentissages : le rendement et les caractéristiques des sujets, les programmes d’études, l’enseignement, l’évaluation, la gestion de l’enseignement et de l’apprentissage, le personnel, les établissements en vue d’assurer le meilleur système éducatif possible. Dictionnaire actuel de l’éducation de Renald Legendre. Les représentations traditionnelles sur l’évaluation scolaire convergent généralement pour associer et confondre la notion de la notation et celle de l’évaluation. Alors qu’évaluer n’est pas noter. Il ne s’agit plus de mesurer mais d’analyser, de diagnostiquer, de se centrer sur les apprentissages afin de mieux aider l’apprenant à les réaliser. Pour cela, l’évaluation doit devenir réflexive. L’évaluation doit être au cœur de l’activité de l’enseignant et sert pour la régulation des apprentissages. De ce fait, l’erreur devient une réalité à gérer, non à traquer : il ne s’agit plus de «piéger» mais de saisir les erreurs pour comprendre et aider l’apprenant. L’évaluation ne se résume pas à la moyenne qu’on met sur les bulletins scolaires, elle doit plutôt être un outil pour identifier la progression des apprenants et leurs difficultés éventuelles.

Ce dispositif basé essentiellement sur le montage de projets rend l’apprenant plus actif et plus

entreprenant.Cette évaluation doit être fréquente et régulière. Cette nouvelle méthodologie peut être aussi l’une des solutions qui peuvent mettre fin à la violence qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans nos établissements scolaires. Les changements qui s’opèrent dans la société privilégient la tolérance, l’autonomie, la négociation et les libertés individuelles. Ainsi, les anciennes méthodes pédagogiques, qui ont longtemps caractérisé l’école ne font plus l’unanimité chez les apprenants aujourd’hui. Ceci, met les enseignants dans une situation très confuse. Eux qui sont habitués à faire valoir leur autorité pédagogique devant des apprenants passifs, auxquels on impose un dispositif qui privilégie la mémorisation et la restitution mécanique des connaissances acquises au détriment de l’esprit critique, se retrouvent devant des élèves qui demandent qu’on leur accorde plus d’intérêt et de considération. Au lieu d’être créatif, autonome, spontané à l’écoute de l’élève, animateur plutôt que transmetteur de connaissances, l’enseignant continue à dispenser un apprentissage classique qui le met en position de détenteur de savoir à transmettre aux apprenants chargés de se l’approprier. Les enseignants sont alors pris entre deux cultures : la culture ancienne dans laquelle ils sont formés et la nouvelle culture qui s’impose à eux. N’ayant pas le choix, les enseignants continuent à travailler comme ils ont l’habitude de le faire parce qu’ils n’ont pas d’autres solutions. En d’autres termes, ils n’ont pas été préparés à ce changement.

L’évaluation ne se résume pas à la moyenne qu’on met sur les bulletins scolaires, elle doit plutôt être un outil pour identifier la progression des apprenants et leurs difficultés éventuelles.

Cela est vécu comme une forme de violence par les apprenants et engendre des répercussions sur leur comportement. Cependant, la violence ne se résume pas aux châtiments corporels, cette pratique qui a fait un très long chemin et elle n’est pas totalement absente dans nos écoles même si elle est interdite par les textes législatifs. Certains enseignants croient toujours que l’élève ne peut apprendre que s’il est soumis à des pressions violentes. C’est pour cela qu’une grande partie de nos élèves continuent à subir l’enseignement et par ricochet à haïr l’école. Ce lieu qui est pourtant censé être un lieu de savoir et d’épanouissement. La charge de travail imposée aux apprenants, les programmes trop chargés, le type d’évaluation pratiquée, sont autant de formes de violence. Est-il possible de continuer à souffrir nos élèves avec nos pratiques ? L’élève se sentira-t-il un jour concerné par sa propre formation ? Aura-t-il le droit de s’exprimer sans être grondé par son « maître » ? Viendra-t-il à l’école sans avoir la peur de ne pas avoir appris telle leçon ou ne pas avoir fait tel exercice ? L’école n’est-elle pas ce lieu où l’élève peut s’épanouir et vivre heureux ? Autant de questions qui restent aujourd’hui sans réponses, si ce n’est quelques initiatives de la part de certains enseignants qui ont compris que le rapport pédagogique ne doit pas être réduit à un simple rapport de communication qui se traduit par l’imposition de l’autorité pédagogique. La créativité de l’enseignant, son autonomie et sa spontanéité à l’écoute de l’apprenant sont autant de facteurs qui permettent à l’apprenant d’être associé à son apprentissage et à participer à sa propre formation. Par ailleurs, le dialogue, la médiation, l’interaction, la négociation et l’écoute sont des facteurs qui peuvent faire face à la violence. De ce fait, l’école est plus que jamais interpellée.

Bekhti Ali.

à propos de l’auteur…

Ali Bakhti est enseignant de tamazight en collège à Tizi-Ouzou. Titulaire d’une licence en langue et culture amazighes de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, d’une licence et d’un Master en sciences de l’éducation de l’université Paris 8. Doctorant en sciences de l’éducation, université Paris 8.

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