L’agriculture, une salutaire alternative pour les jeunes

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Une grande partie de la jeunesse de Timizart, à 30 km au nord de la ville de Tizi-Ouzou, endure un chômage endémique. Cette commune rurale de près de 40 000 habitants, pour la plupart des jeunes de 20 à 40 ans, n’arrive toujours pas à amorcer son développement économique qui puisse offrir à ses jeunes désœuvrés une insertion socioprofessionnelle.

«Les offres d’emplois permanents sont extrêmement rares dans notre commune. Ceux qui cherchent un travail doivent aller voir ailleurs, à Fréha, Azazga ou Tizi-Ouzou ou bien dans d’autres wilayas», témoigne T. Mustapha, un universitaire au chômage depuis 2 ans. En l’absence de chiffres officiels sur le taux du chômage dans cette région, la réalité du terrain reste une référence viable sur l’ampleur de ce fléau qui lamine la jeunesse et menace la stabilité sociale. Il suffit de faire un tour aux villages de la commune pour constater de visu l’amère réalité. Les cafétérias et les placettes publiques ne désemplissent pas de toute la journée, refuges des jeunes qui y «tuent» le temps.

Des investissements créateurs d’emplois ? Ils se comptent sur les doigts d’une seule main…

Une jeunesse inactive est pourtant considérée comme un facteur nuisible à la société et à l’économie, car exposée à la délinquance et à la déperdition. C’est une population à risque. Le chômage, selon notre jeune interlocuteur, est imputable à l’inexistence de la moindre unité industrielle pouvant accueillir la main d’œuvre locale. Aucun projet d’investissement capable de générer des postes d’emploi n’existe en effet dans toute la commune, bien qu’elle dispose d’énormes atouts, notamment en capital foncier et potentialités humaines. La zone d’activité d’Azrou, dans le village d’Abizar, annoncée en 2015 par l’ex-wali Brahim Merrad, est toujours en jachère et le dossier n’a pas bougé d’un iota. L’instabilité du peu d’emploi qui existe et l’absence de la couverture sociale sont aussi parmi les facteurs qui poussent les jeunes à chercher ailleurs, alors que 70% de ces jeunes travaillent dans l’informel. «Depuis 10 ans que j’enchaîne et cumule des petits boulots, sur les chantiers, dans l’agriculture ou le commerce, je n’arrive pas à avoir une vie stabile. Ce qu’il me faut c’est un travail permanent avec une couverture sociale. La majorité des jeunes que je connais travaillent sans assurance», déplore I. Brahim, manœuvre de son état.

L’aide sociale et le pré-emploi pour résorber le chômage

Certains jeunes diplômés sont recrutés dans le cadre des différents dispositifs de pré-emploi, pour tenter de résorber un tant soit peu le chômage endémique. Mais avec des salaires dérisoires et un contrat d’une année renouvelable, dans le meilleur des cas pour une autre année supplémentaire, rien ne s’améliore pour ces jeunes puisqu’au bout d’une année ou deux, retour à la case de départ, la précarité. La gent féminine est la catégorie la plus touchée par ce phénomène : «J’ai travaillé durant deux ans dans le cadre de la DAS, dans un CEM de la localité, comme psychologue avec une mensualité insignifiante. L’année passée, mon contrat a expiré et je ne peux pas le renouveler, donc je dois chercher autre chose. Cela ne permet d’acquérir que très peu d’expérience», dira amèrement O. Lydia, titulaire d’un Master 2 en psychologie clinique.

L’agriculture, un des secteurs les plus sûrs !

Le chômage touche autant les jeunes sans formation ni instruction que les diplômés de l’enseignement supérieur. Ils sont ainsi des milliers à se débrouiller pour vivoter grâce au commerce informel, aux durs travaux du bâtiment ou bien à des jobs saisonniers dans le domaine de l’agriculture. Le secteur agricole représente d’ailleurs le domaine le plus prisé par les jeunes en quête de travail, forcément à cause de l’absence de meilleures perspectives, mais aussi pour l’énorme potentiel agropastoral dont dispose la commune et qui la place dans le rang d’un leader régional en matière de production laitière, oléicole, apicole et d’élevage. Mais bien que l’agriculture représente une activité d’avenir et pleine d’opportunités pour ces jeunes chômeurs, son caractère informel, l’absence de couverture sociale et l’instabilité font fuir les plus assidus des demandeurs. Or, cette jeunesse devrait être le moteur du développement de ce secteur. Un vieil adage kabyle dit «Ne prospérera que le Fellah et son fils et celui qui tient sa langue». La solution semble plus qu’évidente, faire la jonction entre un secteur à promouvoir qu’est l’agriculture et une main d’ouvre en quête de travail. Pourvu que l’Etat y mette plus de mesures d’encouragement et de soutien pour les porteurs de projets afin d’éradiquer l’informel et l’instabilité qui entravent sérieusement le développement de ce secteur stratégique.

Oulagha Ahmed

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