Entre témoins et parrains

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Par Anouar Rouchi

La Corse et l’Algérie ont la Méditerranée en partage. Mais n’ont-elles que cela en commun ? L’inénarrable Jean Amadou racontait la semaine dernière, sur une chaîne française de télévision, cette blague truculente : “En Corse, il est quasiment impossible d’organiser un mariage. Par contre, les baptèmes ne posent aucun problème. Pourquoi ? Parce qu’en Corse, il est toujours très difficile de trouver deux témoins alors que les parrains sont légion”. En Algérie, on n’a décidément pas peur des difficultés. En effet, pour contracter un mariage, non seulement il faut deux témoins mais il faut également un parrain pour la femme. Mais, comme l’Algérie n’est pas la Corse, cela ne freine en rien la cadence des mariages. C’est que, chez nous, le témoignage est une vertu cardinale. On témoigne de tout et surtout, que l’on ait vu ou pas, que l’on sache ou pas. Cela nous vient sans doute de notre religion dont la profession de foi consiste à témoigner cinq fois par jour, à l’occasion de chaque prière.Le mariage sera d’autant plus aisé à l’avenir que la future épouse, grâce à la nouvelle mouture du code de la famille, peut désigner librement son parrain. Des politicards pinces-sans-rire refusent de voir une avancée dans cette disposition.Imaginons qu’au cours des siècles passés, l’esclave pouvait choisir son maître ! Ne pense-t-on pas que l’histoire de l’humanité en aurait été bouleversée ? Imaginons aussi que depuis l’aube des temps, les filles de joie pouvaient choisir leur proxénète. cela aurait démocratisé le plus vieux métier du monde et, incontestablement, cela aurait contribué à démocratiser tous les autres métiers, pour le plus grand bonheur de l’humanité. Comme on le constate, de petites évolutions peuvent être à la base de bouleversements historiques. Journée mondiale de la femme oblige, on ne peut parler de mariage sans évoquer le divorce. D’autant plus que c’est ce dernier qui conduit très souvent à des situations insoutenables pour la femme. Pour un oui ou pour un non, l’épouse peut être répudiée. Elle se retrouve alors à la rue, parfois même avec ses bambins, une main devant, une main derrière. Par contre, si d’aventure l’épouse voulait se séparer de son mari, elle se trouve face à une conditionnalité quasi-impossible à satisfaire. Fort heureusement, là aussi, les choses semblent connaître quelques améliorations.Que les femmes algériennes se rassurent néanmoins ! Elles ne sont pas les seules, dans notre pays, à subir l’injustice des lois qui régissent le divorce. Tous les militants des partis politiques vous le diront, ceux qui sont confrontés aux mêmes vicissitudes.A la tête de chaque parti, y compris et surtout ceux qui se réclament de la démocratie, règne sans partage un gourou. Le gourou est toujours infaillible car “il sait tout”. Qu’un militant ou un cadre ose une idée quelque peu nuancée et son exclusion est prononcée. Mais que ce militant ou ce cadre, las des extravagances du gourou décide de reprendre sa liberté et la meute est lâchée. Au minimum, on en fait un supplétif de la sécurité militaire. Si en plus il a l’outrecuidance de créer son propre parti…Mais voilà que je me surprends, moi aussi, à témoigner…

A. R.

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