La prise de conscience quant à l’importance de protéger et préserver l’environnement, à travers plusieurs localités de la wilaya de Tizi Ouzou, commence à donner ses fruits et une meilleure image aux villages de la wilaya. L’initiative de nettoyer et d’embellir leur village, enclenchée par un groupe de jeunes des quartiers Aït Moussa et Taddert Oufella, dans le village d’Aït Abdelmoumène, relevant de la commune de tizi Ntléta, à une trentaine de kilomètres au sud du chef-lieu de wilaya de Tizi Ouzou, prend de l’ampleur et se généralise à l’ensemble des quartiers du village.
En effet, les jeunes d’Aït Ighil, d’Aït Graiche, d’Aït Ali Ouahmed, de Tassoukit, de Tighilt Oumezir et d’Igharviyene adhèrent à la démarche depuis plus d’un mois. Les travaux se poursuivent quotidiennement et s’accentuent pendant les week-ends. Dès l’entrée du village par le nord, à Tighilt Oumezir, l’état des lieux a nettement évolué. La propreté revient progressivement. Il devenu rare de trouver par terre une cannette, une bouteille vide ou un sachet noir. Hier, il nous a té donné de constater que les jeunes volontaires sont passés à la vitesse supérieure, en entamant le dallage des accotements.
Un peu plus loin, à Taddert Oufella, Amalou et Aït Moussa, les quartiers ont changé de visage. L’embellissement est une réalité palpable. Les placettes sont aménagées, les murs peint et décorés et surtout les sachets noirs et les emballages ont disparu laissant place à différents tableau peints par les jeunes du village. À quelques centaine de mètres, c’est la grande place de Timrijt qui refait peau neuve. Le grand talus de Timrijt a été réaménage, en attendant l’acheminement de l’eau pour en faire une véritable cascade, chose qui n’existe nulle part ailleurs dans les environs.
À Aït Graiche, Aït slimane et Aït Amar, le cap est mis sur l’élargissement et le dallage des accotements. Une case a été louée et le reste a été assuré par les citoyens des dits quartiers. Les lieux sont redevenus, pour le moins, propres et attrayants. En remontant un peu plus loin vers Aït Ali Ouahmed et Tizi Tsoukit, les lieux ont tellement changé qu’il est difficile pour quelqu’un qui n’a pas visité la région depuis longtemps de reconnaitre la localité. Aucun détritus ni le moindre déchet à l’horizon. Les sachets en plastique, les cannettes et autres emballages qui infestaient les lieux ont complètement disparu. Les jeunes volontaires ont même procédé à la démolition des anciens murs, des clôtures et des bancs en béton.
Leur reconstruction avec art et manière a permis à la grande place de Tizi Tsoukit de retrouver des couleurs. De jeunes artistes-peintres sont ensuite passés à la décoration des murs : Matoub, le défunt chantre de la chanson engagée kabyle est ainsi immortalisé sur l’un des murs du cimetière. Ahitus avec son enclume et son marteau est également peint de fort belle manière. Le drapeau amazigh est peint porté par deux colombes, donnant à la place un beau cachet amazigh. En face, sur le grand mur, un avion géant entame son envol, un tableau réalisé par l’un des petits fils de feu Terbouche Mourad, conseiller principal de Abane Ramdane et premier fédéral de France.
Mieux encore, les jeunes volontaires ont démoli l’ancien mur de clôture du cimetière et sa reconstruction est juste artistique. Des fontaines et des jets d’eau sont également réalisés. Les murs sont décorés de portes et fenêtres peintes à la couleur du bois, qu’on serait tenté de les ouvrir. C’est à s’y méprendre ! À Bouchata, les jeunes ont non seulement nettoyé l’ensemble de leur quartier, mais ils ont aussi repeint les murs et dessiné de beaux tableaux, dont le portrait du Rebelle. Des décors ont également été confectionnés à l’aide de pierres taillées. Le quartier est devenu plus propre et plus attrayant qu’il ne l’a jamais été. «Nous en avons assez de l’insalubrité. Nous nous sommes engagés à améliorer l’état des lieux pour améliorer notre cadre de vie avant tout, mais aussi pour donner une leçon aux autorités locales qui nous ont abandonnés.
Les jeunes continuent de travailler dur pendant de longues journées. Toute la population ne prête aide et assistance avec des dons en argent et des Waadas. Nous allons poursuivre notre action jusqu’à faire de notre quartier un lieu admiré et envié», dira fièrement un des jeunes bénévoles.
Une leçon aux responsables…
La mobilisation de ces braves jeunes a permis au village de retrouver une belle image. «Nous sommes un groupe de jeunes qui a eu marre de vivre dans l’insalubrité et le chaos. Nous méritons de vivre dans un milieu saint et propre. Les autorités locales se contentent de ramasser les ordures une seule fois par semaine. Les comités de villages n’organisent plus, comme avant, des journées de volontariat et les citoyens ont baissé les bras. Nous nous sommes dit que nous ne pouvions rester sans rien faire. Les habitants conscients et généreux nous aident par des dons en argent, pour acheter de la peinture, des rouleaux, des pinceaux, du ciment et du sable.
Si tout marche comme prévu, l’année prochaine nous participerons au concours Aissat Rabah de l’APW de Tizi Ouzou et nous ferons tout pour avoir notre distinction», se promettent les bénévoles. Du côté du village voisin Icherdiouène, dans la commune de Béni douala, la fièvre de l’environnement est également à son comble. Hier, les villageois se sont mobilisés pour nettoyer et désherber les accotements du chemin communal allant de la route de wilaya 100 jusqu’à leur village. Armés de pelles, de pioches, de scies et d’autres outils, ils se sont fait un devoir d’éradiquer le moindre déchet et la moindre herbe sauvage. Une initiative à saluer, surtout que cet axe routier, qui vient d’être bitumé, était dans un passé très récent assez triste, les arbres et leurs ombrages débordaient sur la chaussée, réduisant la visibilité et donnant un sentiment d’insécurité.
L’accompagnement des autorités espéré, mais…
Quand on voit l’ampleur de cette prise de conscience qui est née chez ces jeunes pour protéger l’environnement et améliorer le cadre de vie dans leur village, les autorités locales, de wilaya et nationales devraient profiter de cette occasion, pour enclencher une réelle dynamique écologique. Une visite sur les lieux, des dons d’arbres et tout autre encouragement pourraient rendre ces initiatives citoyennes plus pérennes et en faire le début de l’ancrage d’une politique Verte durable. Le P/APC est appelé à s’impliquer un peu plus dans cette prise de conscience, en rendant par exemple visite à ces bénévoles et en dégageant même une petite cagnotte destinée à l’environnement.
La direction de l’environnement peut, elle aussi, saisir l’occasion, en organisation des conférences et des campagnes de sensibilisation. L’ERGR est également sollicitée pour mettre à la disposition des villages des d’arbres ornementaux et en encadrant les volontaires par des conseils pratiques, pour les à mieux comprendre la thématique de l’environnement et sa protection. L’APW de Tizi Ouzou, notamment la commission concernée par le dossier de l’environnement, pourrait également rendre visite à ces bénévoles, voir ce qu’ils font, les orienter si nécessaire et leur décerner des Prix honorifique, même s’ils ne participent pas à un concours… Les jeunes du village Aït Abdelmoumène sont en train de faire de très belles choses, avec des moyens dérisoires.
C’est en encourageant cet éveil que l’on pourra avancer. Aider ceux qui prennent le taureau par les cornes est plus efficace que faire des constats et des volontariats d’un jour. La balle est donc désormais dans le camp des responsables. Il faut reconnaitre à ces jeunes leur prise de conscience et leur engagement malgré leurs moyens dérisoires, lorsque les Assisses de l’environnement, les campagnes de sensibilisation et de volontariat organisés par les pourvoir publics, qui ont nécessité de grands moyens, n’ont rien donné de palpable sur le terrain. Le peuple est bien conscient de l’enjeu écologique et les résultats du concours Aissat Rabah du village propre en sont une preuve indéniable. Reste aux autorités de faire preuve d’une véritable volonté politique.
Hocine Taib