«Il faut revenir à un mode de vie sain»

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Kamel Bouzid, éminent professeur en oncologue, président du comité national de lutte contre le cancer, explique les causes de la multiplication des cancers.

La Dépêche de Kabylie : Qu’en est-il de l’implication des pouvoirs publics dans la lutte contre le cancer ?

Pr Bouzid Kamel : Un effort considérable a été fourni par les pouvoirs publics, sous l’autorité du président de la République, pour lutter contre cette pathologie. Chose qu’on demandait depuis une vingtaine d’années et que nous avons enfin obtenue à partir de 2015. Il s’agit du plan national de lutte contre le cancer qui s’est concrétisé, ici à Tizi Ouzou, par l’ouverture partielle du CAC de Draâ Ben Khedda où sont assurées la radiothérapie et l’oncologie médicale, entre autres. Ce qui va permettre une meilleure prise en charge des cancéreux de Tizi Ouzou, mais aussi des wilayas limitrophes, Béjaïa, Bouira et Boumerdès.

Ya-t-il actuellement toujours du retard dans le dépistage et le diagnostic des cancers en Algérie ?

Il y a beaucoup de retard. Les femmes par exemple ont peur, non pas du cancer mais de la mastectomie (ablation du sein). Il faut leur expliquer qu’aujourd’hui, le cancer se traite et se guérit. Au pire, c’est une maladie chronique, elle n’est pas systématiquement mortelle. C’est une maladie qui se traite comme toutes les autres. Nous venons de lancer une campagne de dépistage à Biskra qu’on va étendre à Laghouat et Béjaia et on espère l’étendre à tout le territoire national. Une campagne où on invitera des femmes à faire des mammographies tous les deux à trois ans pour avoir des diagnostics précoces qui permettront un traitement précoce et qui ne coute pas très cher. Cela permettra aussi de guérir 95% des malades.

Le plan quinquennal du traitement du cancer 2015/2019 tire à sa fin, quelle évaluation en faites-vous ?

Ce programme nous a permis de sensibiliser et les soignants et les citoyens. Ce plan va être renouvelé en 2020. Nous n’en avons pas encore fait l’évaluation, qui va permettre d’augmenter les chances de guérison. Annuellement, nous enregistrons 50 000 nouveaux cas et il y en aura 60 000 en 2024. Tous les moyens de prévention et de dépistage seront mis à la disposition de nos concitoyens pour lutter efficacement contre le cancer.

Qu’est-ce qui va changer dans le plan de 2020 ?

On va d’abord nous appuyer sur l’évaluation du plan 2015/2019, voir les points positifs et les points négatifs et corriger. Il y a aussi de nouvelles molécules et de nouveaux traitements médicaux. Les produits ont été enregistrés, mais pour le moment ils ne sont pas encore disponibles pour des raisons budgétaires. On espère les avoir durant ce premier trimestre 2019, pour augmenter les chances de réponse et de guérison des maladies du cancer du poumon, de la peau, de la langue et du cancer du rein.

Lors de votre intervention, vous avez parlé de la nécessite de transférer le service oncologie de Belloua vers le CAC de Draâ Ben Khedda, pourquoi ?

Absolument, mais il faut transférer les malades dans des conditions acceptables. Il est hors de question d’en faire seulement un hôpital de jour. Il faut réunir donc les moyens matériels et les moyens humains. Autrement dit il faut que tout le personnel soit réaffecté au CAC et qu’il y ait un effort significatif des responsables de la santé pour que ce CAC soit un exemple pour le reste du pays.

Pour terminer, quelles sont les causes de cette maladie et quels sont surtout les conseils à donner aux citoyens pour éviter cette pathologie ?

30% des cancers sont dus au tabagisme. Il y a aussi notre mode de vie qui a changé, notamment notre nutrition qui s’est complètement occidentalisée, avec les fastfoods et autres malbouffes. Il faut revenir à une alimentation saine. L’activité physique aussi est conseillée.

Entretien réalisé par Hocine Taib

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