«Nos problèmes ont commencé avec la Loi de 2006»

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Les responsables de l’Église Protestante d’Algérie (EPA) ont animé, hier, une conférence de presse au siège de la Ligue algérienne des droits de l’homme (LADDH) à Béjaïa durant laquelle ils sont longuement revenus sur l’affaire de la fermeture des lieux de culte chrétiens. C’était une occasion aussi pour le président de l’EPA, Chalah Salah, de répondre au ministre de l’Intérieur et des collectivités locales, Salah Eddine Dahmoune, qui a justifié la fermeture de treize églises, soit cinq à Béjaïa et huit à Tizi Ouzou, par «l’absence d’une autorisation d’exercice de culte autre que musulman et la non-conformité de ces lieux de culte».

A l’aide d’une présentation PowerPoint, les responsables de l’EPA ont exposé devant les journalistes les documents officiels délivrés par l’État algérien, attestant la légalité de leur association cultuelle. «L’EPA détient un agrément délivré par le ministère de l’Intérieur en 1974 et publié dans le journal officiel en 1975. Donc, nous sommes légalement constitués, et ce depuis 1974, et nous avons procédé à toutes les démarches de mise en conformité avec tous les textes législatifs et réglementaires parus depuis. En 2011, le même ministère nous a délivré un document attestant et confirmant le renouvellement de notre bureau.

L’EPA a donc non seulement une existence légale mais aussi effective. Nous avons actuellement plus de 40 églises affiliées au niveau de douze wilayas du pays. Personne ne peut contester la légalité de l’EPA», a indiqué le Pasteur Chalah Salah. Celui-ci a souligné que tout allait bien pour la communauté protestante jusqu’à la promulgation, en 2006, d’une loi fixant les conditions et les règles d’exercice des cultes autres que musulmans. «Nos problèmes viennent de la loi de 2006, qui, au lieu de contribuer, comme annoncé officiellement, à l’organisation du culte chrétien, a toujours constitué un outil de persécution entre les mains des autorités.

Elle est comme une épée de Damoclès suspendue sur la tête des chrétiens. C’est une loi confuse qui sert à entretenir le flou et l’ambiguïté», a-t-il expliqué. Pour le président de l’EPA, «il y a une volonté manifeste de fermer nos lieux de culte, parce que l’on refuse tout simplement d’accepter que des Algériens de souche embrassent la foi chrétienne», a-t-il soutenu, tout en affirmant que pas moins de 4 000 chrétiens sont privés de lieux de culte suite à la fermeture de leur église par les autorités. «Quelle solution propose maintenant les autorités pour ces milliers de fidèles qui se retrouvent sans lieu de culte ?

La Constitution algérienne consacre pourtant non seulement la liberté de conscience, mais elle garantit aussi le droit et la liberté de pratique du culte», rappelle le Pasteur Salah. Pour sa part, Me Chiter, avocat et militant des droits de l’Homme au sein de la LADDH de Béjaïa, a rappelé que l’Algérie a ratifié en 1989 le pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui dispose que «toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion» et que «ce droit implique la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé, par le culte (…) ». Par ailleurs, Me Chiter a estimé que «la citoyenneté doit primer sur toute considération culturelle, politique (…)».

Boualem Slimani

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