Relâchement angoissant !

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Le relâchement constaté dans le comportement de certains citoyens concernant les gestes quotidiens devant limiter la propagation du Covid-19 risque de tirer le nombre de personnes atteintes vers le haut. Ni les gestes barrières ni le confinement ne sont respectés, notamment dans les centres urbains. Dimanche, au dixième jour du mois de carême, les commerces jusque là autorisés à rouvrir furent assaillis de clients dès les premières heures de la matinée. Le port de bavettes n’est pas jugé nécessaire par la majorité des clients. Les gérants de petits commerces et les caissiers et caissières des grandes surfaces, eux, se retrouvent en première ligne d’une éventuelle contamination.

Et le comportement de certains clients les agace au plus haut point : «En dépit de l’affichage à l’entrée du magasin rappelant les gestes barrières, avec au-dessus la pancarte appelant les clients à ne pas rentrer dans le magasin à plus de deux, rares sont ceux qui appliquent ces mesures», regrette Amar, gérant d’un magasin d’alimentation générale au niveau du boulevard Krim Belkacem de Tizi Ouzou. Portant sa bavette à longueur de journée et laissant macérer régulièrement ses mains dans de l’eau javellisée, Amar paraît dépité par l’insouciance de nombreux clients.

Plus bas, deux grandes superettes, qui ont adopté les consignes des mesures barrières, étaient prises d’assaut en milieu de l’après-midi. Une scène quasi-quotidienne depuis l’apparition de la pandémie en Algérie. Les clients se mettent à se bousculer pour un sachet de lait ou au moindre arrivage de semoule. Devant ces deux superettes, rares sont ceux qui prennent leur mal en patience en ces jours de carême. Les clients veulent à tout prix boucler leurs emplettes quotidiennes avant 17 h, heure du début du confinement. Mais dans la ville de Tizi Ouzou, il n’y a pas que les alimentations générales et les points de vente de zlabia qui attirent du monde. Les magasins d’habillement, jusque là ouverts, étaient aussi pris d’assaut, notamment ceux spécialisés dans le prêt-à-porter pour enfants.

(Re) fermeture des commerces, une décision qui réconforte

À Fréha, Azazga et Draâ Ben-Khedda, pour ne citer que ces trois grands centres urbains, la situation ne diffère pas trop du chef-lieu de wilaya. C’est ce que nous avons pu constater lors de nos déplacements la semaine dernière dans ces agglomérations connues pour leurs activités commerciales. Certes, plusieurs commerçants tentent tant bien que mal de faire respecter par leurs clients les gestes barrières recommandés dans la lutte contre la propagation du nouveau Coronavirus, mais leur tâche s’avère si ardue qu’ils se laissent souvent emporter par l’agacement face à l’insouciance et à la baisse de vigilance des clients.

En nocturne, ce sont les services de sécurité qui se démènent pour faire respecter le confinement, notamment près des quartiers populaires. Par endroits, les policiers, ayant rompu le jeûne vite fait à même la chaussée, sont obligés de jouer au chat et à la souris avec certains citoyens indélicats, les rappelant à l’ordre du confinement sanitaire. Ce sont surtout les jeunes qui bravent l’interdit après la rupture du jeûne en se mettant en groupes sans même respecter la distance recommandée. «On comprend que vous ayez besoin de sortir, ne serait-ce que pour digérer après la rupture de jeûne, mais de grâce, respectez les gestes barrières car cela y va de votre intérêt et de celui de vos proches», dira un officier de police à l’adresse d’un groupe de jeunes interpellés, vendredi soir, près de leur cité.

La pédagogie de l’officier sembla convaincre les jeunes qui se sont très vite dispersés, sans trop râler, et ont regagné leurs domiciles. Par ailleurs, la réouverture de plusieurs commerces autorisée au premier jour du carême qui s’est vite répercutée par une augmentation du nombre de personnes testées positifs au Covid-19, a enflammé les réseaux sociaux. En effet, depuis le début du Ramadhan, le nombre de personnes atteintes par le Covid-19 est en hausse, laissant penser sérieusement que cela est la conséquence directe de la réouverture de plusieurs commerces et l’assouplissement des heures de confinement.

Or, cette hausse des chiffres s’expliquerait aussi, selon le directeur général de l’Institut Pasteur d’Algérie (IPA), Dr Fawzi Derrar, par une hausse sensible du nombre de tests de dépistage dans les laboratoires de l’Institut à travers le pays, évoquant une moyenne de plus de 400 tests quotidiens. Néanmoins, cette déclaration ne disqualifie pas l’éventuel risque de voir les statistiques quotidiennes grimper davantage d’ici une semaine, conséquemment au relâchement observé depuis le 24 avril dernier. «C’est dans une semaine que nous allons savoir si l’assouplissement des mesures du confinement décidé par les pouvoirs publics sera maintenu ou non», dira un médecin.

Ce dernier explique : «Vu que la période d’incubation du virus est de 14 jours, c’est à partir de la fin de cette semaine que nous saurons si le relâchement observé depuis le premier jour du Ramadhan fut conséquent ou pas». Toujours est-il, l’administration semble trancher pour plus de prévention en décidant depuis hier de la fermeture à nouveau de plusieurs commerces autorisés dans un premier temps à rouvrir avec l’entame du Ramadhan.

M. A. T.

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