Une contrée à double facette

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Khemis El-Khechna, la plus grande commune de Boumerdès, fait face à une multitude de problèmes qui risquent de mettre la localité, malgré son tissu industriel, sous perfusion chronique.

D’une superficie de plus de 82 km² et d’une population de plus de 110000 habitants, Khemis El Khechna, l’ex-Foundouk, perd son charme face à une anarchie indescriptible et par l’émergence de «pôles» de bidonvilles semblables aux favelas Brésiliennes.

Le staff communal à leur tête Boudellaa Aissa, P/APC d’obédience FLN, se dit incapable de résoudre l’épineuse problématique des bidonvilles et les constructions illicites qui pullulent à travers toute la localité. «Le problème des bidonvilles nous dépasse, l’APC n’a pas les moyens pour y faire face, ni démolir ni loger les habitants. On veut que l’Etat nous aide pour épurer la commune des milliers de constructions illicites», avoue le P/APC qui nous reçoit dans son bureau.

«La commune n’a pas bénéficié de programmes de réalisation de logements sociaux et RHP en quantités suffisantes. Nous avons près de 400 logements sociaux et près de 170 autres qui ont été destinés pour reloger les habitants des chalets», affirme-t-il. La demande dépasse l’offre.

Selon le responsable de l’exécutif communal, les services de l’urbanisme enregistrent près de 12000 demandes de logements sociaux sans compter des milliers d’autres de résorption de l’habitat précaire (RHP). La commune englobe neuf sites de bidonvilles dont trois sont grands notamment à Ouled Ali, Erriacha et Kermala. Il a été recensé près de 3000 familles vivotant dans des conditions déplorables.

Sans assainissement, sans eau potable, sans routes aménagées et sans électricité, les habitants des bidonvilles sont considérés comme étant des citoyens de dernier degré. La majorité de ces sites ont été construits durant les années 70 comme ce fut le cas pour Haouche Kermala qui accueille près de 200 familles et Haouche Erriacha avec ses 250 constructions de fortunes. Seule une partie du site Bernabi a été relogée, récemment, dans des habitations en dur. En matière de logements sociaux, l’APC a bénéficié de 600 logements destinés pour reloger les cas «Rouge 5» du séisme de 2003 et 200 logements au site de Sidi Serhane.

Un autre programme de 170 logements qui est bloqué depuis 2015 en raison d’un différend judiciaire qui peine à être réglé. Idem pour les 200 logements CNEP issus d’un programme des 400, non encore lancé depuis plusieurs années en raison de l’extension de bidonville de Haouche Erriacha qui ne cesse de se proliférer. «Notre commune fait face à une pression accrue en matière de demande de logements sociaux et nous comptons sur l’aide de l’Etat pour éradiquer les bidonvilles.

D’ailleurs, nous avons adressé une missive au wali pour prendre en charge ce dossier épineux qui enlaidit le décor et qui engloutit des milliers d’hectares en terres agricoles fertiles», ajoute le maire. «Pour venir à bout du phénomène des constructions illicites, l’Etat doit intervenir en amont notamment en exigeant des citoyens un salaire ne dépassant pas les 12000 DA pour en bénéficier d’un logement», suggère Ahmed, un habitant du centre-ville. Et d’ajouter: «L’article 4 exige un salaire ne dépassant pas les 24000 DA pour un logement social. Pourquoi l’Etat n’applique pas ce genre d’exigences aux habitants des bidonvilles ? Ces dernières années, la commune de Khemis El Khechna qui n’est distante que d’une vingtaine de kilomètres de la capitale, a connu un boom en matière de construction de logements notamment AADL dont 3000 logements en cours et 700 autres non achevés. Les VRD ne sont pas encore entamés. On parle d’un nouveau programme de plus de 400 autres dont les travaux seront, selon notre source, lancés incessamment. L’adage «quand le logement va, tout va», ne tient pas la route dans cette commune qui ne cesse de se bidonvilliser.

La prise en charge des écoliers fait défaut

Au volet éducation, l’ex-Foundouk fait face au problème de surcharge des classes engendrant ainsi une pression et des conséquences désastreuses aux élèves. Ces derniers n’arrivent pas à assimiler les cours en raison de l’absence de bonnes conditions de scolarisation. La commune est dotée de 28 écoles primaires, six collèges et deux lycées à Plateau et au quartier Omar Klalach. Pour mettre un terme à la surcharge des classes, l’Etat a inscrit plusieurs opérations de réalisation de nouvelles infrastructures et des classes d’extensions dans divers quartiers et centres urbains de la commune.

Lors de sa visite dans la région, le wali a ordonné le transfert des locaux commerciaux du président, abandonnés jusque-là, à un établissement scolaire primaire pour alléger la scolarisation des élèves de l’école Abdeslam Mohamed de Plateau, la plus grande école de la région. Le projet de réalisation d’un groupement scolaire D1 à Sidi Serhane n’est pas encore lancé en raison de contraintes liées au passage d’une ligne de moyenne tension (MT) et une conduite d’eau potable.

Le P/APC dira que l’assemblée a dégagé un montant de 140 millions pour le transfert de la conduite d’eau potable. En plus des six classes d’extension à Chebacheb, l’on a prévu la réalisation de trois autres établissements et des extensions à Ouled Ali qui fait face à l’affluence des élèves en provenance des bidonvilles limitrophes. Quatre classes en préfabriqués ont été implantées à l’école Mohamed Sbagh Seghir et deux autres à Chouarbia. Onze sur les 28 écoles ne sont pas dotées de cantines scolaires, les potaches étudient le ventre creux. 18 établissements n’ont pas de chauffage, les élèves grelottent de froid car la plupart des poêles à mazout ou des bains d’huiles fonctionnent mal.

«Nous allons doter les établissements primaires de citernes GPL financées par la DAL», rassure le P/APC. Le taux de couverture de gaz de ville dans la commune est le faible dans toute la wilaya avec seulement 20 %. «Un projet de 267 km de réseau de gaz naturel est inscrit au profit de notre localité avec un montant de 85 milliards», déclare Boudellaa, le P/APC.

Ces opérations toucheront Ouled Ali et Chebacheb notamment. En matière de bus scolaires, l’APC se dote de huit bus dont deux en panne. Les pannes survenues ne sont pas réparées en raison d’absence d’un mécanicien, nous dit-on. L’APC avait signé un contrat avec un mécanicien privé pour la réparation de son parc roulant qui avoisine 53 véhicules. Une autre convention est en cours de signature avec des transporteurs privés pour parer au manque de ramassage scolaire. Sur la route de Bendenoun et de Kadi, des dizaines d’écoliers parcourent à pied le chemin vers l’école de Zdigha.

Les travaux de canalisation en cours au niveau de cette route provoquent des désagréments et risques pour les écoliers. Les élèves habitants les bidonvilles en souffrent le plus par le manque de moyens de transport scolaire. Les élèves de Haouche Kermana sont pénalisés par l’éloignement de l’école et par l’absence de route adéquate leur permettant de joindre l’école aisément notamment en période hivernale. La furie de l’oued jouxtant leur bidonville les empêche d’aller à l’école durant plusieurs jours.

En terme de développement, beaucoup de choses reste à faire quand on sait que sur les 125 opérations inscrites sur le budget communal, 66 non encore lancées, 23 sont concernées par des procédures administratives notamment le CF, et 30 en cours de réalisation. On retient que la roue de développement grippe quelque part. Idem pour les PCD où six projets sur les 15 inscrits ne sont pas lancés.

Sur les PCD 2019, 124 opérations sur les 254 inscrites ne sont pas encore lancées et onze autres à l’arrêt. Les recettes propres communales avoisinent les 76 milliards en 2018, dont 47 milliards issus de la TAP en provenance particulièrement du tissu industriel très dense de la région. L’exécutif communal fonctionne au ralenti et réduit par deux démissions de ses vices présidents.

Youcef Z.

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