«Tayoucha» est un spectacle humoristique présenté par Nesrine Belhadj d’Alger (native de Sétif) au théâtre régional Kateb-Yacine durant la soirée de dimanche dernier. Ce monologue vient clôturer le programme des soirées ramadhanesques. «Tayoucha» a été présenté devant une assistance assez nombreuse, en cette dernière production du mois sacré. C’est une rétrospective de nombreux évènements successifs, qui se déroulent sous nos yeux, ici, dans la wilaya de Tizi-Ouzou, mais dans notre pays.
Décontractée, Nesrine fait son apparition sur scène sous les applaudissements du public : «Je suis ravie de me retrouver à Tizi-Ouzou devant un public connaisseur. Je suis native de la ville de Sétif et je réside à Alger.» Et de donner un petit aperçu sur sa carrière artistique : «J’ai débuté, en 1989, à la maison de la Culture de Sétif, jusqu’en 1999. En 2000, j’ai rejoint l’Institut des arts dramatiques de Bordj El Kiffan, où j’ai suivi une formation supérieure.
Je suis sortie de la promotion de M. Ahmed Khoudi avec deux pièces : «La nuit du doute» et «Sophoclite». J’étais aussi avec Sonia ! J’ai rejoins le TNA avec une pièce «Fatma» de Bengataf (jouée en 2005 à Tizi-Ouzou). «Tayoucha» est le nom symbolique d’une femme abandonnée, SDF, qui occupe un abribus délaissé par les voyageurs. Une occasion pour elle d’avoir un «toit». Les responsables de la localité, ayant appris que l’arrêt de bus est squatté, ont voulu le récupérer, aux dépens de cette femme, qui est là depuis des années. «On l’a rempli d’affiches de vote, alors que moi je ne vote pas ! »
Tout en discutant avec une autre femme imaginaire, elle dira : «Depuis que j’étais à l’école, je n’aimais pas la «brosse».» La bonne femme est informée qu’elle sera bénéficiaire d’un logement et qu’elle doit libérer l’abribus. Elle est aux anges. Elle danse, elle gesticule, elle pousse des youyous sur scène que les spectateurs suivent par des applaudissements. Elle imagine un F4 qui n’arrive pas : «Ce sont des promesses non tenues !». L’abribus libéré, le logement n’arrive pas, la femme est mise dans une maison de vieillesse.
Cependant, elle a pu être embauchée dans un hammam, comme masseuse. «Ici, au hammam, je vois toutes les catégories de femmes et la patronne connaît beaucoup de gens (femmes et par ricochet leurs maris). Les années 1992 et 1999 sont citées : «Trop de douleurs, de pleurs, de sang versé dans ce pays !» Cela est suivi d’une crise, qui aggrave la situation de cette femme, laquelle se voit licenciée par la patronne du hammam.
Elle ne peut pas regagner l’abribus. « Nous allons le vendre !» … «Pourquoi le vendre, c’est un bien public !» Ne parvenant pas à voir le bout du tunnel, sans abri, des voix l’invitent à prendre la barque avec les haraga. «Je préfère être mangée par les poissons que par les vers !» Mais en dépit de cette situation, la SDF préfère rester dans son beau pays. «Nous devons rester dans notre pays. C’est à nous de changer le système ! La jeunesse est consciente ! Nous sommes un peuple uni ! Nous luttons pour une cause commune. Mettons la main dans la main et nous réussirons !»
La comédienne illustre cette décision, en changeant de tenue : elle porte l’emblème national sur la poitrine et regagne les rangs du hirak. «Nous avons l’espoir que les choses changeront dans notre pays que nous aimons tous ! Fekhar, mozabite, a eu un hommage, ici à Tizi-Ouzou !» (Applaudissements nourris !) Il est à souligner que le mouvement populaire, entamé le 22 février 2019, est mis en relief dans trois spectacles, à savoir : «Nek negh nettat», «Manssalkouch» et «Tayoucha». Et l’artiste d’assurer : «Je serai au Festival de Carthage avec ce monologue. En plus, j’ai deux projets à déposer, ici à Tizi-Ouzou : «Loughbat el kibar», un trio, et «Lalas ensa», un monodrame. La Commission de lecture tranchera.
M. A. T.