«Pour une instance présidentielle collégiale»

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L’avocat et militant des droits de l’Homme, Me Mustapha Bouchachi, considère que la solution pour la crise que vit le pays «ne peut être constitutionnelle mais politique», plaidant pour une «présidence collégiale».

Intervenant dans le cadre des «Débats de l’UMMTO», Me Bouchachi a plaidé pour «une transition démocratique», expliquant que «l’article 102 ne peut constituer un cadre pour la transition».

«Je regrette que le communiqué du chef de l’Etat-Major parle de solutions constitutionnelles, on ne peut pas compter sur cette Constitution pour sortir de la crise politique. La seule solution est de sortir de la Constitution.

Mais il ne s’agira pas tout à fait d’en sortir, puisque ce sera la consécration de l’article 7 : le peuple source de tout pouvoir», a-t-il précisé.

«…Jusqu’à aujourd’hui, il y a une révolution populaire, on veut aller vers une réelle démocratie», a-t-il ajouté. Pour ce qui est des mécanismes et du model de transition qui conviendrait selon lui pour cette période de transition, l’avocat des droits de l’Homme a plaidé pour «une présidence collégiale, à travers une instance présidentielle».

Ceux qui seront dans ladite instance «doivent être des gens crédibles, propres, non mouillés dans des affaires de corruption et ne doivent surtout pas être des symboles du système», souligne-t-il.

Le rôle de cette instance sera de «- établir des ordonnances qui permettront l’organisation des élections, – installer une instance indépendante pour l’organisation des élections composée d’administrateurs et de représentants de la société civile, – amender la loi électorale, – désigner un chef de gouvernement en concertation avec la classe politique et les représentants de la société civile, qui réponde aux mêmes exigences que les membres de l’instance dirigeante et qui aura à constituer un gouvernement de transition».

Pour ce qui est du facteur temps, Me Bouchachi estime que «une élection présidentielle ne pourra pas être organisée en trois, six ou même neuf mois».

«Même dans les conditions ordinaires, il faut du temps», appuie-t-il. «Ceux qui voudraient organiser cette élection dans un temps réduit veulent sauver le système. Organiser une présidentielle en un laps de temps aussi réduit produira l’élection d’un Président faible, qui ne sera pas véritablement un représentant des Algériens, il subira toutes sortes de pressions», a-t-il affirmé.

Maitre Bouchachi appelle à profiter de la transition qui est «un moyen et non une fin en soi» pour «s’organiser, créer des espaces de débats, créer des associations et des partis politiques pourquoi pas».

«Non au dialogue avec le système»

Considérant les dernières consultations du chef de l’Etat, Abdelkader Bensalah, comme «une mascarade», Me Bouchachi dit rejeter catégoriquement le dialogue avec le système, en réponse claire au général chef de l’armée qui a, dans son dernier message, critiqué ceux qui ont boycotté la rencontre : «Non au dialogue avec le système. Ceux qui ont englouti le pays ne peuvent pas être architectes de la transition», tranche-t-il.

Commentant encore le discours du général, à propos de la situation économique, il dira : «On n’a pas une économie productive pour parler de l’arrêt de l’outil de production.

L’économie sera affectée encore plus si cette mafia reste». Toujours à propos du dernier message du chef de l’Etat-Major, maître Bouchachi s’est dit «déçu» et «pessimiste».

«Le dernier communiqué est un retour en arrière, il n’est pas convaincant, il n’y a pas une réelle volonté de nous laisser édifier un Etat démocratique basé sur la séparation des pouvoirs, la volonté populaire et la loi.

On ne peut pas être avec le peuple et pour Bensalah. L’armée veut la pérennisation du système, elle veut avoir un rôle», dira-t-il.

«L’armée s’est toujours immiscée dans la politique, c’est elle qui produit les Présidents, on doit se libérer de ça», a-t-il indiqué.

«Mouloud Hamrouche dit dans sa dernière contribution que le peuple nous a tous libérés. Il a libéré l’armée, oui, des pressions extérieures, mais on veut aussi que le mouvement libère les Algériens de ce phénomène de désignation des Présidents par l’armée», insiste Me Bouchachi.

«Oui, l’armée doit avoir un rôle, celui de préserver le pays et le protéger, mais aussi celui de nous accompagner et accompagner la transition et non s’immiscer», dira-t-il encore.

«Pas le droit de s’arrêter, de se diviser, notre force est le pacifisme»

A propos des récentes poursuites judicaires et arrestations, le conférencier a estimé qu’elles sont surtout «motivées par des considérations politiques». Tout en approuvant le jugement des coupables, il a dénoncé «l’instrumentalisation de la justice».

«Non à la justice sélective et revancharde, On est pour les poursuites, mais d’abord il faut préserver l’argent du peuple, prendre des mesures contre la fuite des capitaux, mais surtout juger ceux qui sont derrière ces hommes d’affaires, ceux qui leur ont tout donné et facilité les choses», plaide Me Bouchachi pour qui «la priorité est le départ du système».

Toujours dans le même sillage, l’avocat a signifié que «le système a tout fait pour diviser les Algériens, afin de se pérenniser. Les mesures prises par les tenants du pouvoir ces derniers jours s’apparentent à des tentatives de division (…) Nous ne pouvons réussir que si nous restons unis.

On veut le départ du système. On est pour le jugement mais on ne peut pas accepter que ce soit d’une manière sélective (…) On n’a pas encore une justice indépendante (…) cela se fera dans le cadre d’un Etat démocratique».

Kamela Haddoum.

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