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Barbacha : Les habitants se sont pris en charge pour désenclaver leur localité : Ouandadja, un village exemple

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Contribuer à une amélioration durable des conditions de vie au niveau de leur localité est l’objectif des habitants du village Ouandadja, localité qui compte 1500 âmes, située à 15 kms au sud ouest du chef-lieu communal de Barbacha.

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Ouandadja, est une région agricole par excellence où les habitations sont entourées de champs labourés, de fermes d’élevage et de plantations d’arbres fruitiers bien entretenus, à l’exemple de cette petite ferme appartenant au jeune Amara qui y a planté pas moins de 300 orangers. Un véritable paradis sur terre. Cela n’est qu’un exemple de réussite, mais aussi d’amour et d’attachement à la terre de ses parents. Il faut dire que jeunes et moins jeunes de ce hameau paisible s’adonnent avec plaisir au travail de la terre, et aucun espace n’est laissé en jachère.

L’eau, l’atout du village

Ouandadja possède un atout majeur, l’eau à profusion. En effet, le village est traversé de son coté bas par l’Oued Amassine et recèle aussi des sources comme celle de Bouabdellah, située en contre bas des habitations. Et grâce à la mobilisation des villageois, les pouvoirs publics ont attribué une enveloppe pour l’exploitation de cette source. Les jeunes agriculteurs, très motivés et engagés pour faire de leur village un endroit où la vie est paisible, sont tout de même conscients des difficultés quotidiennes du fait de l’éloignement et de l’enclavement. Le village est à la limite de deux communes, Béni Mouhli (Sétif) et Feraoun, avec des axes routiers communicants mais toujours en état de pistes impraticables. Le désenclavement est une nécessité qui doit se faire dans l’immédiat, diront des villageois d’Ouandadja. Cela, d’autant plus que leur commune vit une crise politique inhabituelle et n’est plus en mesure de répondre aux préoccupations de ses habitants.

«Ne compter que sur soi», une tradition au village

C’est en tenant compte de cette amère réalité que des associations du village, comme ‘’Tanekra’’ et ‘’Tatroucht’’ se sont regroupées autour d’un objectif commun, l’amélioration des conditions de vie au village, en s’engageant à se prendre en charge dans cette région délaissée. « Notre village occupe une position géographique stratégique. Il peut s’ouvrir sur plusieurs autres régions et offrir de nouvelles voies d’accès à la commune de Barbacha qui en a besoin », estime Amar. Et d’ajouter : « Il faut que les villageois se mobilisent, puisqu’on compte peu sur les subventions de l’Etat ». Mobilisation et engagement, c’est le mot d’ordre dans cette bourgade. « Les gens, chez nous, sont toujours prêts à répondre aux appels de nos associations, surtout quand il s’agit de l’intérêt général », nous confie M’hand, qui nous rappelle l’engouement qu’a connu l’appel des associations pour l’ouverture d’une route vers Feraoun le long de l’Oued Amassine. « Nos villageois ont répondu en masse, petits et grands sont venus participer au volontariat d’ouverture de cet accès de 8 kms qui a débuté il y a déjà 10 jours », racontent fièrement nos deux interlocuteurs. Une quête d’argent a été lancée, en parallèle, et l’on se targue d’avoir réuni pas moins de 40 millions de centimes qui serviront à l’achat de quelques matériaux de construction nécessaires aux ouvrages de cette nouvelle route. Le fameux projet traversera la partie basse du village, du côté des champs agricoles, pour atteindre le lit de l’oued à 5 Kms, avant de déboucher sur le CW23 sur le territoire de la commune de Feraoun. Un projet tout de même important, qui reliera les communes de Feraoun et Barbacha et pourrait servir de raccourci vers la ville d’Amizour, donc une voie d’accès rapide sur la pénétrante. L’idée est de taille, puisque cela permettra à la localité de s’ouvrir sur ce grand projet de la wilaya, toujours en cours de réalisation, alors qu’à la base, l’on avait seulement pensé à désenclaver le village et à créer une piste agricole. Mais les ambitions ont grandi et c’est de bonne guerre, diront quelques volontaires, outils en main, et c’est tant mieux si toute cette région isolée sortira un jour de son isolement. « Ce projet est d’une grandeur dépassant notre village, puisque il favorisera le développement de toute la région, et d’ailleurs, beaucoup de volontaires des villages voisins sont avec nous à travailler pour sa concrétisation », explique Khoudir, un fellah du village.

8 kilomètres de pistes ouverts par les villageois

Quant à Kamel, enseignant de son état, il trouve que c’est grâce à l’entraide et à la solidarité qui dépasse les limites de son village, que la réalisation de ce projet a été mise en branle aussi rapidement. Durant notre visite, l’on a constaté un véritable chantier, avec des engins, des camions, mais aussi une main d’œuvre en faction sur le terrain. Ils sont venus de Khellil, Bellouta, Feraoun, Béni Mouhli, Semaoun, Ighil Larbâa, Kendira et d’autres villages, pour donner un coup de main aux volontaires de Ouandadja, soutenus également par les autorités locales de la commune. « Le chef de daïra et le SG de l’APC de Barbacha nous ont rendu visite et se sont engagés à faire de leur mieux pour nous apporter leur aide, cela nous réconforte », dira un autre habitant. En quelques jours, on a ouvert 8kms de route, vêtue dans un premier temps en tout-venant mais bien compactée, il ne reste qu’un kilomètre et demi pour atteindre le CW23, du coté de Feraoun, et quelques petits travaux au cœur du village, pour assurer un passage sans encombrement. Cependant, la chose qui mérite d’être soulevée est la compréhension des habitants des villages que traverse cet axe, qui ne manifestent pas d’opposition vis-à-vis du passage de ce projet par leurs terres. Pourtant quelques ‘’dégâts’’ ont été engendrés par les travaux, mais l’on dit ici que l’intérêt du village prime et les membres des associations ont gagné toute la confiance de leurs concitoyens. Et c’est d’ailleurs cela qui fait la particularité de ce village, la confiance partagée, l’entraide, l’altruisme, la solidarité… bref, tout ce qu’il y avait jadis comme valeurs dans nos montagnes. A titre d’exemple, un café maure se trouvant au cœur du village et appartenant à un jeune, mais, dit-on, qui est géré par tout le monde quand le propriétaire est absent. On considère que ce café lieu de retrouvailles appartient à tous les villageois qui se soucient de bien l’entretenir. Cela ne fait que rendre espoir à nos villages que l’on croit gangrenés par des fléaux sociaux et l’insécurité. L’exemple de Ouandadja, prenant en charge leur développement, est à encourager et à suivre, au lieu de procéder à des actions et des mouvements de contestations qui se retournent contre leurs initiateurs. Les habitants de ce hameau, pour rappel, avaient eux aussi réagi par la manière forte, dans le passé en fermant le siège de leur APC à maintes reprises pour dénoncer l’enclavement et le sous développement. Mais, aujourd’hui, ils n’attendent pas les aides de l’Etat, qui viennent au compte goutte, surtout quand ils réalisent qu’il y a possibilité et faisabilité de la chose recherchée. L’auto gestion est d’ailleurs la devise de ces villageois qui, en l’espace de quelques années, ont pu doter leur localité de plusieurs commodités. L’on parle ici, de la route principale du village, du réseau d’AEP, de celui de  l’électricité… œuvres de ces habitants qui espèrent des jours meilleurs. L’espoir est rendu possible du fait que l’handicap des villages kabyles, les oppositions des propriétaires terriens, sont ici bannis. Cette route ouverte de l’autre côté du village, assurera un raccourci vers Béjaïa et aidera le développement de l’agriculture et d’autres créneaux puisque, désormais, Ouandadja sera le passage obligé de dizaines de passagers qui choisiraient cette route qui leur permettra de contempler des paysages splendides, notamment de Oued Amassine, et surtout de profiter de l’hospitalité de ces montagnards. Et même les agriculteurs promettent d’inonder les marchés en légumes et fruits, comme au bon vieux temps. A Ouandadja, le volontariat est plus qu’un engagement, c’est une conviction.

Nadir Touati

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