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Tizi-Ouzou : Virée nocturne au chef-lieu de la wilaya : Ambiance dans l’anarchie

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Nous disions dans notre édition d’hier que les villages en Kabylie manquaient terriblement de moyens pour se permettre des soirées ramadhanesques animées.

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Cette situation a influé sensiblement sur l’ambiance régnant en ville, au chef-lieu de wilaya, notamment. En effet, les villageois, en quête d’une soirée en couleurs, affluent à Tizi, où, dit-on, l’ambiance bat son plein chaque soir. Chose vérifiée, avant-hier. 22h, la ville des genêts était noire de monde. Une anarchie indescriptible s’en mêlait. L’encombrement automobile mais aussi piétonnier était partout, dans le moindre recoin de la ville. Une ville qui s’est avérée, autant le dire, trop exiguë pour contenir cette foule qui l’a prise d’assaut dès la rupture du jeune. Une foule qui afflue de partout, des quatre coins de la wilaya. Au niveau du barrage fixe de la police du lieu dit les Chabane, à l’entrée Est de la ville, un encombrement immense s’est formé. Il a fallu à notre transporteur (Ahmed, appelons-le comme ça) faire le détour via l’ancienne route qui passe par la brigade de la protection civile, pour éviter ce bouchon qui en dit long, pour Ahmed, sur l’ambiance qui régnera à Tizi. Il a vu juste. Tizi-Ouzou était bien fermée. La circulation automobile était quasiment bloquée au niveau  de l’hôpital. Encore une fois, Ahmed usa d’un stratagème. Nous avons  omis de le signaler, mais notre transporteur travaille en tant que chauffeur de taxi avec un fourgon de 7 place reliant le centre-ville à la nouvelle-ville. De ce fait, il connaît les déviations et les différentes «entrées et sorties» de Tizi. Pour s’extirper de l’encombrement du centre-ville, il emprunta cette déviation par M’douha. Là la circulation était fluide, avant que ça ne se bloque à hauteur de la Maison de la culture, du côté du jardin Mohand Oulhadj. C’est là d’ailleurs que nous prenons congé d’Ahmed, tout en lui souhaitant «bon courage». «Bon courage à vous aussi», nous lancera-t-il. Il savait ce qui nous attendait…à l’entrée de la salle de spectacle de la maison de la culture Mouloud Mammeri, on se marchait sur les pieds pour y accéder. C’était en fait prévisible. C’est Lounis Aït Menguellet qui était au programme pour cette soirée. « C’est toujours comme ça ici, on se bouscule chaque soir pour assister aux concerts des différents chanteurs qui s’y succèdent. Quoi qu’il en soit, Lounis Aït Menguellet a fait un tabac en réussissant sa sortie, apprend-on, plus tard de Sabrina, une fervente fan de Lounis qui a assisté au gala. «Deux jeunes ont tenté de le perturber, mais ils ont été vite maîtrisés», raconte-t-elle. 

Circulation,mission impossible

22h30, environ, la mythique grande rue, ou ce qu’il en reste, grouillait de monde. Les agents postés çà et là pour réguler la circulation avaient tout le mal du monde pour gérer la situation. Une situation qui était en fait tout simplement ingérable. Ca fusait de partout. La chaussée, il a fallu aux automobilistes la partager avec les piétons, tant les trottoirs en éjectaient. Il fallait jouer des coudes et user d’une véritable gymnastique pour passer à travers la foule compacte qui s’y est formée. Une foule composée de familles, d’hommes et de femmes, de jeunes et moins jeunes, d’enfants…on aurait dit que tout Tizi était dehors. A tout ce beau monde se mêlaient, les Subsahariens et les syriens et autres mendiants ‘’locaux’’, éparpillés çà et là le long de la grande rue que nous n’avons pu traverser qu’au bout d’un certain temps et après quelques coups de coude. Mais c’était encore loin d’être le bout du tunnel. Au niveau du rond point, à proximité du musée de la vile, l’ambiance mêlée à l’anarchie a atteint son paroxysme. Les premiers à en payer le prix étaient, bien entendu, ceux qui s’y sont aventurés avec leurs véhicules. Si c’était dans la journée, on aurait eu droit à des bagarres à profusion. Mais en cette soirée, les automobilistes se sont montrés patients. Ils vous laissaient même passer. La musique fusait de toutes les voitures pratiquement. Tizi respirait  la joie, en somme. Du chant et de la musique partout. Nous fûmes d’ailleurs attirés par des décibels qui s’accentuaient provenant du musée. Sur place, un DJ enflammait la foule. Mais en parallèle, ça bloquait la circulation. Mais qui s’en souciait ? On dansait, on chantait et on s’amusait, c’était le plus important. On se serait cru à Oran ou dans une autre wilaya de l’Ouest. En tous les cas point en Kabylie, encore moins dans la capitale du Djurdjura, tant le DJ ne faisait passer que des chansons Rai. Ca faisait danser en tous cas. Et c’était peut-être l’essentiel. Il fallait quitter les lieux, pour sonder l’atmosphère ailleurs. Prochaine destination, l’ancienne gare routière où un espace spécial familles a ouvert ses portes dernièrement. Un endroit ou Tizi s’affole, nous a-t-on dit. Pour y parvenir, il a fallu encore jouer des coudes.

ça chante partout !

Sur tout le trajet, la foule était tout aussi compacte. Nous avions bien besoin du «bon courage» souhaité par Ahmed, plus d’une heure auparavant. Il était 23h passées. La soirée commençait tout juste, tant la ville ne cessait de se remplir. Nous arrivâmes enfin à la fameuse ex-gare routière. Le moins que l’on puisse dire déjà c’est que celle-ci est devenue méconnaissable. Elle s’est métamorphosée. Mais pour visiter et apprécier, il faudrait peut-être revenir un autre jour, car là il fallait pouvoir se frayer un chemin pour y accéder. Nous avons quand même pu découvrir des chaises, des allées, un jet d’eau, du gazon ou ce qui y ressemble. Sa couleur était jaunâtre. Il est clair que celui-ci n’a pas été entretenu. En fait, même si on le faisait, il ne résisterait certainement pas à tous ces pieds qui le piétinent chaque soir. De la boue s’est également formée dans certains endroits, à cause de ce même piétinement nocturne et quotidien. En tous cas, les gens ne faisaient pas du tout attention à cette boue. L’essentiel était de se rapprocher de la scène où un  gala était animé par l’une des stars de la chanson kabyle, version non stop, Samir Sadaoui. C’était en plein air, mais en plein bousculade. C’était d’ailleurs impossible d’avancer plus. L’atmosphère était presque irrespirable. Nous rebroussâmes chemin. Attirés par «La grande bougie» inaugurée l’année dernière, nous avons été y faire un tour. L’endroit était bien plus calme. On pouvait quand même distinguer les enfants jouer. Les couples discutaient. Les groupes d’amis rigolaient… «C’est là que des personnes sont venues déjeuner en plein jour, et que d’autres sont venues faire la prière du Maghreb, il y a quelques jours», disait un jeune à son ami. C’est clair, on était à la place des oliviers.  Une place qui a perdu la vedette aux autres places réceptionnées en ville, à l’image de cette espace familial qui n’a de tel que le nom. C’est valable, au moins pour ce mois de Ramadhan. Peut-être finira t-il par retrouver sa vocation ?Qu’à cela ne tienne, ces places ont contribué à cette a ambiance indescriptible. Une ambiance qui ne baissera pas d’intensité à minuit passé. «Nous nous retrouvrons au niveau de la Maison de l’artisanat. Je ne peux pas descendre, car la circulation est encore bloquée», nous disait Ahmed le transporteur, quand nous l’appelâmes pour rentrer. Il était 1h du matin. Nous étions dans le jardin Mohand Oulhadj, un autre endroit qu’on disait bien animé en ce mois de carême. Et bien, ce n’était pas faux. Même à cette heure de la  soirée, il grouillait encore de monde. Mais, nous ne pouvions pas rester. Les bips d’Ahmed s’intensifiaient. Il fallait le rejoindre. 1h 30, nous prenons le chemin du retour. Au village, Mustapha, le gérant du café rongeait les tables pour la fermeture, après une soirée de dominos, de cartes et de loto, comme d’habitude. Rendez-vous le lendemain. Ahmed jurait, lui, qu’il ne remettrait plus les pieds à Tizi-Ouzou, pour le reste des soirées de ce Ramadhan. Il est vrai que l’atmosphère y a été quelque peu décevante.

M.O.B 

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