Entre l’art et la réalité

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Ath Yenni, qui n’a pas entendu parler de cette belle région de Kabylie ? Cette région qui a beaucoup donné au pays et à la wilaya de Tizi-Ouzou, des hommes de savoir, de culture et d’art.

La commune d’Ath Yenni regroupe plus de 7 000 habitants répartis sur huit villages, à savoir Ath Larba, Ath Lahcen, Taourirt Mimoun, Agouni Ahmed, Tigzirt, Taourit, Khalf et Tansawt-est, situés à 35 km du chef-lieu de la wilaya de Tizi-Ouzou et culminent à 900 m d’altitude. Des villages perchés sur des collines, célèbres pour leur savoir-faire artisanal particulièrement le bijou berbère en argent, une passion, un amour et un savoir plus qu’un métier. Cet artisanat est malheureusement en déclin puisque dans les années 1990, on a dénombré 450 artisans bijoutiers et à présent il n’en reste environ que 250. Une association de bijoutiers a été créée pour redorer le blason de ce savoir-faire, et surtout pour assurer sa promotion, sa modernisation et sa commercialisation. Ath Yenni, grâce à l’apport des recherches de l’illustre Mouloud Mammeri et les chants d’Idir et de Brahim Izri, est entrée dans l’histoire par la grande porte. Les noms des différents bijoux comme ameclux, amecbuk, ameqqyas, axelxal, taziba, tazlagt, tigeḍmatin, azrar, tixutam, taḥzamt sont et resteront le cachet des Ath Yenni et seront toujours collés à l’image de cette belle région de Kabylie. Toutefois, cette ancienne commune ne diffère pas des autres communes de la wilaya de Tizi-Ouzou en termes de développement local. Beaucoup reste à faire.

Trois villages non encore raccordés au gaz naturel

À Ath Yenni, le minimum existe. Le réseau de l’assainissement est généralisé, celui de l’eau potable aussi. «Le réseau de l’assainissement existe mais nous ne comptons aucun bassin de décantation et aucune station d’épuration. L’eau aussi est raccordée, mais en été, le rationnement est de mise», fait-on savoir. À signaler que le réseau de l’AEP est vétuste et fuit de partout. «Les fuites d’eau foisonnent. L’ADE n’arrive pas à colmater toutes les brèches car elle dit ne pas disposer de moyens humain et matériel», regrettera un responsable local. Le réseau de l’électricité lui aussi est généralisé, mais un projet d’extension attend d’être mis en service», a indiqué une source locale. Pour ce qui est du gaz naturel, le réseau n’est pas généralisé étant donné que trois des villages que compte la commune ne sont toujours pas raccordés à cette énergie. Pourtant, dans cette région culminant à 900 mètres d’altitude, les hivers sont rigoureux et la neige s’invite à la moindre chute des températures. «Les villages de Taourirt, Tigzirt, et Tansaout attendent toujours ce combustible», regrettera un villageois. Nous avons appris que les travaux ont été lancés à travers les trois villages mais les entreprises de réalisation ont suspendu les travaux pour non payement. Les déclarations du ministre de l’Energie, lors de sa visite à Tizi-Ouzou, ayant affirmé que «toutes les entreprises de gaz seront régularisées», semble ne pas être encore appliquées.

La culture et le sport, les parents pauvres

À Ath Yenni, les secteurs de la culture, du sport et de la jeunesse ne sont pas reluisant. Les infrastructures en font défaut. La commune dispose d’une maison de jeunes non opérationnelle. Dans chaque village, on compte un foyer de jeunes réalisé par l’APC mais géré par les comités de villages. Le bénévolat n’étant pas le meilleur moyen pour booster l’activité culturelle. Dans le domaine du sport, la commune vient juste de lancer sa réalisation dans le cadre du Programme communal du développement local. Le taux d’avancement n’est que de 30 % à en croire une source avisée, précisant que «l’APC a pris en charge la réalisation du stade en tuf et la DJS s’est engagée à le gazonner, à réaliser l’éclairage et la clôture». Un projet d’une salle de sport a été accordé à l’APC lors de la visite de l’ex Premier ministre Abdelmalik Sellal. Les travaux ont été lancés, mais à présent l’entreprise à plier bagages et a arrêté les travaux, toujours pour non payement de ses créances, dit-on. «Cette salle de sport a été inscrite au profit de notre commune, mais elle a été touchée par le gel. Lors de sa visite dans notre région, Abdelmalik Sellal avait décidé de son dégel. Aujourd’hui, les travaux sont à l’arrêt. L’entreprise en charge de sa construction n’a pas été payé et a décidé de suspendre les travaux jusqu’à la régularisation de ses créances. Les autorités concernées sont appelées à intervenir pour la relance du chantier», appellera un élu local. À Signaler qu’Ath Yenni dispose d’un club de foot en petites catégories et un autre club de judo qui compte 120 athlètes. Aussi, la commune dispose de petites aires de jeux réparties à travers les villages, mais elles ne servent que d’espace d’entrainement aux amateurs du sport roi et au férus de l’athlétisme.

La santé fait mauvaise mine

L’environnement est, à en croire des sources locales, assez pris en charge par l’APC qui assure une collecte des ordures ménagères régulièrement et dispose d’une décharge communale au lieu dit Timizar. Concernant la santé, ce n’est pas le top. Bien que la commune dispose de trois centres de soins et d’une polyclinique, «les salles de soins ne fournissent que des soins élémentaires. La polyclinique fonctionne en H 24, mais elle fait face au problème de manque de moyen et de personnel. Le service de la radiologie ne fonctionne qu’en diurne ne disposant que d’un seul manipulateur. Nous appelons les autorités à équiper nos salles de soins et notre polyclinique et penser à nous inscrire un EPH», clamera un habitant du chef-lieu. Concernant le réseau routier, sur place, le constat est encourageant puisque les axes principaux sont carrossables mais les axes secondaires sont en piteux état. «Les axes secondaires et les chemins vicinaux sont dans un état lamentable. Les travaux de gaz les ont endommagés et la remise en l’état n’est toujours pas effectuée. Il est temps de les revêtir ou de les bétonner», appelleront les citoyens.

50 logements sociaux en attente de lancement et le projet d’une unité de pompier gelé

Le secteur du logement n’est pas florissant puisque la commune bute sur le manque de foncier de l’Etat. Il est difficile de trouver une assiette domaniale nue. D’ailleurs, un quota d’une cinquantaine de logements sociaux a été inscrit à l’indicatif de la municipalité mais la première assiette proposée n’a pas eu l’aval du CTC car n’étant pas constructible. «Nous venons de proposer une autre assiette, à savoir si elle aura la quitus du CTC», informera un élu. Concernant l’habitat rural, la commune n’a enregistré qu’une trentaine de dossiers en instance et n’a eu qu’un quota de 12 unités durant l’année écoulée. La commune essaie de venir en aide aux familles démunies et assure la distribution du couffin de ramadan, des trousseaux scolaires au bénéfice de tous les écoliers du primaire et assure le ramassage scolaire aux écoliers des villages éloignés du chef-lieu communal. Rappelons que la commune dispose de 5 écoles primaires, un collège et un lycée. La municipalité accuse un manque criant en termes de subdivision et de banque puisqu’aucune n’a encore ouvert ses portes dans cette région. Le projet portant réalisation d’une unité de la protection civile est gelé. L’annexe de la maison de la culture est en attente d’une assiette d’accueil, c’est dire que les Ath Yenni attendent leur part de développement comme toutes les régions de la wilaya de Tizi-Ouzou. Les «At Tmura» nom collé aux paysans n’Ath Yenni, les bijoutiers et les artistes comptent toujours sur leurs propres moyens (le travail de la terre, le travail artisanal et artistique) pour faire face aux besoins de la vie quotidienne.

Hocine Taib

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