L’histoire d’une communauté qui avance

Partager

Situé à 25 km au sud de la wilaya de Tizi-Ouzou, le village Tighilt Mahmoud, dans la commune de Souk El-Tenine, est semblable à tous les villages de la Kabylie. Seulement par ici, les villageois ont, surtout, appris à compter sur soi.

D’ailleurs, grâce aux efforts consentis par les habitants, ce village de 4 000 âmes a pu décrocher le 8e prix au concours Aïssat Rabah du village le plus propre pour l’édition précédente, un prix hautement mérité. En effet, des projets ont été réalisés et des opérations de nettoiement et d’embellissement ont été effectuées, donnant ainsi exemple à tous les autres villages. Lors d’une virée à travers Tighilt Mahmoud, le constat était encourageant. La propreté est partout et d’autres projets sont en cours de réalisation. Les habitants, sous l’égide de leur comité, sont déterminés à arracher le premier prix du concours Aissat Rabah du village le plus propre, une mission difficile mais pas impossible lorsque l’on cannait la volonté des villageois.

La naissance de l’idée de participer au concours Aïssat Rabah

«Dans notre village, le comité des sages existe depuis la nuit des temps, seulement cette fois-ci, il y a une nouveauté. Car nous sommes un comité où tout le monde est président et tout le monde est membre. Toutes les décisions se prennent collégialement. Aucun d’entre nous ne peut prendre une décision sans avoir consulté au préalable le comité qui se réunit périodiquement. Notre comité se compose de six commissions, à savoir la commission des conflits et sociale, la commission organique, la commission chargée des associations, la commission chargée des travaux et d’aménagement et aussi celle des finances. Au total, notre comité se compose de 36 membres», fera savoir Tébani Djamal, un représentant du comité de village. Concernant la participation au concours Aissat Rabah, notre interlocuteur révèlera : «De jeunes artistes ont commencé à peindre les murs de Tahchat et comme le résultat était impeccable, alors on s’est dits pourquoi ne pas travailler davantage pour, peut-être, participer au concours. Une réunion a eu lieu, donc, en mars 2017 et la décision de participer a été tranchée, mais le facteur temps nous a quelque peu inquiété. Car, il était difficile de finir tout le travail et réussir en six mois. Mais nous ne sommes pas découragés. C’était un défi à relever. L’apport de tous a été déterminant. Une assemblée générale a été tenue et en quelques minutes, nous avons collecté des dons de l’ordre de 22,5 millions de centimes. D’autres quêtes ont été également organisées et la participation de nos émigrés nous a vraiment boostés. Nous avons pu ramasser plus de 454 millions de centimes, nous avons prélevé 128 millions pour différents travaux.» Plusieurs opérations réalisées Plusieurs opérations de nettoiement et d’embellissement ont été effectuées et de nombreux projets ont été réalisés au village de Tighilt Mahmoud. Dix (10) opérations d’assainissement pour évacuer les eaux usées ont été réalisées. La pose de pavés et l’aménagement des trottoirs, la réfection des sanitaires de l’école primaire, le drainage des eaux pluviales et l’aménagement des chemins vicinaux, leur bétonnage et la construction de mur de soutènement ont été, aussi, l’œuvre des villageois. Pour sa part, l’APC a contribué par la réalisation des bordures et le revêtement de l’axe principal dans le cadre des PCD et du FCCL, en plus de la case qui a été mise au service des villageois pour l’élargissement des chemins. Trois cascades, la réfection et la décoration du château d’eau et du cimetière ont été également réalisées. Des sanitaires publics ont été construits et des bacs à ordures ont été disposés dans différents coins du village, en plus d’une arcade à l’entrée du village et un abribus finalisé, deux autres en cours de réalisation. Les habitants n’ont pas oublié de construire une maison traditionnelle pour les vieilles femmes du village, un espace de rencontre et de détente pour la gent féminine. Un quartier pilote pour le compostage des déchets organiques a été également lancé. Les écoliers, faut-il le souligner, ont été bénéficiaires de cours de sensibilisation pour la protection de l’environnement, via un club vert. Un jardin a été réalisé à l’école primaire du village pour initier les chérubins à la préservation de la nature. Le village a été partagé en six sites et chaque site est pris en charge par une équipe de volontaires. Les besoins de chaque équipe ont été pris en charge par un démarcheur qui avait la tâche de fournir la marchandise et les besoins exprimés. Des volontariats étaient régulièrement prévus et concernaient tous les villageois. «Nous n’allons pas nous arrêter ici, car nous comptons remporter le premier prix du concours Aissat Rabah lors de la prochaine édition. Le travail se poursuivra pour faire de notre hameau un village touristique et souhaitons un jour accueillir le Festival Raconte-art ici à Tighilt Mahmoud», indiqua Berhal Rabah, un autre membre du comité.

Des manques à combler

Au village Tighilt Mahmoud comme partout ailleurs, il subsiste encore des manques à réaliser. Les villageois veulent l’ouverture de plus d’accès et de pistes agricoles. L’extension de l’éclairage public et du réseau de l’assainissement sont également souhaitables. L’aménagement de la fontaine de Tala Ouglidh pour en faire une véritable fontaine touristique. Les habitants veulent aussi bénéficier de la fibre optique. À signaler que le point noir dans ce village est sûrement l’indisponibilité d’une unité de soins. À ce sujet, Ahcène Haroun, un autre membre du comité, déplore : «Notre unité de soins a été fermée depuis des années. Elle est dans un état de vétusté criant d’où sa fermeture par les services de la Santé. Nous demandons aux responsables concernés de procéder à sa réhabilitation et à l’affectation du personnel nécessaire pour son bon fonctionnement. Deux infirmiers, un médecin et un fauteuil dentaire ne ruineront pas les caisses du secteur de la Santé.» Par ici, le réseau du gaz naturel est une satisfaction totale, puisque le village est raccordé à 100%. Le même constat est aussi enregistré pour le secteur de l’eau potable puisque l’alimentation se fait en H24 : «Notre village est raccordé à 100% au réseau du gaz naturel. Il ne reste que quelques foyers, et ces derniers ont déjà payé les compteurs et ils attendent juste leur pose. La distribution de l’eau se fait en H24», notera avec satisfaction Miloudi Ali, lui aussi membre du comité de village. À noter que le secteur de la jeunesse est, lui également, actif mais il a besoin de structures de jeunes pour rentabiliser les efforts des associations culturelles, sportives et environnementales. Signalons que le village dispose d’un siège de l’association Tighilt Negh avec une bibliothèque riche de 2 000 livres. Les membres de l’association dispensent des cours de soutien aux élèves des classes d’examens. Une convention a été signée avec le CFPA de Maâtkas pour assurer des formations en informatique et en décoration florale au bénéfice des femmes du village. Un café littéraire a été récemment installé et ne tardera pas à entrer en fonction. À l’étage du même siège, l’association sportive compte 72 athlètes dans deux disciplines, à savoir le vo-vietnam et la boxe. Le hameau ne dispose, hélas, d’aucune aire de jeux et encore moins d’un stade ou d’une salle polyvalente. À signaler que l’association culturelle dispose de 8 PC, d’un data-show et d’un téléviseur plasma. L’association culturelle Tighilt Negh de France contribue par des dons et des travaux de recherche sur le cancer qui fait des ravages dans la région, comme elle réfléchit à créer une banque agricole qui aura à charge de collecter le plus de productions pour les distribuer au démunis de la bourgade. L’achat d’un tracteur et d’une ambulance fait son bonhomme de chemin pour donner plus de chance au village de remporter le premier prix du concours Aissat Rabah.

Timechret, une tradition qui remonte à 1944

Tighilt Mahmoud est également connue pour être une localité qui tient aux traditions ancestrales. La tradition que les villageois ne ratent jamais de tenir c’est incontestablement Timechret, qui est organisée pendant l’Aïd El Fitr de chaque année. À ce sujet, Karim Chebili, un membre du comité de village, dira : «Chez nous, Timechret ne se discute pas. C’est automatique ! À la mi-Ramadhan, une assemblée générale se tient et des dons sont collectés. La contribution des émigrés reste importante. Cette année, nous avons ramassé 200 millions de centimes que nous avons réservés à l’achat de sept bœufs qui ont été immolés à l’occasion et partagés équitablement sur l’ensemble des familles. C’est une tradition que nous continuons de préserver depuis 1944. Elle ne s’est arrêtée que pendant la révolution de novembre et depuis l’indépendance, nous n’avons raté aucun rendez-vous». Pour terminer, les membres du comité remercient tous ceux qui ont contribué, de près ou de loin, à la réussite de leur village : «Nous demandons à tous de mettre la main dans la main pour avancer et aller vers des horizons meilleurs», diront-ils tous d’une même voix. Dans tous les cas de figures, il convient de reconnaître que le village de Tighilt Mahmoud a beaucoup gagné en propreté et se développe petit à petit au grand bonheur de ses habitants. Bonne chance et bon vent pour l’avenir.

Reportage de Hocine Taib

Partager