A quand une solution efficace et définitive ?

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n Par Samia A. B.

Les résultats ne devraient pas être réjouissants. Cela devrait faire réfléchir plus d’un, entre la population et les pouvoirs publics. La concentration du parc dans les principales artères de la ville, alors que les éternels chantiers de routes et bretelles capables de libérer la ville ne veulent pas aboutir, pollue, à son tour, le visuel. La question des émissions de gaz industriels ne se pose pas, quant à elle. Dieu merci, les industriels et autres investisseurs dans le domaine ne se bousculent pas aux portillons ! Et ce ne sont pas les quelques unités des opérateurs locaux qui détruiraient la couche d’Ozone.

Comme quoi, le mal n’est pas toujours là où le croit ! Si à Copenhague, il est question de sortir avec une nouvelle définition de politique communes, entre les pays participants, pour lutter contre le changement climatique et limiter les menaces qui pèsent sur notre mère terre, dans notre région, nous avons du mal à trouver une solution pour éliminer les déchets ménagers. Si la peste décide de revenir, après son petit tour dans l’Oranie durant l’Eté 2003, c’est Tizi-Ouzou qui sera le prochain hôte de cette épidémie. Onze cas ont été, honteusement, confirmés à l’époque. Un enfant de 11 ans en est décédé, rappelons-le.

On n’osait pas trop parler de la peste au départ, signe de nos jours, de mauvaise gestion en matière de santé. Vu le nombre de foyers à infection qui pullulent ça et là dans la ville des Genêts, laissée à l’abandon, depuis quelques années déjà, il n’est pas à écarter une crise sanitaire qui s’avérera certainement invincible vu l’importance des dégâts. Les amoncellements de déchets ménagers, ajoutés à ceux du commerce parallèle qui s’exerce au vu et au su des autorités, sans que celle-ci ne lève le petit pouce, ont fini par ôter toute attraction visuelle à cette ville réputée jadis pour sa propreté et son éclat. « Je me souviens de ce qu’était Tizi-Ouzou. Quelques quartiers, même s’ils se comptent sur les doigts de la main, essaient de garder cette image, à force d’efforts personnels bien entendu.

Il faisait bon vivre dans le temps et on respirait bien mieux. Il y avait moins de véhicules, les rues et trottoirs semblaient bien plus spacieux qu’ils ne le sont maintenant et on ne pouvait pas trouver le moindre petit centimètre carré de papier ou de déchet par terre. Je ne sais pas si c’est juste une impression ou que ce sont mes yeux d’enfant de l’époque qui me reflétait cette belle image, mais ce qui est sûr, c’est qu’en matière de propreté, les choses étaient tout autre.

Aujourd’hui, en bas de chez moi, un des quartiers principaux du centre-ville, les bacs sensés être vidés quotidiennement ne le sont que quand ils débordent de déchets et que les odeurs nauséabondes atteignent les narines des habitant aux étages les plus élevés. Je ne vous raconte pas l’enfer que nous vivons en été. Les cafards et autres rats envahissent nos immeubles. Il nous est très difficile de nous frayer un chemin dans tous ces déchets, ne serait-ce pour sortir des immeubles. Mais petite fille ne sort jamais sans escorte !

C’est bien drôle mais allez convaincre une petite gamine de 8 ans que l’image avec laquelle, elle a grandi est erronée et ne devrait pas exister. Allez inculquer des valeurs à vos enfants quand la réalité va à l’encontre de tout ce que vous leur apprenez. Je n’en veux d’ailleurs pas à la petite, quand elle jette l’emballage de ses friandises en pleine rue. Elle prend au moins le soin de le faire dans un tas d’ordures.

Comme ce n’est pas cela qui manque à Tizi-Ouzou, et bien elle n’a que l’embarras du choix dans cette poubelle géante ! », nous raconte Dda Ravah, un septuagénaire natif de la ville des Genêts. Il ricane d’ailleurs dès qu’il entend parler de Genêts ; « Les genêts étouffent dans cette ville. D’ailleurs où sont les Genêts ?! » Si les habitants de la ville sont unanimes sur la question, il reste qu’ils sont en partie responsables de la situation d’insalubrité qui caractérise la ville. Il faut dire que les tiziousiens ne brillent pas par leur civisme. On trouve des fois des bacs vides et à côté des dizaines de sacs poubelles souvent soigneusement perforés par les chats et chiens errants qui trouvent, quant à eux, bien leur compte. Nous sommes généreux et voulons certainement faire profiter les animaux sauvages des restes de nos assiettes. Brigitte Bardot devrait changer d’avis sur les algériens et oublier un peu ses reproches quant aux sacrifices de l’Aïd.

On se rattrape bien on parallèle ! il est, donc, bien facile de critiquer les pouvoirs publics, qui ne sont pas aussi nickel que ça, mais avant de passer à ce stade il faudrait que tout un chacun se remette en cause et fasse le nécessaire, à son niveau d’abord, pour essayer de changer les choses. D’ailleurs, il est bien difficile d’être civilisé quelque fois. On est mal vu et notre comportement est souvent tourné en dérision. Dans une société où les valeurs et normes ne sont plus ce qu’elles sont et que les repères deviennent de plus en plus flous, ça ne devrait pas étonner.

Lynda, 34 ans en a bien pris conscience, depuis qu’elle s’est installée à Tizi-Ouzou. Il déjà bien difficile pour une campagnarde de vivre en ville, ses prédécesseurs à la « civilisation » trouvant toujours quelque chose à dire sur les moindres de ses agissements, pour une « Blidéenne » même d’origine kabyle avec une maitrise de langue irréprochable, on imagine bien, ce que cela devrait engendrer comme commentaires et préjugés.

« A la cité où je vis, les gens ne prennent même pas la peine de sortir leurs poubelles. C’est à travers les balcons que mes voisins s’acquittent de cette tâche, d’ailleurs peu contraignante à mes yeux. Les bacs restent propres et vides, quand ils ne sont pas volés ou détournés de leur utilisation initiale. Une fois la nuit tombée, donc, les poubelles fusent de toutes parts. Il nous est d’ailleurs impossible de nous mettre au balcon à partir de cette heure ci.

Certains n’attendent pas ce rendez-vous pour le faire. Mon mari l’appelle « le couvre feu » pour l’anecdote!. Ils le font même en plein jour au vu et au su de tous. Après une belle lancée de poubelle qui peut même te frôler le front, la voisine peut te dire bonjour sans aucune gêne ni honte ! Cela m’a sidérée au départ et cela continue à me dégouter d’ailleurs. Sinon, je ne serai pas normale. Mais j’avoue que j’ai fini par m’habituer à la situation, sans pour autant la cautionner. Le comble dans toute cette histoire, sont toutes les remarques que je reçois et toutes les mesquineries basses de mes voisines quand elles me voient sortir les poubelles au petit matin. Car, le camion de collecte d’ordures ne passe que le matin. Quand il décide passer bien entendu. Il nous arrive de rester des jours entiers sans le passage du camion de collecte.

Les odeurs sont insoutenables des fois », nous confie Lynda, qui nous raconte que ses voisines la trouvent aussi bizarre quand elle ramasse ses détritus au niveau du balcon après un balayage de la maison, alors que ses voisines continuent à balayer jusque dans les airs ! Elles font aussi des grimaces derrière son dos quand elle nettoie le balcon avec une serpillère au lieu de le faire avec des jets d’eau comme la plupart de son voisinage. Lynda est bien heureuse que son voisinage ne ressemble pas entièrement au cliché qu’elle vient de nous faire de certaines personnes de son entourage. Heureusement qu’il existe des gens consciencieux et tenaces aux valeurs de civisme, ne serait-ce que les plus minimes, selon notre interlocutrice.

On ne terminera pas le sujet du civisme, sans évoquer les différents tas de détritus liés aux nombreux travaux des ménages et particuliers qui ne trouvent que la rue comme hôte, des fois pour des mois entiers avant que les services de collecte ne se décident à les « ingérer ». Où doivent échoir ce genre de détritus ? Existe-t-il un endroit pour se débarrasser des restes d’un mur démoli au lieu qu’il envahisse les bacs à ordure des quartiers ? Souvent les services de collecte d’ordures arguent que ce genre de déchets ne soit pas de leur ressort. C’est du ressort de qui alors ? La question se pose pour éclairer les citoyens et les guider à éviter d’empirer la situation de détérioration dans laquelle se trouve leur ville.

Comme Lynda, donc, ils sont nombreux à accuser le manque de civisme de la population et lui endosser la dégradation de l’image de leurs cités. Mais ils sont également nombreux à ne pas écarter la responsabilité des collectivités locales dans le chaos qui a touché la plupart des quartiers de la ville de Tizi-Ouzou. Il est clair que les collectivités locales doivent également se remettre en cause quant à la bonne gestion des tâches qui leur incombent en matière de collecte d’ordures ménagères.

Dès la moindre alerte d’épidémie liée à l’insalubrité, les autorités sanitaires, s’empressent d’ailleurs à montrer du doigt les collectivités locales, chargées en premier lieu d’assurer la collecte des ordures. Ce qu’elles font mal, d’après certains citoyens qui se plaignent de l’irrégularité des tournées de collecte. Certains quartiers sont même oubliés, des semaines durant. Les citoyens, comme pour forcer la main aux collectivités locales, « délocalisent » leur « mini-décharge » dans des endroits plus exposés au visuel. A ces endroits « stratégiques », les responsables n’aiment pas trop voir de détritus, signe de leur échec dans l’accomplissement leur tâche. Nous voyons ça dans la plupart des quartiers abandonnés de la ville des Genêts. « J’habite dans un quartier non loin du stade 1er Novembre. Je ne sors mes poubelles que lorsque je vois le camion arriver, pour éviter l’anarchie et toutes éventuelles conséquences sur la santé des enfants du quartier qui jouent souvent en pleine rue.

Comme des fois, je me retrouve avec les poubelles de plus de cinq jours de consommation, je suis bien contrainte de les mettre quelque part. je ne vais pas les avaler tout de même ! Même si au départ, j’étais contre cette solution, je me suis résignée à faire comme tous mes voisins. C’est-à-dire déposer mes ordures dans une petite décharge improvisée à côté du stade. C’est moche, je l’avoue mais ce n’est pas de ma faute et j’estime que je fais bien des efforts pour imiter les dégâts.

Il n’existe même pas de bacs à ordures dans mon quartier. Je laisse mes poubelles dans le hall extérieur de ma maison. Mais je ne veux pas me retrouver avec des rats à ma porte ! La peste et le choléra ne font pas partie du passé. Il n y a qu’à faire un tour dans les publications de l’OMS ! », nous raconte Samira qui avoue sa honte devant les regards des passants quand elle dépose ses ordures en plein rue. Notre interlocutrice se rattrape en déplorant le manque de moyens et la mauvaise gestion des programmes de collecte d’ordures. « Un bac me suffit pour éviter de déposer mes ordures sur le trottoir limitrophe au stade !

Ce n’est pas sorcier ! », conclut Samira. Les responsables des collectivités locales, quant à eux, mettent le manque de bacs à ordures sur le dos des voleurs et détourneurs de ces collecteurs. Ce qui est en partie, vrai. Mais des solutions existent. Et elles donnent leurs fruits même dans les quartiers les plus populaires des autres villes du pays. Ce sont les efforts qui font défaut dans la plupart du temps, chez nous. Les autorités concernées avancent également le manque de décharges qui brille dans notre wilaya, contraignant la ville et même les villages de la Kabylie à vivre dans ses détritus.

La raison, selon eux, l’opposition des citoyens à plusieurs projets de création de décharges intercommunales. Cependant, et même avec toute la volonté du monde, Il est difficile de croire les promesses des responsables quand il s’agit d’éventuel dénouement de la situation d’insalubrité dans laquelle est plongée la région, quand on devine que les quelques projets d’aménagement de décharges et de centres d’enfouissement techniques ne suffiraient pas à absorber tous les déchets de la région. On nous remplit bien plein les yeux avec les projets en cours et ceux déjà réalisés dans la région. Des projets qui ne sont arrivés que pour parer une urgence et une menace sur la santé de la population.

Des centres d’enfouissement techniques des ordures ménagères sont, donc, réalisés. L’annonce de la récente mise en exploitation de celle d’Oued Falli, à la sortie ouest du chef-lieu de commune de Tizi-Ouzou devait réjouir plus d’un des citoyens qui attendaient une solution à leur calvaire, puisque les autorités avancent le manque d’infrastructure de stockage des ordures pour justifier le débordement d’ordures dont souffre la wilaya. La capacité de réception journalière du CET de Tizi-Ouzou est de l’ordre de 150 tonnes, soit 55.000 tonnes/an. Optimistes, certains ne veulent pas se prononcer encore quant à l’efficacité de ces centres et l’impact de leur mise en service sur le quotidien des citoyens. Ils ont bien raison d’attendre. Pour le coût de réalisation de ce CET, ils seraient bien déçus de constater son éventuelle inefficacité.

Le coût de réalisation de ce CET est de 301.000.000 DA. Les pouvoirs publics parlent d’une trentaine de postes d’emplois crées dans le cadre de la mise en exploitation de ce CET. De quoi consoler, si l’investissement s’avère infructueux. Deux autres CET sont prévus à la Daïra des Ouacifs et celle de Drâa El Mizan. De quoi éliminer ne serait-ce qu’une partie des décharges sauvages de la région qui se comptent par milliers, ces dernières années. Il s’agit de plus de 850 tonnes à absorber quotidiennement. Ce n’est pas rien. Mais c’est récupérable. Et c’est le cas de le dire !

Quand on sait que 90% des déchets de la région sont recyclables, on se demande ce que font les pouvoirs publics pour exploiter ces déchets. La promotion de l’activité serait à même de régler partiellement la situation, dans un premier temps. Quand on sait que le recyclage de déchets n’est pas une activité qu’on peut appeler rentable en termes de profits, on comprend bien le manque d’engouement des jeunes promoteurs pour ce genre d’activité. A cela, on ajoutera le manque de culture écologique dans notre pays, le souci environnemental et la gestion durable n’étant pas une priorité.

Solution ? Encourager les promoteurs à se lancer dans l’activité, avec toutes les aides et facilités possibles des pouvoirs publics. L’expérience Européenne atteste de l’efficacité de cette solution. Le tri des déchets qui consiste à collecter les déchets selon leur nature et leurs composants afin qu’ils suivent ensuite des processus de recyclage différents et adaptés à la nature des produits est devenue une culture ancrée dans les esprits Outre mer. Si là bas, le tri se fait au niveau des ménages, il serait peut être difficile de calquer le procédé. Chez nous les ordures ménagères sont destinées directement à l’incinération. Il n’y a donc pas de tri préalable des déchets qui nécessitent un traitement spécifique. Certains produits qui contiennent des substances toxiques comme les piles qui contiennent du mercure doivent être traitées avant d’être transformées. Les procédés sont multiples et les moyens et le savoir-faire sont disponibles ailleurs. nous n’avons qu’à calquer ! Ça nous savons le faire sans aucun doute !

Samia A. B.

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