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Peut-on toujours se substituer au médecin?

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n Par Samia A. B.

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Et elle n’est pas sans danger. Avec les adeptes de cette pratique, les médecins qui font de longues études pour comprendre le corps humain et le soigner si nécessaire, doit se contenter d’intervenir pour rattraper les bourdes de cette prise d’initiative qui n’est pas sans conséquence sur la santé de l’individu. Pire, souvent, on décide même pour les autres.

On soigne de la même manière les enfants en bas âge et les vieilles personnes, plus susceptibles et vulnérables aux méfaits de l’automédication. Même les petits bobos courants tels les rhumes, diarrhées, constipations, maux de tête et autres maux dits “bénins”, qui semblent ne pas inquiéter certains, peuvent se compliquer s’ils ne sont pas correctement soignés, en prenant compte de l’état de santé global de la personne. Les gens qui s’auto-soignent ne sont généralement pas très au courant de tous les problèmes de santé que leur corps peut cacher. Les hypo et hypertensions, les hypo et hyperglycémie à taux subtiles, les allergies à certains composants de médicaments pourtant loin d’être nocifs pour le reste du monde, peuvent jouer des tours pour ces gens qui jugent que la visite chez le médecin est inutile. Cela parait alarmant et exagéré, mais les pertes sont considérables, quand une erreur survient.

Le danger est de taille, notamment quand les notices ne sont pas précises, d’autant que chaque personne est particulière et la posologie est établie selon son état de santé général que seul un médecin peut évaluer. Les erreurs de posologie entraînent bien des complications. Encore faut-il que le médicament choisi soit le bon et adéquat à la maladie à soigner. Puis on a beau lorgner devant la notice, il nous est difficile, commun des mortels de déchiffrer la composition des médicaments. «Crospolyvidone, Aspartam, Stéréate de magnésium, gomme santhane, carmellose sodique, silice colloïdale anhydre, benzoate de sodium», hormis quelques mots, nombreux, ceux qui rouleront des yeux à la lecture de cette liste. Il s’agit pourtant de la liste de composants d’un antibiotique très connu auquel beaucoup de personnes ont recours à la moindre petite infection et souvent sans avis médical.

Et pourtant, en plus du principe actif du produit que l’on se passerait de nommer, le reste des composants, en général prévus pour une meilleure absorption du produit et bien d’autres effets peuvent être nocifs en cas d’allergie ou d’intolérance. Cela étonnerait plus d’un. Le Paracétamol que les gens ingurgitent à tout va peut être nocif pour certains. Il existe, en effet, des intolérances pour tout produit pharmaceutique. La réaction au Paracétamol est appelée l’acétaminophéne. Même si elles sont rares, elles existent tout de même. Les médecins passent, souvent, à côté de la plaque quant aux effets secondaires de ces produits estimés inoffensifs. Même avec l’apparition des effets secondaires, on explore souvent d’autres pistes bien loin de l’intolérance avant d’opter pour des tests d’allergies aux médicaments ou à leurs composants.

En parallèle, les adeptes de l’automédication passent souvent à côté du mal qui les ronge. Ils optent pour un traitement qui n’a aucune relation avec leur maladie. Ils perdent aussi du temps en attendant les bienfaits du traitement.

On attend généralement quelques cinq jours pour juger de l’efficacité du traitement. Cinq jours de plus qui peuvent empirer l’état de santé de la personne. Le diagnostic médical n’est fait généralement qu’après une semaine de tentative de guérison hasardeuse. Quand on pense que la constipation est un désagrément certes, mais banal en termes médical, on est bien surpris par le nombre de personnes admises aux urgences pour occlusion intestinale. Une constipation anormale peut aussi cacher un vilain cancer de l’intestin. Une consultation anodine aurait pu déceler le cancer auparavant. Et Dieu sait à quel point le temps est important dans ce genre de maladies.

Comme une toux peut cacher une infection pulmonaire ou même une tumeur, une simple brûlure d’estomac peut dissimuler un ulcère ou une vilaine tumeur. Il est donc, indispensable de se responsabiliser, enfin bannir certaines pratiques de notre quotidien.

Si les médecins eux-mêmes se trompent dans certains cas de diagnostics, comment une personne étrangère au domaine peut se prescrire un traitement juste. Comment peut-il voir juste quant aux symptômes de la maladie en question ? Comment peut-il définir la posologie à adopter ? Comment peut-il connaître les associations de produits ? Souvent, les adeptes de cette pratique se permettent un traitement complet composé de plusieurs produits. ce dernier peut ne pas se limiter à un «banal» antalgique ou antipyrétique, on se prescrit soi-même des traitements aux antibiotiques, des antidépresseurs, même des cardiotoniques et nous passons, une liste de médicaments qui pourtant ne peuvent être achetés que sur prescription du médecin traitant. Seulement, dans certaines pharmacies on ne doit pas être au courant ou plutôt on fait semblant de ne pas le savoir. Le personnel maniant les produits dans les pharmacies, elles ne sont pas toutes concernées. Dieu merci, il est plutôt question d’ignorance.

L’incompétence et l’ignorance des vendeurs en pharmacie nous renseignent sur la nécessité d’une réglementation rigoureuse de l’activité. Et nous ne parlons pas seulement de textes de loi. Il est surtout question de contrôle régulier et décourageant des pratiques louches dans un domaine aussi sensible que celui des médicaments. Le vendeur qui doit détenir un minimum de qualification dans le domaine, ce qui n’est pas le cas dans la plupart des officines, doit être chapoté et guidé par un personnel indiscutablement compétent.

Il est question de vies humaines. Une fausse information, en termes de posologie, une erreur en termes de dosages ou toute autre faute peut être fatale pour certains malades, notamment chroniques. Ce sont ces mêmes vendeurs qui, par inconscience, vendent des produits qui ne peuvent nullement et sous aucun cas être vendus sans ordonnance. On se permet même de servir des enfants au comptoir. On ne prend même pas la peine de poser de questions pour savoir à quel usage est affecté le produit et à quel mal il est destiné à guérir.

On ne se demande même pas si la personne est déjà sous un autre traitement pour éviter le cumul de plusieurs médicaments qui peuvent s’avérer incompatibles et créer des complications dont le malade se passerait bien. Les interactions médicamenteuses peuvent entraîner bien des désagréments mais les pharmaciens, aidés par l’inconscience des gens, ne jugent pas nécessaire de jouer leur rôle informatif.

Nous ne répéterons jamais assez que l’exception existe et qu’il existe aussi des pharmaciens intègres et professionnels dans notre région mais c’est toute la profession qui doit respecter ne serait-ce les réglementations, pourtant existantes. Nous ne parlerons pas de valeurs, ni de droiture. Ainsi, dans un monde parfait, on informerait le client qu’un médicament modifie l’activité ou l’efficacité d’un autre médicament dans l’organisme. Par exemple, certains pansements de l’estomac diminuent l’efficacité des antibiotiques ou encore certains sédatifs qui contiennent un barbiturique, peuvent diminuer l’efficacité de la pilule. Quand on sait que le pharmacien peut remplacer le médecin en termes de conseils et qu’outre-mer, il est autorisé à délivrer des prescriptions pour certaines catégories de traitements, nous nous demandons, si le laisser-aller qui caractérise la profession va durer encore longtemps, on vend les médicaments en pharmacie comme on vend de vulgaires marchandises sur les étals du marché.

Certains pharmaciens inconscients laissent leurs «commerces» entre les mains d’ignorants, une main d’œuvre pas trop cher relativement aux pharmaciens diplômés, faut-il le noter au passage, au dépit de la santé des clients et même de leurs vies. Des pratiques qui encouragent l’automédication et augmentent les risques liés à ce phénomène qu’on justifie généralement par manque d’information et même de moyens. Souvent les gens qui ont recours à l’automédication justifient leur acte par les limites de leurs ressources financières et leur souci d’économiser les frais du médecin. Il est vrai que 600 DA la consultation, ce n’est pas donné à tout le monde. Se frayer un chemin dans une polyclinique pour une consultation à 50 DA n’est pas une chose aisée, notamment quand on est vieux et sans force. Une queue interminable se poste quotidiennement et à toute heure de la journée devant des bureaux de consultation des polycliniques.

Dans les villages le phénomène est accentué, vu le manque de médecins de campagne et le manque d’infrastructures sanitaires au niveau de tous les villages. Nous n’en trouvons qu’aux grandes localités et souvent dans les chefs-lieux de daïras uniquement. Le manque de temps peut aussi encourager à recourir à l’automédication. Une solution facile et pratique pour certains qui ignorent les risques de cette pratique. Des fois on est carrément contraints à l’automédication. C’est le cas de Saliha, 47 ans. Celle-ci a contracté une vilaine angine, il y a quelques jours. Sa fièvre avoisinait les 39,5 au coucher. Elle était tellement malade qu’elle a dû puiser dans sa boîte à pharmacie pour calmer ses douleurs et baisser sa fièvre. Elle utilise même un collutoire pour son angine. Saliha vit à une trentaine de kilomètres de la ville, donc, pas moyen d’aller aux urgences de l’hôpital. Pas même moyen d’aller aux urgences de la polyclinique de sa région, située à 3 kilomètres de son village. Son mari n’est pas véhiculé et n’a pas osé réveiller ses voisins ni leur demander ce service. Notre interlocutrice n’est parti chez le médecin que le lendemain. «Après une longue attente, le médecin de la polyclinique m’a prescrit un traitement, à base d’antibiotiques, qui même une semaine après n’a rien fait pour améliorer mon état de santé. Je ne pouvais rien avaler et j’étais très fatiguée.

Les fièvres me reprenaient chaque soir. Supposant qu’à la seconde consultation j’aurai eu droit à un traitement aussi inefficace que le premier, je suis partie dans une pharmacie et me suis servie un antibiotique que ma fille avait utilisé quelques mois auparavant.

Le traitement était efficace. Moi je suis favorable pour l’automédication parce que les médecins ne sont pas aussi accessibles que ça, notamment quand on en a besoin, qu’il faut attendre dans une salle d’attente plus de 3 heures pour avoir droit à une visite qu’on paye même dans le service public et qu’en attendant, nous risquons de revenir avec une autre infection contractée de chez notre voisin de banc. D’autant plus quand il y a beaucoup de monde, on a l’impression que les médecins sont dépassés et qu’ils font un peu n’importe quoi. Mieux vaut alors se servir soi-même ! », argue Saliha pour justifier son recours à l’automédication.

Le non remboursement d’une liste de médicaments, jugée exagérée par la population encourage particulièrement le phénomène. «Non seulement on ne nous rembourse que 20% de l’ordonnance en général pour certaines prescriptions, mais en plus nous devons assumer les frais de la visite chez le médecin.

Puis, je vous en prie, très souvent c’est moi qui dicte mon traitement au médecin !», nous confie Aldjia, 52 ans qui insiste qu’il n y a qu’elle qui sait ce qu’il lui faut ! Il est vrai que l’incompétence de certains médecins qui, heureusement, ne sont qu’une minorité, ceux-là même qui n’ont de motivation que le gain facile, fragilise la relation Médecin-Patient qui doit reposer sur une confiance absolue. Le comportement de certains médecins et leurs pratiques peu orthodoxes amènent les malades à ne compter que sur eux-mêmes en cas de pépins. Le souci financier et le gain de temps ne sont pas, donc, les seuls motifs qui encouragent l’automédication. Le gros des médicaments qui doivent être utilisés dans «l’automédication responsable», puisque les médecins, pour limiter les dangers de ce phénomène sur la santé publique, consentent un certain laxisme vis-à-vis de certains produits. Ils concernent, en gros, les antidouleurs ou antalgiques, les anti-fièvres ou antipyrétiques, les laxatifs, les antitussifs, les antifatigues ou antiasthéniques pour se redonner du punch, les traitements pour maux de gorge, les pansements gastriques et les médicaments favorisant la digestion. Une condition est émise tout de même.

Le respect des règles de conduite avec ces médicaments. Il s’agit du respect des posologies, de demander conseil au pharmacien et de lui faire un état des lieux de la santé de la personne concernée, des produits auxquels elle est allergique entre autre.

L’«autorisation» ne concerne en aucun cas, les enfants en bas âge, les vieilles personnes, les femmes enceintes et celles qui allaitent, ainsi que les malades chroniques. Ces catégories de la population sont jugées vulnérables aux éventuelles complications de l’automédication. Le danger essentiel, rappelons-le, réside dans le fait que certains médicaments en vente libre ou en vente sans ordonnance alors qu’ils sont soumis à cette condition, masquent des symptômes qui indiquent pourtant une maladie encore plus grave. Le diagnostic n’est, donc, fait qu’une fois la maladie installée. Les médecins sont unanimes, l’effort, le consentement à tolérer une certaine forme d’automédication, des accidents peuvent survenir lors de la prise de tout médicament, même dans le cas d’une automédication faite à bon escient ou même d’une prise sous prescription médicale.

Pour éviter toute automédication dangereuse, il est indispensable que cette dernière se fasse dans une durée relativement courte, pas plus de 4 ou 5 jours. Au-delà, si l’amélioration tarde à apparaître, il est indispensable de consulter un médecin. On ne doit pas prendre de médicament contenant plus d’un principe actif pour délimiter à temps les responsabilités des produits, en cas de complication. En plus, il est nécessaire de disposer d’un minimum de connaissances et d’informations sur les produits pharmaceutiques pour prétendre à leur prise sans avis médical.

En somme, tout le monde est d’accord pour dire que pour éviter les risques de l’automédication, il est indispensable de la limiter et même la bannir. Si elle est nécessaire, comme dans le cas de Saliha, il est recommandé de demander l’avis d’un spécialiste, seul le pharmacien peut généralement assurer ce rôle. Il faut s’assurer qu’il s’agit bien d’un pharmacien qui a fait des études dans le domaine, pas d’un vendeur sensé, quant à lui, seulement vendre les médicaments figurant sur ordonnance.

S. A. B.

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