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Mohamed Bouheddou, DTN du judo au Qatar, se confie : “Le judo algérien a pris une grande dimension”

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On l’a rencontré jeudi dernier à la salle omnisport du 1er novembre de Tizi-Ouzou où il assistait en tant qu’invité d’honneur à la coupe d’Algérie de judo. Entretien.

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La Dépêche de Kabylie : Beaucoup ne vous connaissent pas, pouvez-vous vous présenter brièvement ?

Mohamed Bouheddou : Je suis natif d’El Kseur, dans la wilaya de Béjaïa. Je suis âgé de 49 ans et j’ai trois enfants. J’ai fait mes études à l’Institut de technologie des sports de Constantine. J’ai débuté le judo très jeune dans ma ville avant d’opter pour la JSK avec laquelle j’ai décroché de nombreux titres que ce soit au niveau national qu’international, avec des titres de champions d’Afrique. Ensuite, j’ai exercé au sein de ce club en qualité de DTS avant d’être élu à la tête de la ligue de judo de Tizi-Ouzou, puis de Béjaïa. J’ai été sélectionneur en jeunes, puis avec l’équipe nationale Seniors Dames avec laquelle j’ai passé des moments de bonheur inoubliables. Nous avons décroché de nombreux titres au niveau international, notamment en championnat d’Afrique et aux jeux olympiques. Et je suis heureux de constater que la majorité de ces athlètes se soient reconverties aujourd’hui dans l’encadrement technique, à l’image des grandes championnes comme Haddad, Latrous et Haddid pour ne citer que celles-ci qui sont entraîneurs. Je suis aussi expert, et depuis janvier dernier, je suis membre de la commission éducation et coaching au niveau de la Fédération internationale de judo. J’ai déjà participé en tant que membre de cette commission à deux tournois internationaux, organisés successivement à Düsseldorf en Allemagne et en Géorgie aux USA. Notre mission était de veiller à la conformité de tout ce qui a trait à l’organisation de la compétition (Les règlements, la conformité des tatamis) et autres missions à l’endroit des entraîneurs et des athlètes. Depuis maintenant 10 ans, j’exerce au Qatar et je suis établi avec ma famille à Doha au même titre que tous les entraineurs des différentes sélections nationales.

Selon des échos, Bouheddou est le parton du judo qatari. Qu’en est-il au juste ?

Vous savez, j’exerce au Qatar depuis 2005, soit peu de temps après la naissance du judo dans ce pays. Le judo était à l’état embryonnaire. J’ai passé les cinq premières années comme entraîneur national, avant d’être nommé à la tête de la direction technique nationale. J’ai essayé d’investir toute mon expérience pour répondre aux attentes des dirigeants de la fédération, à leur tête le président. Si les choses se sont améliorées depuis, c’est grâce à eux, les membres du staff technique, les responsables des centres de développement, les clubs privés et les athlètes. Le mérite du progrès que connaît cette discipline revient à toute la famille du judo et non pas seulement à Bouheddou. Je fais de mon mieux pour accomplir convenablement ma mission. Actuellement, comme je suis en vacances, je suis venu me ressourcer au pays, comme je le fais d’ailleurs assez souvent. Cela me fait plaisir aussi de retrouver la ville de Tizi-Ouzou.

Avez-vous gardé de bons souvenirs de la ville de Tizi-Ouzou ?

Tout fait. J’ai passé une partie de ma jeunesse à Tizi-Ouzou où j’ai vécu des moments inoubliables en tant qu’athlète de performance d’abord, puis en tant que DTS à la JSK, avant de prendre en main la ligue de judo de Tizi-Ouzou. Ce sont des choses qui resteront gravées dans ma mémoire. Aujourd’hui, je suis ici en tant qu’invité mais Tizi-Ouzou c’est chez moi et c’est toujours un plaisir de retrouver cette ville et les nombreux amis avec lesquels j’ai passé des moments mémorables.

Vous avez assisté à la coupe d’Algérie, comment avez-vous trouvé le niveau ?

Le judo algérien n’est plus à présenter. La compétition d’aujourd’hui a été d’un très bon niveau. L’Algérie renferme un potentiel humain inépuisable dans cette discipline. Je suis vraiment épaté par la prestation des jeunes garçons du JC Ouadhias et des filles de l’AS Aït Mesbah. Ce sont des athlètes qui feront parler d’eux dans les prochaines années, pour peu qu’on leur assure un minimum de prise en charge. Pour en revenir à la compétition, je dirai qu’en plus du bon niveau des compétiteurs, l’organisation a été impeccable. L’ambiance était formidable. J’ai eu vraiment grand plaisir à assister à cette grande fête. En ce qui me concerne, je répondrai toujours présent lorsqu’il s’agit du judo national.

Revenons un peu au Qatar, comment se porte le judo dans ce pays ?

Je pense que les choses commencent à bouger un peu. Mais la pratique de judo reste difficile. Le Qatar ce n’est pas l’Algérie. C’est un pays de 300 000 habitants où le judo est une discipline toute récente avec une fédération toute fraîche. Les autres sports d’arts martiaux sont plus anciens dans le pays et ont pris de l’avance. Les premières années où j’ai exercé comme entraîneur national, on a fait beaucoup plus dans la vulgarisation de ce sport. Il a fallu faire du porte-à-porte pour faire connaitre cette discipline et surtout convaincre de la pratiquer. Depuis, je dois dire que nous avons fait un bon travail de proximité que ce soit en direction des garçons, mais aussi des filles qui avaient comme entraîneur national Linda Mekzine qui a passé 7 ans avec nous avant de partir au Canada.

Donc, c’était l’objectif que vous vous êtes assigné à votre arrivée au Qatar en 2005 ?

Oui, c’était le premier objectif. Depuis, on est passé à autre chose, car on s’est fait une place dans la région, notamment avec l’Arabie saoudite, le Koweït et le Bahrein, pour ne citer que ces pays. En 2015, lors des Jeux du Golfe, nous étions d’ailleurs classés premiers en nombre des médailles en individuel. C’était inédit. Notre second objectif était de qualifier au moins un athlète pour les prochains Jeux Olympiques, ce que nous avons concrétisé puisque le Qatar aura son représentant lors des prochains Jeux au Brésil.

Comment est organsiné le championnat au Qatar ?

Au Qatar, il n’existe pas de championnat interclubs. On organise un championnat national local qui regroupe les centres de développement qui sont gérés par la fédération, mais aussi les clubs privés. Vous savez, le championnat algérien est incomparable à celui du Qatar. Il y a un véritable océan entre les deux. L’Algérie, qui s’est fait un rang dans le gotha mondial de la discipline, possède un potentiel humain inépuisable. Lorsqu’on compare le nombre de pratiquants en Algérie qui dépasse les 10 000 athlètes à celui du Qatar qui ne dépasse pas les 1000 licenciés, la différence est énorme. Ce qui est bien au Qatar, c’est la disponibilité des moyens matériels (infrastructures et prise en charge). Mais cela ne suffit pas. Il y a un grand manque en moyens humains. Le judo national algérien a pris une grande dimension.

Quelles sont les ambitions du judo qatari ?

Notre prochaine mission c’est d’arriver, d’ici 2020, à qualifier trois à quatre athlètes aux Jeux Olympiques. Les moyens existent. Il y a des centres de développement de la discipline qui sont pris en charge par la fédération. Un staff technique composé d’entraîneurs algériens, Tunisiens et égyptiens, à l’image de Hamid Challal qui est à la tête de l’équipe senior depuis 5 ans maintenant. Tout le monde a son statut (athlètes et entraîneurs), donc rien ne nous empêchera de relever ce défi. Nous allons œuvrer tous ensemble dans le même sens pour concrétiser cet objectif. La direction technique nationale qatarie intervient dans tout ce qui a trait à la pratique du judo. Nous avons non seulement les centres de développement, mais nous intervenons également dans les clubs privés. Des recyclages aussi bien pour les entraîneurs que pour les athlètes sont régulièrement organisés par la DTN. Ce qui est bien aussi c’est que les jeunes issus de la communauté étrangère, qui avoisine les deux millions, ouvrent non seulement droit à la pratique du judo, mais ils peuvent intégrer l’équipe nationale du Qatar. Ils ont les mêmes droits et devoirs que les athlètes qataris.

Pour conclure, avez-vous un message à faire passer ?

Je profite de l’occasion pour faire mes salutations à tous les amis et à tous les judokas où qu’ils soient. Je souhaite aussi aux cinq représentants du judo national algérien aux Jeux Olympique de Rio plein de succès, sans oublier l’unique représentant du Qatar. Enfin, je tiens à remercier notre journal la Dépêche de Kabylie qui fait beaucoup pour la promotion du sport en Kabylie, notamment pour la pratique du judo qui n’est malheureusement pas assez médiatisé dans notre pays.

Entretien réalisé par S. Klari

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