Timechret ressuscitée

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Dans la grappe de villages formant Tafoughalt, relevant de la commune d’Aït Yahia Moussa, composée de neuf djemaâs, timechret, abandonnée depuis des années, commence à être ressuscitée. A ce sujet, la position des responsables et adhérents diffère d’une djemaâ à une autre. «Nous égorgions chaque fête de l’Aïd El Fitr jusqu’à huit moutons mais à la fin des années 1990, avec l’avènement du terrorisme et des massacres de la décennie noire, nous avons décidé d’abandonner ce rite. Ces dernières années, nous avons remarqué que le débat est engagé pour la réhabilitation de timechret. Cependant, nous n’avons pas tranché à ce sujet.

Malgré cela, en guise de compensation, nous offrons aux familles nécessiteuses des colis alimentaires à la veille de chaque mois de Ramadhan», nous confiera un membre de la djemaâ d’Ivouâzounène, la plus importante de Tafoughalt. Celle d’Ath Abdellah, pour sa part, a toujours pratiqué ce rituel, et ce depuis l’indépendance. «Même durant la Guerre de libération nationale, nous égorgions des moutons avec l’autorisation des responsables de la SAS.

Et après l’indépendance, nous avons repris ce rite jusqu’au jour d’aujourd’hui. Pour cette fête, nous avons déjà acheté trois moutons. C’est surtout pour les familles pauvres et nécessiteuses. Et puis, c’est une journée qui nous rassemble. Ceux qui habitent en dehors du village y participent. C’est une tradition ancestrale qui doit être perpétuée par toutes les djemaâs», nous expliquera un membre d’Ath Abdellah. Et un autre d’intervenir : «Nous souhaitons voir le jour de l’Aïd El Fitr dans tous les quartiers de notre village, connu pour sa solidarité agissante, ressuscitée cette tradition, qui est d’ailleurs déjà de retour.»

A l’occasion de l’Aïd, c’est la djemaâ d’Idemichène qui ressuscite timechret. «Avec l’arrivée du nouveau bureau de la djemaâ, nous avons discuté de ce sujet. Le premier mai dernier, lors de notre Assemblée générale, nous l’avons soumis au vote. Il a été accepté à la majorité écrasante. Nous avons, donc, opté pour un veau. Chaque père de famille a versé 1 500 dinars. Il y a ceux qui ont donné plus. En tout cas, nous sommes très contents du retour de timechret.

C’est un moment de convivialité et de fraternité entre tous les membres de la djemaâ. C’est le plus important. Quant aux nécessiteux, ils ne contribuent pas à cette opération», ajoutera un membre du bureau, qui nous apprendra que la veille de l’Aïd El Fitr, le veau sera égorgé dans un abattoir et que le jour de la fête, un boucher le découpera et formera des parts, selon le nombre de foyers (tout couple marié à sa part). En tout cas, timechret est une valeur ancestrale qui reprend petit à petit sa place dans ce grand village de plus de 5000 habitants, en attendant qu’elle se généralise dans toutes les autres djemaâs.

Pour la djemaâ d’Ilouchène, ce n’est pas encore le moment de réhabiliter ce rite pour des raisons que l’un de ses membres, interrogé, ne donnera pas. «Je me souviens quand j’étais enfant, alors que j’accompagnais mon père, le jour de l’Aïd, il y avait une bonne ambiance. Il y avait des gâteaux traditionnels, du couscous à la viande et bien d’autres victuailles. C’était formidable.»

Amar Ouramdane

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