Ce nouvel opus, qui n’invite pas aux danses aoûtiennes, s’ouvre sur une chanson qui n’est autre que le titre du CD : La Kabylie.
Les paroles de cette chanson se veulent un réquisitoire pour condamner et dénoncer tous les travers qui secouent cette région connue pour ses grandes valeurs et ses grandes figures historiques et emblématiques.
L’incivisme et le net abandon de tout ce qui fait la notoriété kabyle offusque le poète qui veut réveiller les consciences pour que l’Algérien de Kabylie revoie sa copie et ne se laisse pas entraîner par les modes qui travestissent ses idéaux et fourvoient son statut.
«Wissen ansi deka tyita / T huz leqvayel tsirni / Leiv izuz tilissa / Celxen tamazight ni / Bgayet, Tizi, Bouira / Tcud felassen tsirni.» (D’où nous vient ce malheur / Qui s’abat sur tous les Kabyles/ Les travers dépassent les bornes/Tamazight est fissurée/ Pour Bgayet, Tizi, Bouira/ L’étau ne fait que se resserrer).
Dans le même sillage, une chanson, «L’Algérie», qui eût dû figurer juste après «La Kabylie», dresse le tableau sombre d’un pays qui ne mérite pas le sort que les décideurs lui réservent depuis son indépendance chèrement acquise au prix de douloureux sacrifices : un pays gouverné de surcroît par un malade qui a laissé ses richesses tomber entre les mains de voleurs voraces.
De cet opus, enregistré plus de 30 ans après le premier sorti en 1986 exactement, Rachid dit qu’il est né d’un accouchement difficile, un défi qu’il s’est lancé pour rendre hommage à son jeune frère décédé tragiquement et à qui il le dédie dans sa pénible douleur. «Je remercie infiniment les amis qui m’ont encouragé à surmonter cette épreuve et à franchir le seuil des studios pour mettre en musique mes textes écrits il y a longtemps et finaliser cette œuvre.»
Les neuf chansons que renferme ce CD sont à découvrir, particulièrement, «Yir tikli» et «Achal aya» en duo avec une très belle voix féminine, celle de Daya. «Yir tikli» ou l’incivisme et «Achal aya» (ça fait longtemps) qui traite du thème cher aux chanteur de l’émigration, à savoir l’exil, et les séparations. Il s’agit d’un jeune qui s’est fiancé puis qui est parti outre-mer. Un texte sans verser dans le remord, qui dénoncent les trahisons qui souillent les espérances. «Lui : Longue aura été l’Absence / Elle me manque terriblement/ Point de contact entre nous/ Je redoute la rupture. Elle : Mon soleil s’est éclipsé/ La brume voile ma vitre/ Sa longue absence m’use/ Les mites rongent ma dot».
L’artiste, natif de la région de Tigzirt sur mer et qui adule Matoub, Hamidouche et la chanson à texte qui sacralise la lutte, a fréquenté en 1987 les studios de la radio du temps du défunt Taleb Rabah qui animait l’émission qui donnait le micro aux jeunes premiers prometteurs.
L’autre animatrice qui l’encourageait est la célèbre voix de la chaîne kabyle, Samira. Rachid Akretche, qui a en chantier actuellement un clip, prépare un double album qu’il compte réaliser avec toute la perfection qu’impose la véritable bonne musique.
Ali Boudjelil