Une catastrophe écologique

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Les principaux cours d’eau de la région de M’Chedallah changent de nouveau de couleur pour virer au noir olive.

La raison est le rejet de grandes quantités de margine avec le démarrage de l’opération de trituration des olives depuis la mi-décembre. Ce liquide hautement nocif du fait qu’il soit composé d’un taux élevé d’acides est lâché par les huileries dans les plus proches ravins, dont la totalité aboutit à Assif N’sahel qui prend ainsi les formes d’un réceptacle géant. Ainsi, ses eaux ont carrément changé de couleur causant ainsi une inqualifiable catastrophe qui pénalise aussi bien sa faune que sa flore. Il faut souligner également que ce cours d’eau reçoit les déchets liquides nocifs des huileries implantées sur le territoire des deux daïras de M’Chedallah et Bechloul, dont le nombre avoisine les 120, tous types confondus. Certes, il existe une technique qui réduit cette pollution pour chaque huilerie dénommée «bassin de décantation» mais rares sont celles qui s’y conforment, bien qu’il s’agisse d’une activité classée, compte tenu de sa pollution, à la catégorie des activités à caractère industriel.

Notons, au passage, qu’Assif N’sahel, en plus de sa riche flore le long de ses rives et à l’intérieur de son lit large de 100 m par endroit, abrite d’importante cavités peuplées de plusieurs espèces animales, notamment, le poisson, la grenouille, le crabe et la tortue, en plus de la bécasse et du canard sauvage. La carpe a aussi fait son apparition dans ce cours d’eau depuis le remplissage du barrage Tilesdit de Bechloul, il y a plus d’une dizaine d’années, où il a été procédé à sa semence pour en faire un important élevage. Une bonne quantité de ces carpes s’échappent alors à chaque lâchage des eaux du barrage et vont vivre et se reproduire dans ses cavités. D’ailleurs, les dizaines de pêcheurs rencontrés sur place s’en donnent à cœur joie. Mais la margine porte un coup fatal à cette faune, en plus du grand risque de pollution des nappes phréatiques existant des deux côtés de ses rives, qui forment l’un des plus importants réservoirs d’eau potable de la vallée du Sahel alimentant des centaines de foyers.

Il est à souligner également qu’Assif Sahel, qui est le prolongement en aval de l’Oued Soummam, subit aussi les retombées des centaines de rejets de margine finissant leur course dans la Méditerranée. Une situation qui va durer jusqu’à la fin de la saison oléicole, soit fin mars. Le deuxième déchet nocif rejeté par ces unités industrielles est le grignon, dénommé localement «Amegrouch». Il forme le noyau de l’olive. C’est un déchet solide. La plupart des huileries s’en débarrassent, en le jetant dans la nature. L’exemple le plus édifiant est celui des bordures de la route secondaire reliant M’Chedallah à Saharidj, où commencent à se déverser, comme les années précédentes, des chargements entiers de grignons. Une matière hautement toxique, dont la biodégradation met des dizaines d’années. Pour rappel, cette route traverse la luxuriante forêt de la colline d’Achaivou.

Interpellé à ce sujet, l’année passée, l’actuel chef de daïra de M’Chedallah a essayé d’orienter cette matière toxique vers le Centre d’enfouissement technique (CET) d’Ahnif, lequel s’est engagé à les prendre en charge d’autant plus que ses responsables ont envisagé de la céder à des fabricants de certains détergents et d’aliments de bétail qui s’en servent comme matière première. Hélas, l’incivisme de certains propriétaires d’huileries, notamment ceux éloignés de ce CET, a la peau dure. Ils continuent à déverser leur grignon dans la nature sans se soucier des conséquences de leurs actes. En tout cas, les pouvoir publics doivent réagir pour mettre fin à cette catastrophe écologique à grande échelle, en déployant des brigades de surveillance et de contrôle durant la saison oléicole, qui s’étale du début décembre à fin mars, a-t-on suggéré.

Oulaid Soualah

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