Satisfactions et lacunes

Partager

Le coup d’envoi de la sixième édition du Festival international de Théâtre de Béjaïa a eu lieu, mercredi dernier, au port de cette ville, et ce en présence d’une foule nombreuse.

Comme promis par Omar Fetmouche, le commissaire du Festival, la cérémonie d’ouverture fut lancée en grandes pompes. Pour ce faire, il a été fait appel à l’entreprise portuaire de Béjaïa pour affréter un bateau et libérer les espaces du nouveau quai à l’intérieur du port. Le bateau a, ainsi, fermé ses calles pour laisser place à un grand espace où fut aménagée la scène devant accueillir les cérémonies programmées. Après d’interminables discours en langue de bois, la parole fut, enfin, donnée aux artistes, tant algériens qu’étrangers. Les spectacles présentés étaient dignes d’intérêt, reflétant ainsi l’amélioration de la qualité artistique des représentations théâtrales jouées en Algérie. Les premiers à occuper la scène furent les musiciens de la Protection civile, dont la fanfare est venue présenter quelques morceaux, aussi bien sur le quai que sur la scène aménagée sur le bateau. Ils ont été suivis sur les quais par des troupes folkloriques exécutant des danses sur fond de trompettes et de tambours traditionnels. Ensuite, le public a eu droit à un jeu de cirque théâtral avec une troupe venue de France, présentant une danse en équilibre sur une corde raide, sur fond de violon et de clarinette, joué en live. Le spectacle était beau et le public a manifesté sa satisfaction, à en juger par les applaudissements qui avaient suivis. Après cela, fut présenté un autre jeu d’équilibriste, exécuté par une jeune italienne. Cela rejoignait ce qu’Omar Fatmouche avait annoncé lors de sa conférence de presse, à savoir le projet de lancer une école de cirque théâtral dans la commune de Tichy, mitoyenne avec Béjaïa. Le public a aussi découvert une équipe de free style, venue de Bordj Ménaïel, présentant un numéro de maîtrise du ballon sur un fond musical d’un saxophoniste belge, accompagnant les jeunes artistes en jouant également en live. Un morceau de danse, venu tout droit de Tamanrasset, est venu par la suite donner des couleurs au spectacle, lui permettant de prendre un souffle nouveau. Une troupe de Béjaïa est ensuite venue présenter un extrait de la pièce « Ibn Batuta », dont nous aurons à reparler dans nos prochaines éditions. En effet, la pièce est programmée lors de ce festival et elle est digne d’intérêt. Sitôt après, la place fut laissée à une troupe de Palestine, qui a présenté deux danses, avant qu’une chorégraphie, made in Béjaïa, ne vienne clôturer l’événement. Ladite chorégraphie a été présentée par une troupe du Théâtre régional de Béjaïa. Basée sur un texte du poète palestinien Mahmoud Darwich, elle fut magnifiquement présentée par des jeunes époustouflants, avec une maîtrise des jeux de scène et de la chorégraphie qui en a étonné plus d’un. Cependant, l’événement n’a pas eu que de beaux moments. Tout d’abord, il y a eu plus d’invités que de sièges prévus, obligeant la moitié des invités à rester debout des heures durant. Car le spectacle a duré plus de quatre heures. Les discours officiels, langue de bois oblige, ont été aussi nombreux, creux qu’inutiles, lassant l’assistance qui attendait avec impatience le démarrage du spectacle. Cela a duré près d’une heure. Béjaïa la Kabyle, la berbère n’a pas eu droit à son discours en Tamazight, si ce n’étaient les quelques mots prononcés par le Directeur de la Culture et le président de l’APW. Mais, ce n’étaient que des mots dits au passage d’un discours fait soit en arabe, soit en français. En même temps, aucun morceau de musique locale n’a été joué ignorant que la ville qui accueille ce Festival a un répertoire musical riche et varié qui aurait pu être exploité pour souhaiter la bienvenue aux invités. Le maire, élu du peuple de Béjaïa, n’a pas eu la parole pour souhaiter, à ces mêmes invités, la bienvenue au nom de la population et des habitants de la ville. La fanfare de la Protection civile a joué des morceaux complètement dépassés des années quatre-vingt, au moment des fameux congrès du FLN. On a même eu droit au fameux « Min Adjlika Ya Watani ». Nos pompiers semblaient manquer d’inspiration, puisque n’ayant pas pu renouveler leur répertoire musical, ni composer de nouveaux morceaux, dont un, justement, pour la circonstance. Tout aussi attristant, fut la relégation du 60e anniversaire de la révolution au seul discours officiel. Les représentations artistiques de la cérémonie d’ouverture n’ont pas pris en compte le fait que le Festival se déroule au moment même où le pays célèbre sa révolution. Cet événement cher aux algériens n’a pas été honoré en ce jour précis. La chorégraphie présentée par la troupe du TRB a consacré son travail à la Palestine, pas à l’Algérie.

 N. SI YANI

Partager