Yennayer

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La datation et l’organisation du temps est une des plus vieilles activités de l’homme. Elle est soutenue par de nombreuses manifestations traditionnelles.

Ces manifestations reposent sur l’observation expérimentée de la nature. Il y a d’abord ce que nous pouvons qualifier d’objectif, c’est-à-dire quelque chose de vérifié et vérifiable scientifiquement. Ainsi, le monde de l’agriculture est le plus universel héritage humain qui a fixé des indications douées d’une logique dans la division du temps en saisons, en mensualités et en segments du jour.

Ces divisions du temps portent partout dans le monde des noms et des significations étymologiques qui vont d’elles-mêmes. Aujourd’hui, la science du domaine cosmique ne s’oppose à ces observations. Elle les confirme. Elles sont donc un héritage objectif. Pour ce qui nous concerne nous berbères et toujours sur le plan strictement objectif, Yennayer qui intervient d’une manière fixe tous les 12 du mois de janvier de l’année universelle est attesté scientifiquement par les changements climatologiques qui interviennent dans l’univers cosmique de la vaste région de l’Afrique du Nord située au nord de l’Equateur.

En effet, Yennayer est la fin d’un cycle et le début d’un autre. D’autant plus que le mot Yennayer se compose de deux mots : Yen et Ayer. Yen signifie (Un) ou le (Premier) et Ayer est une variante du mot Aggur (Mois). Il est vérifié aujourd’hui que la technique de la composition est une des pratiques essentielles dans les mécanismes structurels de la langue amazighe. Une autre expression annonce Yennayer comme étant Tibbura Useggwas (les portes de l’année). Ainsi, l’une et l’autre des appellations de Yennayer se confirment mutuellement.

Naturellement, la célébration de Yennayer est accompagnée par des rites de diverses festivités culturelles, vestimentaires et culinaires similaires partout en Afrique du Nord. Quant à la datation chiffrée du temps, on remarquera que la fixation de l’an zéro chez de nombreux peuples relève d’une décision volontaire. Pour les musulmans par exemple, l’an zéro est décidé à partir du déplacement du prophète de Médine vers le Mecque, en Iran le comptage de la nouvelle année est intervenu suite à un événement de mouvement qui a eu lieu à Samarkand, en Chine a eu lieu un événement similaire, etc.

Les Berbères, eux, ont choisi légitimement donc comme référence à leur an zéro le déplacement du roi Sheshonk (Chachnaq 1er) parti en 950 avant J.C. à la tête d’une puissante armée depuis l’actuelle Tlemcen vers la vallée du Nil dans le Delta en Egypte, pour sauver l’empire Pharaonien alors menacé par un roi venu d’Ethiopie.

L’autre thèse sur l’événement nous est rapportée par Malika Hachid dans «les Premiers Berbères, entre Méditerranée, Tassili et Nil» où elle note que le même roi Sheshonk (Chachnaq 1er) fut intronisé en 950 avant J.C. dans les terres du Delta du Nil en Egypte où il fonda la XXII ème Dynastie avec comme capitale Boubastis. Ces deux thèses ne différent que très légèrement.

En effet, elles font référence à la même date (950 av J.C.) et au même personnage historique Sheshonk (Chachnaq 1er) autour duquel l’événement se rapporte. Partant de ces éléments, l’année berbère atteint aujourd’hui l’an 2966, c’est à dire : (950 av J.C. + 2016 de l’an Grégorien). Yennayer est pour nous un identifiant que nous assumons en tant que valeur historique, culturelle et civilisationnelle. Il est évident que dans la vie active, nous nous alignons sur «l’horloge » annuelle universelle.

Il reste à l’Etat algérien d’officialiser Yennayer en procédant à la révision de la loi de 1963 qui fixe les journées officielles chômées et payées.

Abdennour Abdesselam

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