«L’histoire saura reconnaître les siens»

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Né en 1940 dans une famille de paysans, à Aït Hamsi (Michelet), Salah Ouzerourou s’engagea très tôt dans la lutte de libération, gravissant les échelons de djoundi à officier. Après l’indépendance, il poursuivra sa carrière au sein de l’ANP jusqu’à sa démobilisation en 1974.

La Dépêche de Kabylie : La parution de vos mémoires en cette période de célébration du 63e anniversaire de la Révolution ne doit pas être fortuite…

M. Salah Ouzerourou: C’est vraiment un coup du hasard, mais j’en suis très content. Ce sont deux ouvrages que j’ai intitulés «De la révolution à la guerre d’Algérie» et «Notre indépendance confisquée ou d’un coup d’Etat à un autre». Je tiens à expliquer à mes lecteurs qu’ils étaient prêts depuis déjà plusieurs années, mais aucun éditeur n’a voulu les éditer. Il est vrai que je ne suis pas connu et les éditeurs pensent d’abord à la rentabilité du produit.

Cela voudrait-il dire que vous avez édité vos deux ouvrages à compte d’auteur ?

C’est la pure vérité. J’ai édité ces deux ouvrages à mon compte et c’est ce que sont obligés de faire tous les nouveaux auteurs. J’ai frappé à toutes les portes pour bénéficier au moins d’une petite aide financière, à commencer par le ministère des anciens moudjahidines, mais en vain. Pourtant, ce ministère est censé être aux côtés des auteurs qui contribuent à la sauvegarde de la mémoire collective de l’Algérie contemporaine, car sans ces mémoires rédigées, notamment, par les acteurs des faits historiques, il n’y aura pas d’histoire. Ceci étant, si j’ai écrit mes mémoires, c’est pour rendre hommage à tous mes camarades martyrs, tombés au champ d’honneur les armes à la main, et à toutes ces populations qui étaient les véritables soutiens de l’ALN. Sans elles, nos djounoud n’auraient pas pu tenir. Donc, je me suis livré à un devoir de mémoire et je ne recherche nullement la notoriété ou les honneurs. Par ailleurs, j’ai écrit ces deux ouvrages dans un style très simple, sans fioritures ni longues phrases. J’ai veillé à employer une langue simple. Il est vrai aussi que je suis autodidacte, n’ayant pas eu la chance de poursuivre de grandes études, mais j’ai eu la chance, que beaucoup de mes camarades de mon âge n’avaient pas eue, d’avoir été scolarisé dans mon enfance. C’est cette connaissance rudimentaire de la langue française qui m’avait servi durant la guerre de libération et m’a permis d’être secrétaire de compagnies, leur archiviste, puis officier d’administration au sein de l’ANP. J’ai même eu le privilège d’être officier de recrutement du premier contingent du service national à sa création en 1969.

«Notre indépendance confisquée ou d’un coup d’Etat à un autre», c’est là un titre qui n’a sans doute pas été choisi de manière fortuite…

Effectivement, c’est un grand drame que nous avons vécu dès les premiers jours de l’indépendance. Nous avons découvert les ambitions de certains hommes dont le seul objectif était de conquérir le pouvoir à n’importe quel prix, même en piétinant les corps de leurs frères. C’est pour cela qu’avec beaucoup de mes camarades, nous n’avons pas cessé de dénoncer le fait que notre indépendance a été confisquée. Néanmoins, l’Histoire saura reconnaître les siens.

Entretien réalisé par Essaid Mouas

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