Ichekaben en fête

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C’est la grande fête au village Ichekaben dans la commune de Feraoun qui abrite, depuis hier, la 3ème édition du Festival de la poésie kabyle avec au sommaire, un programme riche et varié. Juste après le coup d’envoi officiel, des chants, de la poésie et aussi du théâtre ont fait la joie des citoyens et visiteurs, mais surtout des enfants de ce village à qui, d’ailleurs, une aubaine leurs est offerte pour casser la monotonie des jours chauds et moroses. Cela dit, ce festival qui se veut en premier lieu un hommage au poète fils du village, L’Bachir Amellah (1861-1930), est aussi un cadre de loisir et d’animation en cette période estivale et de vacances. «C’est vraiment formidable que ce festival nous assure des soirées de théâtre, de musique et de poésie, puisque nous n’avons pas vraiment les moyens d’aller souvent à la plage.

Donc, cela nous permet de passer le temps, surtout que le programme est varié et aussi à voir et connaître des artistes de renom, comme Karim Abranis qui a visité notre village», dira Yacine, un jeune collégien. Au menu de ces soirées, le 7ème art est roi, bien sûr avec des récits «kabyles», chaque soirée, une pièce théâtrale se joue avec des récits de vers et poèmes puisque la manifestation a un timbre particulier, la poésie. Le théâtre, l’art lyrique et la musique, que peut-on avoir de mieux pour des soirées nocturnes dans des villages ? C’est aussi une manière de joindre l’utile à l’agréable pour faire passer le message à un large public puisqu’il ne s’agit pas uniquement de citoyens d’Ichekaben, mais nombreux sont ceux qui viennent d’autres localités. Il y a aussi des conférences, dont les thèmes tournent autour de la culture berbère en général et de l’expression orale en particulier, comme celle du premier jour du festival qui a traité du récit poétique des contes kabyles, puis celle de Kamel Bouamara du 2ème jour ayant pour thème «les voies de l’écriture et la transcription kabyle».

Mais le tout se fait autour du concours de la poésie, raison d’être de ce festival qui a connu cette année une participation record avec pas moins de 40 participants venus de différentes régions qui sont rentrés en lice depuis hier, vendredi, dans l’espoir d’arracher le prix Bachir Amelah. «C’est notre manière de rendre hommage à notre poète et de le faire connaître aux jeunes, car il a laissé un chef d’œuvre en matière de poésie kabyle qui mérite qu’elle soit déterrée», estime L’Hafit Aït Ikhlef, président de l’association culture berbère «Si L’Bachgir Amelah», initiatrice de ce festival. Le travail de ladite association ne s’est pas arrêté là puisqu’elle a mené une opération de récolte, durant des années, des centaines de poèmes du cheikh L’Bachir qui a défrayé la chronique en chantant l’amour, lui qui a vécu durant la moitié du 19ème siècle. Ce travail a donné naissance à une œuvre littéraire d’un recueil poétique de Si L’Bachir Amelah, de l’écrivaine Tassadit Yassine, une première du genre, disons, sans compter du livre écrit par Kamel Bouamara, il y a quelques années pour passer de la transmission orale.

Ce recueil a été édité en France par Julien Pescheur, qui n’a pas manqué de faire le déplacement jusqu’à Ichekaben pour assister au festival. «J’ai découvert la poésie de Bachir Amelah en 2005 après le biais d’un ami membre d’une association native de cette région de Feraoun et j’ai aimé d’emblée l’œuvre de cet Imam, d’abord qui est particulièrement moderne car il chanta l’amour et les sentiments, il était aussi cocasse dans ses dialogues avec l’autre chantre de la poésie berbère, en l’occurrence Si Mohand Ou M’Hand. Je dirai que ça m’a plus d’emblée», témoigna l’éditeur français, Pescheur, en soulignant que depuis 8 ans, sa maison d’édition produit des livres en tamazight, entre autres, le recueil des poèmes de L’Bachir Amelah, reconnaissant que cela est grâce aux efforts de ces jeunes de l’association culturelle qui porte son nom. Il dira enfin que c’est une manière de sauvegarder cet héritage culturel kabyle.

Cependant, le festival en question qui est à sa 2ème édition, est soit disant le repère dans l’espace et dans le temps des jeunes poètes qui ne cessent d’affluer le petit village de L’Bachir Amelah, devenu avec le temps la Mecque des amateurs de l’art lyrique. «Le poète a besoin des occasions comme celle-là et l’honneur est aux initiateurs de ce festival qui nous offre l’espace de nous exprimer et de prouver nos talents», dira un participant au concours de poésie qui connaitra ses lauréats lors de la clôture de ce festival, dans la soirée du samedi.

Nadir Touati

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