L’exposé d’Ouyahia face aux députés

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Jamais le passage d’un chef de l’Exécutif devant les députés n’a suscité autant d’intérêts que celui d’aujourd’hui. Du moins, depuis le passage de ce même Ouyahia devant l’APN, au lendemain de sa succession à Benflis, limogé par Bouteflika en mai 2003.

Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, présentera, aujourd’hui donc, le Plan de son gouvernement, ou ce qui convient d’appeler le plan de sortie de crise, devant le Parlement. Un Parlement qui sera très attentif à l’exercice oral tant il trace les lignes directrices devant permettre au pays d’échapper à la sévérité de la crise financière. Le Plan en question constitue, selon Ouyahia, «une véritable feuille de route pour la poursuite de la mise en œuvre du programme du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, lancé en 2014. Un programme qui s’articule autour de plusieurs axes, notamment la consolidation de la démocratie, la préservation des acquis sociaux et la promotion d’une économie diversifiée, libérée de la dépendance aux hydrocarbures». Si pour la consolidation de la démocratie, les choses peuvent passer sans ambages, même si l’on s’attend au lever de boucliers des partis de l’opposition siégeant à l’APN, qui, rendez-vous électoral du 23 novembre prochain oblige, vont saisir la tribune de la Chambre basse pour haranguer le «pouvoir» et ameuter les troupes, les questions sociales et économiques en seront les plus captivantes. Ahmed Ouyahia, bien qu’il soit rompu à ce genre d’exercices, s’est préalablement armé de lexiques mêlant l’alarmisme et l’optimisme pour convaincre les députés du bien fondé de son Plan. Ouyahia s’est, également, préalablement fortifié d’un bouclier comptant pas moins de 296 députés issus des formations politiques de l’Alliance présidentielle. Il est vrai que le recours à Ouyahia pour gérer cette période est perçu par le peuple algérien comme un prélude à une vie d’austérité, le maintient, ou la consolidation des acquis sociaux tels que présentés dans l’avant-projet du gouvernement, tend à rassurer notamment les couches sociales vulnérables. Ainsi, le Premier ministre fera en sorte que les engagements du gouvernement, à travers son Plan, à poursuivre la politique nationale de développement social, soient effectifs, mais surtout dénudés de mensonges et de duplicité. «Le gouvernement s’engage à poursuivre la politique nationale de développement social à travers, notamment, la promotion des secteurs de l’éducation, la préservation du système de la sécurité sociale, la réduction du taux de chômage, la préservation de la politique de solidarité nationale ainsi que la promotion de la femme et de la jeunesse», est-il mentionné dans le document de 52 pages que les députés vont devoir éplucher avant jeudi prochain, jour des questions réponses au Parlement. D’aucuns au palais de Zighoud Youcef s’attendaient au récital chiffré qui constitue la clé d’hypnose d’Ouyahia. Ce dernier devra assurément dire certaines vérités amères, telles l’épuisement du Fond de régulation des recettes et l’affaiblissement des réserves de change. En contrepartie, il est attendu d’expliquer le choix d’opter pour le financement non conventionnel de l’investissement. Sur ce, le Premier ministre s’efforcera à convaincre des bienfaits des «solutions stratégiques» que le gouvernement compte apporter à la sphère économique du pays. «Le gouvernement a prévu une série de mesures visant à améliorer la gouvernance financière du pays, en passant par la modernisation de l’administration des finances, du secteur bancaire et du marché financier, dont notamment une nouvelle mesure qui consiste au recours exceptionnel et transitoire au financement non conventionnel destiné exclusivement au budget d’investissement», est-il encore mentionné dans le projet du Plan d’action du gouvernement. Le grand oral d’Ouyahia devant les députés ne manquera pas de faire date de ce quinquennat de Bouteflika, très marqué par les plus mauvais indicateurs financiers et économiques mondiaux qui se sont vite dépeints sur l’Algérie. Des indicateurs qui ont dilué la promesse phare du Président-candidat en 2014, d’atteindre 8% de croissance en 2019.

Mohand Arezki Temmar

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