Moins de deux semaines après l’attentat terroriste d’El-Mkaïl, qui a fait sept morts parmi les militaires, la psychose s’empare, de nouveau, des habitants des différentes mechetas de la corniche jijélienne après un calme relatif de près d’une année.Essentiellement côtière, cette wilaya a occupé ces derniers jours, les devants de la scène médiatique, non pas par l’affluence record des estivants cette année, mais par le regain de violence de l’activité terroriste et l’insécurité notamment après ce nouvel acte sanguinaire perpétré par les sbires de Hassan Hettab qui continuent de semer la terreur dans la région. “C’est un énième crime contre les Algériens” nous lance un citoyen complètement épuisé d’inquiétude. Un acte qui a coïncidé avec la charte pour la réconciliation nationale que les ennemis de la paix ont voulu stopper net et continuent d’infester les montagnes fortement boisées de la wilaya de Jijel. L’inquiétude est lisible sur tous les visages devant le problème d’insécurité qui commence à se poser avec acuité. Des familles entières revenues à leur terre ancestrale qu’ils ont abandonnée après un exil forcé de plus d’une décennie, pensent déjà à plier bagage et à rebrouser chemin. Une braise sur les cœurs, ces habitants sont contraints encore, une autre fois, à quitter leur village et laisser leurs biens qu’ils souhaitent, tant bien que mal, récupérer et en profiter davantage.‘L’odeur de la mort est partout ! Les criminels sont omniprésents”, nous dit un père de famille que nous avons pu questionner.Les routes menant vers Selma, El-Aouana, Eraguen, Aït-Ali, Taza, Ziama Mansouriah, Taher, ont perdu subitement leur intensité habituelle en circulation au bout d’une semaine.Aux Aftis, un hameau longtemps oublié contre le GIA, quoique la vie a repris “à petits pas” la population n’est pas prête d’oublier ces gentilles frimousses d’adolescents en pudiques bermudas et en long kamis accompagnés de leurs moniteurs “barbus” et les entraînaient aux sport de combat… “Qui parmi nous ne se souvient des campeurs des grottes merveilleuses des années 80 ?” s’est interrogé un habitant des Aftis et d’ajouter : “Des années après, ils sont revenus avec dans leurs sacs à dos leurs armes idéologiques et se sont déployés dans ces zones montagneuses opérant un recrutement autochtone souvent tribal ou familial. Dès lors, les familles des hameaux oubliés ont été livrées à ceux qui prétendaient être les libérateurs et combattant de la foi !” Selon d’autres témoignages que nous avons pu arracher, rien n’augure d’un retour au calme dans la région. “C’est de l’incertitude la plus totale”, nous disent nos interlocuteurs. “Nous craignons un retour en force de ces criminels qui peuvent commettre leur sale besogne à tout moment et n’importe où”, ajoutent des habitués de la région.De Taher à l’extrême est jusqu’à Ziama Mansouriah à l’ouest, le climat est identique et tous les citoyens approchés, refusent de “commenter” ou acceptent de parler avec une discrétion totale. A Ziama où l’exode “forcé” bat de plus en plus son plein, la loi portant concorde civile et la charte pour la réconciliation nationale demeurent la seule lueur d’espoir aux yeux des riverains qui y croient de tout cœur mais restent très méfiants. “C’est trop tôt pour crier victoire contre le terrorisime, méfiez-vous de l’eau qui dort”, nous a confiés un “exilé” d’Erraguen et conclure : “A présent, je dois m’installer-là où des actes terroristes ne font pas partie du quotidien des citoyens.”Au niveau de la ville de Jijel, sur l’explanade du port, un véritable pôle d’animation, seul le son des nuages résonne. Depuis l’attentat, finies les veillées nocturne et les noctambules préfèrent rester chez eux. En face, sur les hauteurs des montagnes, les forces de sécurité livrent une guerre silencieuse aux groupes terroristes.Au fait, les Jijéliens, à l’instar de tous les Algériens, n’ont-ils pas le droit d’espérer autre chose que la paix des cimetières ? Sa réponse est, sans aucun doute, le verdict final des résultats de la charte pour la réconciliation nationale de ce 29 septembre passé et ses fruits dans les jours à venir.
Rabah Zerrouk