C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès d’un des chantres de la chanson kabyle des années 40, à la voix agréable et surprenante, en la personne de Abdelwahab Abdjaoui, de son vrai nom Rachid Baouche. L’artiste, originaire de Tifra et né le 25 février 1925 à Béjaïa où son père tenait un commerce, est parti à l’âge de 87 ans, non sans nous avoir légué un riche palmarès dont l’essentiel de son répertoire a été repris par le talentueux El Ghazi, issu comme lui de la même région. Electricien de profession à la mairie de Béjaïa, Abdelwahab fut vite repéré par le non moins maître de la chanson kabyle Sadek Abdjaoui. Ils formèrent, ainsi, un duo rarement égalé. C’est en 1946 qu’ils enregistrèrent un 45 tours qui est resté dans les annales de la chanson kabyle avec, notamment, les chansons « A ben Yazit », une merveilleuse traduction kabyle de la fable de Jean De La Fontaine, « Le coq et le renard », et «A baba Amghar » qui augurait déjà du conflit de générations qui se profilait à l’horizon des nouvelles technologies qui annonçaient un monde supposé être meilleur. La répartie que se sont donné les deux artistes demeure de haute facture artistique et textuelle. Presque l’ensemble du répertoire de Abdelwahab est de la composition musicale et poétique de Sadek Abdjaoui. On citera, également, le tube de l’époque avec l’apparition du « swing om » américain et la série formée des titres « A l’babur, A bu taâmamt d uqendur, Taqsit n sidna Yebrahim, Ah yella ulac, A tumubil, Taqsit n wutchi …etc. ». Abdewahab travaillera à la radio de Béjaïa, de 1946 à 1962 comme chef d’orchestre et chargé des émissions en langue kabyle diffusées sur les ondes de la chaîne II. Du 8 au 13 septembre 2011, un vibrant hommage, ô combien mérité lui a été renduà Béjaïa pour l’ensemble de sa carrière. Il a été enterré hier dimanche 8 décembre, au cimetière « le bois sacré » à Béjaïa.
Abdennour Abdesselam