Du côté de la capitale des Hauts-Plateaux, Sétif, le mois sacré ne diffère en rien de celui des autres contrées du pays. Les récurrentes flambées en pareilles périodes des produits alimentaires, la réapparition des chaînes humaines devant les plus banals des points de vente et les rixes quotidiennes pour un oui ou un non, qui reviennent au galop, caractérisent comme à l’accoutumée, le mois supposé être celui de la piété, de l’entraide et la “rahma”. Faire couler beaucoup d’encre en pareilles circonstances est devenu, par la force des choses, un geste automatique sans plus, sans effet même, car quoi qu’en parle et quoi que soit notre commentaire, les mauvais réflexes des “as” du “gain” facile, rapide au dépens parfois, de la santé des consommateurs, sont devenus partout “incontournables et indétronables”.A Tizi N’Bechar, Amoucha, Ourissia ou à Aïn El Kbira, l’amère pilule de la majoration impunie des prix est devenue pour les petites bourses, surtout, une fatalité. Nouredine K., un jeune marié accosté au marché d’Ourrissia, nous avance : “Sans scrupules, certains commerçants font en toute quiétude, valser les prix. On dirait qu’ils sont à la bourse d’Alger, alors que d’autres proposent, comme vous le voyez, des produits dont la tarification est inaccessible et de mauvaise qualité, on est vraiment entre le marteau et l’enclume, et d’ajouter on est déplumé devant des services de contrôle inertes, qui devraient, au moins, activer pendant ce mois de Ramadhan”. Les tracasseries du petit peuple ne s’arrêtent pas là et comme un malheur n’arrive jamais seul, l’indisponibilité de certains produits, demandés ou exigés par les femmes, est un autre casse-tête chinois de nombreux pères de familles au niveau d’Aïn El Fouara, qui s’agglutinent des heures durant dans d’interminables queues, sources de bagarres et de disputes à l’instar de celles formées devant les boulangeries et les marchands de zlabia. Et c’est justement là que nous avons assisté à une scène qui a fait vraiment rire plus d’un.Un sexagénaire, son tour arrivé, demande au jeune vendeur de cette pâtisserie orientale, de lui servir 1 kg de zlabia, en lui montrant les pièces “fraîches” sollicitées, du doigt. Le jeune commerçant lui remplit alors un sac d’un autre lot, sans toutefois s’attendre à la réaction du demandeur qui lui balança la marchandise en plein visage et a juré de ne jamais revenir. “Même si tu resteras le seul marchand de toute Aïn El Kebira, je ne solliciterai jamais plus ton magasin”, jure-t-il. Ironie du sort du vendeur, ou effet Ramadhan, on ne le sait pas ! Ce qui est sûr, c’est que tout ce beau monde présent a éclaté de rire !L’autre sujet qui revient tel un leitmotiv à chaque Ramadhan, c’est l’arnaque. Pendant notre virée au niveau du marché de Tandja, nous avons remarqué certains citoyens oser contrôler même les “poids” des balances ! Questionnés, nos interlocuteurs n’ont pas hésité à répondre : “Vous savez, dans notre pays, tout est possible. Vous voyez ce poids de 1 kg, des commerçants vereux osent le trouer du côté bas et, au lieu d’avoir un kg exact, c’est plutôt 800 ou 900 g le poids réel de la marchandise reçue, cela s’est passé officiellement durant les années passées”, nous a déclaré K. Moussa, un habitué du marché.Après la rupture du “jeûne”, la tension baisse et les cœurs des Sétifiens se reposent des palpitations de la journée, le thermomètre descend en cette période de chaleur. Les SDF sont les premiers à pâtir de la mauvaise humeur de la nature dans la ville de Sidi El Khier. En ce mois sacré, les “vulnérables” méritent ne serait-ce que le “SMIG” de la chaleur humaine et comme cette année l’hiver n’a pas encore exhibé ses couleurs, notamment sa neige et son verglas au niveau de la région, les artères principales ainsi que les quartiers populeux, à l’instar de Boumarché, El Hechama, Cité Dallas, Cité Tlidjène et autres sont inondés par des marées humaines. De véritables aubaines pour les commerçants de faire le plein.Les jeux de cartes, le domino et autres jeux de loisirs sont au menu des uns alors que d’autres dissertent autour d’un café ou d’un thé au sujet de la dernière rencontre de leur club phare, l’ESS et de ses chances de se maintenir parmi l’élite cette année.Pour clôturer notre visite à Aïn El Fouara, nous nous sommes rapprochés d’un hadj pour connaître sa version à propos du mois de Ramadhan aujourd’hui, notre interlocuteur s’est contenté de nous répondre philosophiquement avec une seule question : Où est le Ramadhan d’antan ?
Rabah Zerrouk
