Début timide de l’animation nocturne dans la capitale, en attendant la vitesse de croisière qui permettra à la cité de retrouver ses marques et ses repères.
Ambiance des quatre premières nuits. Depuis le début du Ramadhan, avec de surcroît la chaleur étouffante de l’été Alger n’a pas encore retrouvé cette ambiance propre à ce mois de convivialité et de sorties nocturnes. Les quatre premières nuits ont été mornes et maussades. « Il faut attendre au moins une semaine pour que la ville s’anime et que les gens reprennent l’habitude des sorties nocturnes », estime un passant de la rue Didouche Mourad. « Comme de coutume durant le Ramadhan, la capitale se transforme en une ville vivante après la deuxième semaine. A la rue Didouche Mourad, à la Grande Poste et à Bab El Oued, les rues grouillent de monde. Après la rupture du jeûne, des files et des grappes humaines se forment. Il y a ceux qui se dirigent vers la mosquée pour accomplir la prière des « Taraouih », d’autres qui préfèrent les cafés, alors que certains optent pour la plage. Du côté de la Grande Poste, si d’habitude, les services de l’APC concoctaient des spectacles pour enfants et adultes, cette année, la place est devenue quelconque. « Cette année n’est pas comme la précédente, il n’y a pas d’animation. A titre d’exemple, au marché de Meissonnier, les magasins étaient restés ouverts aux familles jusqu’à deux heures du matin. Cette année, les choses ont changé », estime Hamid, un résident du quartier. «Peut-être que l’animation va commencer à partir de la deuxième semaine. Les familles algéroises n’ont pas encore pris l’habitude de sortir la nuit », a estimé notre interlocuteur. A la place Audin, les cafétérias sont bondées de monde, particulièrement de jeunes. Entre deux parties de dominos, on discute de tout, football, marché programme télé…
Les plus âgés préfèrent parler politique et évoquer les soucis auxquels ils font face, la cherté de la vie, le gaspillage et la course effrénée vers les marchés, sont autant de sujets qui monopolisent ces rencontres qui ne vont, généralement pas, au-delà de minuit. Comment peut-il en être autrement quand on remarque que les magasins restent fermés durant la nuit ? Un constat établi par les noctambules et les couche-tard. A la place des Martyrs, l’ambiance est la même. Les magasins sont dans leur totalité fermés, hormis les vendeurs de friandises et les vendeurs ambulants de thé. Ces quatre premières nuits de Ramadhan n’ont pas été à la hauteur des attentes. Si la capitale n’a pas encore revêtu tous ses atours, il faudra, nous a-t-on dit, attendre la deuxième semaine pour voir progressivement les familles sortir faire leurs emplettes ou tout simplement prendre un bol d’air qui les changera des contraintes du jour.
Vivement les Kheïmates ?
Habituellement, les « Kheïmates » drainaient les foules durant ce mois sacré qu’elles aient été organisées par les grands hôtels, tels le Mercure et le Hilton ou tout simplement par des particuliers ou des entreprises, à l’image de Hyundai au niveau de son show-room. Les Algérois prenaient plaisir à s’y rendre en familles dans une ambiance bon enfant. Elles sont même devenues des endroits incontournables pour beaucoup de jeunes. Même les restaurants et les cafés s’adaptaient à cette nouvelle tendance, en créant ou en adaptant un espace Kheïma en leur lieu. Mais pour ces premiers jours, elles n’ont pas encore fait leur apparition. Cela n’empêche pas que les algérois espèrent bien que ce n’est que temporairement, le temps qu’un plus large public renoue avec les sorties en nocturne.
Le tram et le métro bousculent les habitudes
Alger serait-elle enfin devenue cette grande métropole, desservie par des moyens de communication et de transport modernes et efficaces? Avec l’avènement du métro et du tramway, l’on serait tenté de répondre par l’affirmative. En effet, durant ce mois de Ramadhan, la capitale algérienne semble connaître une certaine animation nocturne qui contraste avec les timides soirées qu’aura connues El Bahdja, jusqu’à ces dernières années. Alger devient désormais intarissable, grâce justement aux deux importantes réalisations que sont le tramway et le métro, qui fonctionnent selon un schéma qui tient compte des autres moyens de locomotion comme le véhicule particulier ou le téléphérique. Finalement, ces deux engins ont quasiment révolutionné le mode de vie des Algérois et démocratisé les ballades nocturnes. Ces dernières ne sont plus l’apanage de Staouélli, Bab El Oued ou Alger-Centre. Des familles entières osent enfin mettre le nez dehors après le f’tour encouragées et sécurisées par un transport inédit, confortable, aux horaires réguliers… etc. Une vraie bouffée d’oxygène, en somme, pour ces citoyens qui semblent enfin s’affranchir du diktat des transporteurs privés. Prix étudiés, gratuités à quelques occasions, horaires tardifs et sécurité tout est fait pour extirper l’Algérois de son introversion et le plonger dans le bain d’une cité inédite qui prend imperceptiblement forme. Ceci est particulièrement vrai pour les habitants de la banlieue Est de la capitale, laquelle tend à devenir le Beverly Hills national. Ainsi, les rails du métro peuvent mener, au choix, au Hilton, au méga centre commercial flambant neuf Ardis, au parc de loisirs des Pins maritimes, mais également au Mercure et au Mall de Bab Ezzouar. A croire que le centre de la mégalopole se déplace vers l’Est.
Ferhat Zafane

