Les urgences prises d’assaut après le f’tour

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Anarchie maîtrisable à Bouira

Les urgences médicales connaissent une effervescence toute particulière durant ces soirées ramadhanesques.

Dans la ville de Bouira, les urgences de la polyclinique d’Oued D’hous, sise à la sortie Est de la ville, enregistre depuis leur mise en service le premier jour du Ramadhan un taux de fréquentation des plus élevés, notamment après le ftour. Les patients viennent des localités de la périphérie comme Ain Turk, Oued El Bardi, Said Abid, Ouled Bouchia, El Esnam, et parfois même des wilayas voisines. Mardi dernier, à peine le jeûne fut rompu, les premiers malades arrivèrent aux urgences de la polyclinique. Les médecins urgentistes et le personnel de la structure ont à peine 10 mn pour rompre le jeune avant de reprendre leur service. A l’entrée de ce service, où sont déjà stationnés une dizaine de véhicules, des agents de sécurité orientent les patients et leurs familles vers les urgences. A l’intérieur de la structure, des dizaines de personnes se sont agglutinées devant le bureau du médecin de garde chargé des consultations. Malgré l’aménagement d’espaces d’attente, équipés de bancs, tout ce beau monde attend debout devant la porte du médecin. Juste à côté de la salle des consultations, une autre pièce a été aménagée pour les soins infirmiers. Là encore, seulement deux à trois personnes ont pris place, les autres s’impatientent juste à l’entrée, rendant ainsi tout accès à la salle de soins infirmiers compliqué. Hommes, femmes et enfants, accompagnés le plus souvent des membres de leurs familles, attendent leur tour pour voir le médecin. Certains ressortent de chez le médecin avec des ordonnances, d’autres en revanche sont orientés vers le service radiologie pour passer des radios. A première vue, l’on ne peut pas savoir qui est arrivé en premier et qui est le dernier, tellement la situation est confuse. Mais parmi ces gens, une sorte de consensus semble s’être installé. Il faut dire que durant tous le temps qu’on a passé dans l’enceinte des urgences, et c’est un fait plutôt rare, point d’accrochages, encore moins de bousculades. D’habitude, des accrochages verbaux sont signalés au niveau des urgences médicales. C’est monnaie courante dans nos hôpitaux. D’ailleurs, durant les premiers jours du mois de Ramadhan, il nous a été donné d’assister à un déchainement de colère de la part d’une parente accompagnant une patiente. Une jeune adolescente, visiblement pas satisfaite de l’accueil réservé à une personne de sa famille, avait déversé toute sa colère sur les infirmiers et agents de la polyclinique. Ces derniers ne bronchèrent pas et laissèrent passé l’orage. Il faut dire que le personnel soignant fait face à des situations des plus compliquées et tentent tant bien que mal de calmer les esprits, tout en essayant de garder leur sang froid. Au fil des minutes, le nombre de patients ne cessa d’augmenter. Du côté du personnel hospitalier, l’on essaye de gérer la situation. Des agents que l’on reconnaît à leurs gilets bleus commencent alors à orienter les nouveaux arrivés vers une autre salle de consultations sise au fond du couloir. Avant cela, le parent du malade doit s’acquitter d’abord des 50 DA de frais de consultation au niveau de l’accueil. Un deuxième médecin de garde et des infirmiers y assurent un autre point de garde. La pièce jouxtant la salle des consultations sert, elle, de salle d’observation. Trois patients, sous perfusion, s’y trouvaient en compagnie des membres de leurs familles qui étaient à leur chevet. Des infirmiers gardent toujours un œil sur l’état de ces malades laissés sous observation médicale. De temps à autre, le surveillant général des urgences vient s’enquérir de leur état de santé ainsi que du fonctionnement des différents services de la structure dont celui de la radiologie.

Les personnes du 3ème âge et les bébés en grand nombre

Cela fait déjà une heure et demie que les urgences ont commencé à recevoir du monde, et l’affluence est toujours accrue. Les couloirs sont bondés de monde et les incessants va-et-vient ne s’arrêtent jamais. Des gens arrivent et d’autres repartent. Certes, il y a un peu moins de monde qu’une heure auparavant mais les malades continuent d’affluer aux urgences. Parmi les malades évacués, il y a aussi bien des personnes âgées que des enfants en bas âge. Des vieux en proie à des crises de diabètes et d’hypertension, qui après avoir reçu les soins d’urgences repartent chez eux. Ils arrivent que des mamans arrivent avec leurs bébés, souvent victimes d’excès de fièvres surtout en ces temps de chaleur. On a assisté aussi à des évacuations d’enfants victimes d’accidents domestiques qui nécessitaient une prise en charge au niveau des soins infirmiers. Parmi tant de cas traités au niveau des urgences durant ce mois de Ramadhan, il y a bien évidemment ceux des patients pris de malaise juste après le ftour. Il faut dire que certains jeûneurs supportent très mal la chaleur qui caractérise le mois de carême cette année. La chaleur accentue le risque de malaise surtout chez certaines personnes fragiles. Les problèmes digestifs causés par une alimentation excessive et déséquilibrée sont les raisons de beaucoup de consultations. Beaucoup ne font pas attention à la quantité et à la qualité des aliments ingurgités au ftour.

Les urgences sous pression

Pour un des praticiens de la polyclinique, aux urgences médicales, l’on traite presque tous les cas, pas seulement ceux liés à la conjoncture du mois de Ramadhan. Selon notre interlocuteur, les urgences traitent une moyenne de 150 patients particulièrement la nuit, suivant un rythme de travail des plus soutenus. La structure ne peut, à elle seule, faire face à cet important flux de patients qui ne viennent pas seulement de la ville, mais des quartiers de périphérie et des communes voisines. En dépit de l’existence d’une autre structure des urgences au niveau de la ville, à savoir l’EPSP sise au quartier du « Château », la demande demeure très forte. Ce qui accentue la pression sur le service des urgences. A préciser que depuis le début du mois de Ramadhan, et en raison de travaux, il a été décidé de délocaliser les urgences médicales de l’EPH Mohamed Boudhiaf vers deux structures médicales en ville, à savoir l’EPSP et la polyclinique.

Embouteillages La police à la rescousse des pompiers

Alors que dans les couloirs, la foule se mêle aux blouses blanches et autres policiers et agents de sécurité dehors, les alentours de la polyclinique grouillent de monde et de véhicules. Des agents tentent de réguler les stationnements de façon à libérer l’accès pour l’arrivée des autres véhicules à la structure. Une ambulance escortée par deux 4×4 de la BMPJ arrive. Un jeune homme malade sera conduit aux urgences. 10 minutes plus tard, une autre ambulance des pompiers arrive avec à son bord un autre malade évacué. Un pompier qui attendait le retour de ces coéquipiers discutait avec un agent de sécurité des énormes difficultés de circulation qu’ils rencontrent en ville pour pouvoir accéder à la structure des urgences. Pour le pompier, sans l’aide et l’escorte de la police, leur ambulance aurait mis une heure pour rallier Oued D’hous. A préciser que des embouteillages monstres se forment en ville durant la soirée, particulièrement sur le boulevard Zighout Youcef. Ce qui complique davantage l’accès des ambulances des pompiers qui font parfois appel à la police pour leur dégager un accès. Leur tâche n’est pas de tout repos, ils disent ne pas comprendre l’entêtement des automobilistes à bloquer l’accès de leurs véhicules, pourtant prioritaires. Les deux ambulances quittent la polyclinique une demi-heure plus tard.

Pénurie de médicaments ?

Au cours de notre présence au niveau des urgences, nous avons abordé deux jeunes gens, qui avaient l’air un peu inquiet, à l’entrée de la polyclinique. Les deux accompagnaient une parente malade, admise au niveau des urgences. Ils sont venus de Bouhinoune, dans la daïra de Boghni et ils ont parcouru plus de 40 km pour rallier Bouira. Pour eux, rallier Tizi-Ouzou à partir de leur localité est très compliqué la nuit. D’où leur venue à Bouira. Ils attendaient un membre de leur famille parti chercher des injections en ville. Ils n’arrêtaient pas de l’appeler au téléphone pour savoir s’il avait trouvé une pharmacie ouverte à cette heure de la nuit. Au bout de 30 mn d’attente, le jeune est revenu avec des seringues. Nos interlocuteurs nous ont fait savoir qu’au niveau des urgences on leur avait demandé d’en acheter car la structure n’en avait pas. Cette famille a pu quitter les urgences vers 23 h en direction de Bouhinoune. Leur périple du soir à bord de la Toyota Hilux s’apparente à un vrai parcours de combattant, et ce en raison de l’éloignement mais aussi de l’inexistence de moyens adéquats pour le transfert de malade. Dans les couloirs, on a entendu des accompagnateurs de malades, dire qu’ils allaient chercher dans des pharmacies en ville des injections d’une marque connue, cela suppose qu’au niveau des urgences, on ne dispose pas de ce genre de solution injectable. Pendant la soirée, une autre scène nous a interpellés à la sortie des urgences. Il s’agit de celle d’un père de famille qui se démenait, lui et son épouse, pour faire monter à bord d’une ‘’capsule’’ (véhicule asiatique assurant le transport en ville), une vieille femme. L’homme venait à peine de quitter les urgences. Comme lui, beaucoup de personnes ont recours à ces moyens de transport de fortune pour transporter des personnes malades. A vrai dire, bon nombre de gens ne connaissent même pas l’existence du SAMU. Oui, un SAMU existe bel et bien à Bouira et il semble que très peu de gens font appel à ses services. Par ailleurs, il est important de souligner que bon nombre de cas traités au niveau des urgences ne sont pas vraiment des urgences. On a tendance à solliciter les urgences pour un simple bobo ou encore pour une banale consultation médicale.

D. M.

Plus de 3000 consultations enregistrées au CHU de Tizi-Ouzou

Depuis le début du mois de Ramadhan, le centre hospitalo-universitaire de Tizi-ouzou a enregistré un nombre important de patients et le service des urgences médicales n’a pratiquement pas désempli avec plus de 3000 consultations enregistrées depuis le début du mois sacré.Mercredi dernier, aux alentours de midi, au service des urgences CHU de Tizi-ouzou, une dizaine de personne attendaient devant l’entrée du bloc principal. La canicule y est pour beaucoup dans leur venue à l’hôpital. Les enfants en bas âge et les personnes âgées constituent la plus grande majorité des consultations. C’est le cas d’ailleurs de cette femme, la soixantaine bien entamée, accompagnée par sa petite fille. Victime d’hypoglycémie, elle nous avouera : « Depuis le début du mois de crème, j’ai tenu à jeûner. Malgré mon diabète et les recommandations de mon médecin, je m’entête à le faire. A part quelques précautions que je dois prendre, tout se déroulait bien. Mais voilà qu’avec cette canicule, les choses sont devenues un peu plus difficiles pour moi », renchérira la dame qui sera immédiatement prise en charge. Mais si la sérénité règne au niveau du pavillon en journée, c’est très loin d’être le cas en soirée. , après l’appel à la prière, d’el Maghreb et la rupture du jeûne. Certes, la situation n’est plus aussi compliquée qu’aux premiers jours du mois sacré mais la pression est toujours de mise et le flux des malades est considérable dès l’heure qui suit la rupture du jeûne.

286 hospitalisations en vingt jours

Du côté officiel et administratif, le même constat est établi. La sollicitation des services des urgences du CHU est très importante. Même si les journées sont calmes, les fins de journées sont toujours synonymes de surcharges de travail pour le personnel. Si l’on prend la journée de mercredi comme exemple, seules trois (3) hospitalisation et 11 consultations ont été enregistrées au niveau du service, jusqu’en début d’après midi. Mais le scénario est tout autre après la rupture du jeûne. Une période qui est devenue la bête noire du personnel. En effet, le nombre de consultations en une nuit peut facilement atteindre 140. Dans la plupart des cas, les maux d’estomac sont à l’origine des consultations. Les malades chroniques constituent une grande partie des patients en ce mois de jeûne, rendu bien difficile par la hausse vertigineuse des températures en journée. Selon le Dr. Zenaïdi, médecin chef des urgences médicale, rencontré hier au niveau du service, au vingtième jour du mois de ramadhan, le service des urgences médicales a enregistré plus de 3000 consultations. Des malades pris en charge au niveau du service qui, pour ce faire, dispose de 15 tables de consultation. Durant la même période, le nombre des hospitalisations a lui aussi connu une nette augmentation, ayant atteint depuis le vingt juillet dernier 286, avec une moyenne de 14 personnes hospitalisées par jour, nous déclarera notre interlocuteur. D’autre part, des évacuations, vers le service, ont lieu pratiquement chaque jours depuis les secteurs hospitaliers environnants, voire même des wilayas limitrophes, à l’image de Boumerdès, Bouira, Béjaïa, selon le docteur Zenaïdi. En vingt jours, le service a eu à accueillir pas moins de 65 personnes transférées à ce niveau que ce soit par ambulance ou par des moyens particuliers, « chose qui est d’ailleurs bien répandue », précisera encore le Dr Zenaïdi.

T. Ch.

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