Ifri se prépare

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Le 20 août 1956, plus d’un demi-siècle est déjà passé depuis que six chefs de la révolution ont choisi cet endroit pour tenir, dans une petite maisonnette près du village Ifri, un conclave secret baptisé le Congrès de la Soummam afin de faire le point sur le chemin parcouru depuis le déclenchement de la guerre de Libération et d’organiser les deux organes qui ont déclenché et mené la révolution, l’ALN et le FLN.

Depuis l’indépendance du pays, Ouzellaguen ne cesse d’accueillir des visiteurs anonymes ou des délégations officielles, parmi elles des chefs d’Etat qui allaient se recueillir sur ce patrimoine historique national qui a servi de base à la réorganisation des deux ailes de la guerre de libération nationale, l’ALN et le FLN. Pour le devoir de mémoire, et pour que nul n’oublie le passé un retour s’avère nécessaire sur ce lieu symbole qui a inscrit son nom en lettres d’or dans l’échiquier de la guerre de Libération, un lieu qui a servi à la rédaction de la plate-forme de la réorganisation de la guerre de Libération nationale. La commune d’Ouzellaguen, située sur la rive gauche de l’oued Soummam, à une dizaine de kilomètres d’Akbou et à environ une soixantaine de Béjaïa, est en effervescence depuis déjà quelques jours, préparant le 56e anniversaire du Congrès de la Soummam, tenu dans l’un de ses villages en haute montagne, plus précisément à Ifri un certain 20 août 1956. Ça vaut bien le coup de se projeter des années en arrière sur l’histoire en visitant ce berceau de la résistance qui rappelle que des hommes, à leur tête Abane Ramdane, des militants nationalistes pour ainsi dire, avaient jeté les bases organisationnelles de la révolution algérienne un certain 20 août 1956. Là haut, sur la montagne qui regorge de points d’eau et d’une vue imprenable sur la vallée, fut construit le musée, sur le lieu-même où s’étaient réunis les chefs historiques. La maisonnette qui a abrité les congressistes, gardant encore son ardeur, témoigne de la foi inébranlable et la détermination des moudjahiddine à vaincre ou mourir, mais ne cédant pas un pousse du territoire. Au prix de sept ans de guerre, laissant Chahid, veuves, orphelins et mutilés, ils ont arraché durement et chèrement l’indépendance. L’histoire sera donc revisitée dans cette région qui se prépare à recevoir les délégations qui se rendront à l’occasion de la célébration de cet événement phare qu’est le Congrès de la Soummam, qui a servi de socle à une inlassable guerre qui a conduit au recouvrement de notre indépendance. Cela étant, peut-on parler du Congrès de la Soummam sans citer le nom de son concepteur, en l’occurrence Abane Ramdane, et de ses camarades, des digne fils d’une Algérie combattante que la fibre nationaliste a incrusté dés leur jeune âge ? Comme on ne peut évoquer aussi la mémoire de ce grand homme et de ses camarades, sans citer les résolutions principales que furent les premières assises de la révolution algérienne lors de ce congrès. Comme chaque année, un programme riche et varié est concocté pour la célébration de ce 56e anniversaire de la plate-forme de restructuration de la révolution algérienne (1954/1962). Ainsi, des délégations d’officiels et de la société civile se rendront au village Ifri, sur le lieu-même où le congrès a été tenu et où un musée et un mémorial perché haut, ont été édifiés et ce, pour se recueillir et visiter le grand salon où sont exposés des photos de Chouhada de la guerre de Libération, des effets ostentatoires comme les épaves d’avion, d’hélicoptère, de jeep, etc. Un habitant du village Ifri nous a livré un témoignage sur ce qu’il sait de cet événement phare de la guerre de Libération que fut le Congrès de la Soummam. « La maison où s’était tenu le Congrès de la Soummam appartenait au Chahid Behnous Md Amokrane et à son frère le moudjahid Behnous Améziane. Elle servait de refuge aux Moudjahidines et le colonel Amirouche était passé par là quand il était tombé malade et ne pouvait pas marcher. Il s’était réfugié 15 jours durant, dans cette maisonnette et les femmes l’ont soigné avec du henné qu’elles lui mettaient sur les plaies. Il faisait même son devoir religieux à la mosquée du village sans que personne ne le repère. Quand il y a eu l’idée de la tenue d’un congrès pour organiser la révolution, c’est le village Bounouh, dans la commune d’Ighil Ali qui a été choisi par les concepteurs comme lieu de conclave. En cours de route, les Moudjahidines tombèrent sur une patrouille de l’armée française. Pendant que les vaillants moudjahidine étaient occupés à riposter, la mule qui transportait les documents du congrès s’était enfuie et pénétra dans un haouch qu’elle connaissait avant et qui était devenu une caserne militaire. A la fin de l’accrochage, apprenant la capture de la mule et la mainmise sur les documents par l’ennemi, le groupe décida alors de changer d’endroit pour la tenue du conclave, le colonel Amirouche leurs suggéra alors la petite maisonnette du village Ifri où il fut soigné connaissant bien l’endroit, car dépendant de son PC d’Akfadou situé à quelques 5 kilomètres de là. Le conclave qui a duré une dizaine de jours était qualifié de réussite totale par ses concepteurs, grâce à la vigilance du colonel Amirouche et de ses adjoints qui avaient assuré la sécurité comme il se doit. L’armée française, en apprenant la tenue de ce congrès dans la région d’Ouzellaguen, s’était acharnée contre les populations locales qu’elle a déportées vers des camps improvisés au chef-lieu d’Ouzellaguen pour priver les moudjahidine de leur assistance et elle a détruit, par des bombardements aériens et aux mortiers, les quatorze villages pour empêcher les habitants d’y retourner  » a-t-il expliqué. Et il ajouta :  » Au dessus du village Ifri et sur le sommet de la montagne existent de nombreuses grottes qui ont servi de refuges aux moudjahidine. La plus spacieuse contenait 420 combattants qui ont été repérés un jour par l’ennemi. Les soldats français mobilisèrent alors un arsenal militaire impressionnant, en hommes et armements, et encerclèrent cette grotte. Craignant un accrochage avec les Moudjahidines qui se solderait par une perte en hommes dans leurs rangs, ils ont évité de prendre tout risque en gazant la grotte, avant de fermer l’entrée avec du béton dans le but d’asphyxier les moudjahidine se trouvant à l’intérieur. Peu de moudjahiddines d’ailleurs ont réussi à s’enfuir, le reste a péri à l’intérieur», a-t-il expliqué. Il a conclu en informant que la commune d’Ouzellaguen est la région qui a donné le plus de tribut à l’Algérie avec ses 1500 Chouhada tombés au champ d’honneur pour que vive l’Algérie libre et indépendante.

L. Beddar

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