Rififi à la BADR !

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Près de 700 retraités, ayant des comptes en devises au niveau de l’agence BADR de Bouira, sont montés au créneau, hier matin, en bloquant la circulation au niveau du boulevard Amrouche Mouloud du chef-lieu de wilaya. Une action apparemment mûrement réfléchie, au vu de l’âge assez avancé de ces protestataires d’un autre genre, qui font habituellement preuve de plus de sagesse que les émeutiers qui animent le bitume généralement. Ainsi, hier matin, et après plusieurs heures d’attente devant l’agence BADR du centre-ville, les centaines de vieillards, pour la plupart atteints de maladies chroniques, ont été une fois de plus, désagréablement surpris de ne pouvoir percevoir leurs mandats en euros. Un état de fait qui se répète chaque mois et qui engendre beaucoup de désagréments pour ces retraités lesquels, selon leurs propres dires, se font souvent maltraiter verbalement. « Nous sommes désemparés devant cette situation lamentable que nous vivons chaque mois. Personne ne pense que nous avons des familles à nourrir et que nous avons été contraints de passer l’Aïd dans le dénuement, malgré nos retraites. Mardi, on nous a signifié qu’on ne pourrait être payés, mais que nous le serions aujourd’hui (mercredi, NDRL). Comme vous le voyez, personne n’a pu percevoir son dû », dit Slimane Kessal, octogénaire de Taghzout et malheureux client de cette agence. Plus de 600 retraités, venus des localités de Haïzer, Bechloul, Ath Laâziz, El Esnam et Ain Laloui, ont été mis devant le fait accompli. Ils ont envahi la chaussée, rendant ainsi impossible toute circulation sur cette route traversant le centre-ville. En un laps de temps très court, les forces de l’ordre sont intervenues en se déployant tout autour de cette grappe humaine. La police, après avoir entamé de longs conciliabules avec ces vieillards, tentera d’apaiser les esprits surchauffés. Une demi-heure après, la voie sera finalement libérée sans que les protestataires n’aient une quelconque confirmation de toucher prochainement leur dû. M. Azib de Haïzer, âgé de 65ans, affirme qu’il s’agit là d’une autre humiliation, comme ils ont coutume d’en vivre. « Ce matin, bien avant l’ouverture de la banque, des riverains, excédés de notre présence, nous ont insultés. Certains vieillards ont même reçu un liquide chaud sur leurs têtes afin d’évacuer les lieux », dira-t-il. Il est vrai que le trottoir exigu ne peut contenir les clients de cette agence. Des clients d’un genre particulier car, en plus de leur âge avancé qui nécessite une prise en charge et un accueil spécial, ils sont pour la plupart diabétiques et hypertendus. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir, en ces fins de mois, quelques unes de ces personnes s’évanouir à cause du stress ou de la chaleur. « Nous ne demandons pas la charité nous voulons seulement percevoir nos pensions à des dates fixes. D’ailleurs, on nous a certifié qu’au niveau de la centrale d’Alger, l’ensemble des mandats de la wilaya de Bouira avaient été liquidés le 12 août au soir », dira un autre protestataires. Chose que réfute une source proche de cette agence qui affirme le contraire. M Kessal, lui, est catégorique en martelant que cette situation lassante est plus que louche : « Il m’est arrivé de me voir proposer que l’on me paye en dinars ! C’est une aberration, si j’ai ouvert un compte dans cette agence, c’est pour percevoir ma pension en euros ! ». Les contestataires témoignent qu’un responsable de cette agence s’est même permis, et devant un élément de la police, un écart verbal en déclarant : « On vous payera quant on voudra ! ». Désemparés, les vieillards ont ensuite rédigé un rapport, mettant en exergue trois employés de cette banque qui auraient, selon eux, l’habitude de ramener des pièces d’identités de certaines de leurs connaissances pour les payer à domicile. Un rapport, dont nous détenons une copie, qui a été adressé également aux autorités locales. Les vieux contestataires se déclarent harassés par autant d’humiliation de la part d’une institution bancaire dont ils se qualifient comme étant « des clients indésirables».

Hafidh B.

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