Par Anouar Rouchi
Bonjour. Je vous remercie de m’accorder cet entretien, vous remarquerez que, conformément à notre accord téléphonique, je ne mentionne pas votre nom.— Merci de votre compréhension. Mais puis-je moi-même oser une question ?— Bien sûr, voyons !— Qu’est-ce qui vous vaut votre sobriquet de “l’horloger ?”— Oh, mais c’est le simple fait d’écrire au “Midi à 14 heures” !— Très bien. On peut commencer.— Vous avez récemment donné une interview à un grand quotidien étranger dans laquelle vous fustigiez Bouteflika et le DRS. Quelles sont vos motivations ?— J’ai dit en effet, que Bouteflika est un despote qui a isolé le commandement militaire en s’assurant l’appui du DRS. C’est le DRS qui l’a élu en 2004.— A ce point ? Ils sont si nombreux au DRS ?— Ce n’est pas une question de nombre mais de pouvoir, d’influence, de trafic et de trafic d’influence.— Dans un passé récent vos accointances avec ce même DRS étaient pourtant avérées. Vos anciens compagnons prétendent même que votre inspirateur attitré a pour nom Tewfik…— C’était une situation particulière et c’est du passé. Vous savez tout de même que le DRS a essayé de me faire assassiner ?— Là aussi, la rumeur dit que c’est inventé de toutes pièces et que cette histoire trouve ses origines dans vos penchants mégalomaniaques… Mais vous ne me dites toujours pas pourquoi votre acharnement soudain contre le DRS.— Vous avez raison d’insister parce qu’en politique rien n’est jamais fortuit. A fortiori pour quelqu’un d’aussi intelligent et d’aussi aguerri que moi.— Certes, mais cela ne m’avance guère et ma curiosité reste entière.— La politique, c’est du donnant donnant. Lorsqu’on partenaire ne donne plus, il cesse de recevoir.— Cela signifie-t-il qu’il y avait un deal entre le DRS et vous et qu’il a été rompu unilatéralement ?— C’est une histoire d’infidélité. Presqu’un adultère. Le DRS a encouragé l’émergence de nouveaux leaders dans une région qui m’est chère.— Une histoire de vengeance, en somme !— Pas seulement. Derrière mes propos se cache une véritable stratégie.— Et c’est… ?— Cette région qui m’est si chère, il faut la maintenir en état de tension permanente. Pour cela, j’ai besoin d’un allié. Vous savez, ce vieux bonhomme, historique de la révolution, spécialiste du boycott et qui vit en Suisse…— Mais c’est votre ennemi intime !— Quelle importance ? En politique les alliances se font et se défont au gré des événements et des circonstances.— Donc, si je comprends bien, vous attaquez le DRS avec autant de véhémence pour faire plaisir à ce vieux bonhomme que vous avez affublé de tous les noms d’oiseaux pendant plus de dix ans !— Ce n’est pas très loin de la vérité. En somme, comme je sollicite officiellement une alliance avec lui, mes attaques contre le DRS font partie de la dot en quelque sorte.— Cela peut se concevoir en effet. Mais comment expliquez-vous votre volte-face à l’égard des intégristes dont vous minimisez le danger au point de considérer qu’ils peuvent réintérger le jeu politique ?— Ça aussi, ça fait partie de la dot.— Oui, mais apparemment le vieux bonhomme se tord de rire et s’amuse beaucoup de vos contorsions.Je le sais. Mais écoutez-moi bien. Je vous le dis en “off”. Ce vieux bonhomme est vieux et a le cœur fragile. Il a toujours pensé : “Après moi, le déluge !” Eh bien, il se trompe ! Parce qu’après lui, ce sera moi !— Excusez-moi de vous le dire, mais vous êtes diabolique.— Venant de vous, je le prends comme un éloge.
A. R.
