La culture du caroubier reprend des couleurs

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Dans la haute vallée de la Soummam, la culture du caroubier, depuis la mise en œuvre de la fameuse révolution agraire des années 70, a été abandonnée et les propriétaires ne daignaient même pas ramasser le produit faute de preneurs.

Mais, ces dernières années, des pays du pourtour de la méditerranée, comme la France, l’Espagne, le Portugal et l’Italie, avec qui nous gardons toujours et depuis la nuit des temps des liens ancestraux sur le plan des échanges commerciaux, s’intéressent à notre caroube. Leurs entreprises viennent acheter toutes nos productions. Voilà pourquoi, de nos jours, la caroube a repris sa place d’antan comme produit du terroir. Sa valeur marchande élevée incite les jeunes vendeurs à la cueillir, parfois précocement et dans sa couleur verte, pour l’écouler au niveau des points de vente qui pullulent en haute vallée de la Soummam. Ils revendent le produit à des grossistes en relation avec des unités de production locales ou étrangères. Et dire qu’il y a 5 ou 6 ans de cela, la caroube était un produit marginalisé abandonné dans les champs et n’intéressait personne. De nos jours, la récolte de la caroube est une aubaine pour tous. Les propriétaires y trouvent une ressource supplémentaire. Même des maraudeurs sillonnent les champs pour piller les récoltes. On les rencontre sur les routes, sacs de jute remplis, qu’ils portent sur leurs épaules, ou poussant des brouettes chargées de quantités importantes de ce produit. Un agriculteur, délesté de sa production et ne décolérant pas, arrive à la djemââ et s’écrie : «C’est du jamais vu, cette année, les voleurs m’ont ruiné en cueillant le fruit encore précoce. Ils ont passé l’arbre au crible, ne laissant aucune corne de caroube». Le moins que l’on puisse dire, à travers la réhabilitation de ce produit longtemps ignoré c’est qu’on assiste à un retour aux sources. Les populations de la région ne vivaient, naguère, que des produits du terroir tels que l’huile d’olive, les figues sèches (Thazarth), les figues de barbarie (Akermous), la câpre et la caroube qui vient de retrouver sa place. Quand dans nos montagnes on ne vivait que d’agriculture, l’abondance de ces produits du terroir a engendré la création de docks agro-alimentaires qui pullulaient à Sidi Aïch, Tazmalt et Seddouk, notamment, où l’on se charge de leur conditionnement et leur exportation. Dans le douar d’Ath Aidel, par exemple, ou l’agriculture de montagne prédomine, les agriculteurs ont orienté depuis la nuit des temps, leur choix sur la culture arboricole. Le caroubier qui donne un fruit en forme de corne, était vénéré par nos aïeuls qui l’adulaient comme l’on adule un sage, en raison des vertus r de son fruit aux usages multiples. De sa transformation, sont extraites des graines qui sont broyées donnant une matière essentielle à la fabrication du vernis et de la colle dans l’industrie chimique, des arômes dans les industries alimentaires et de l’amidon dans l’industrie pharmaceutique. On en extrait aussi une matière appelée «carovite», laquelle est destinée à la fabrication des aliments de bétail. Jadis, nos ancêtres, en vendant, pour une raison ou une autre, une parcelle de terre renfermant un caroubier, celui-ci n’est jamais inclus dans la vente et, au jour d’aujourd’hui, plusieurs familles se retrouvent propriétaires héritières, mais dans l’indivision, de caroubiers se trouvant dans des parcelles appartenant à d’autres propriétaires. La dégradation du pouvoir d’achat étant pour quelque chose, les citoyens possédant des parcelles de terre fertiles longtemps abandonnées, n’hésitent pas à mettre en valeur ce «don du ciel».

L. Beddar

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