À la recherche d’une vraie citoyenneté

Partager

Par Amar Naït Messaoud

Le scrutin local de ce jeudi, destiné à pourvoir aux postes de représentants aux assemblées communales et de wilaya,  se tient  six mois après l’une des élections les moins sereines des ces deux dernières décennies. En effet, les élections législatives du 10 mai 2012 -ayant dessiné une nette tendance à l’abstention au point d’en faire une nouvelle option d’expression politique des Algériens- n’autorisent pas d’entrevoir tout de suite un bond radical tel que souhaité par ceux qui-chefs de partis, candidats et autres intervenant ayant consommé leur énergie pendant 21 jours à héler le vote massif- se sont complètement immergés dans une opération de charme caractérisée par un éventail jamais égalé de couleurs politiques aux frontières souvent peu claires.  La hantise du gouvernement sur le plan de la participation a été clairement déclinée la semaine passée par le ministre de l’Intérieur qui prévoit un taux d’environ 40 %. Si ce taux s’abaissait en deçà de celui des législatives de mai dernier, soit 35 %, le représentant du gouvernement suggère de procéder à…une enquête. L’on sent comme un début de malaise dans un domaine qui réclame pourtant plus d’analyse pondérée où devraient intervenir la sociologie électorale, la politique, la culture et d’autres données à même de décrypter un phénomène qui s’incruste de plus en plus profondément dans le corps social. Il serait en tout cas franchement maladroit d’imaginer une ‘’enquête’‘ du type de celle ébauchée par l’ancien ministre de l’Intérieur, Nordine Zerhouni, en 2007, procédure qui lui a permis d’adresser un courrier aux ménages pour savoir s’ils résident toujours à la dernière adresse portée sur le fichier électoral.  Il justifia alors cette question par la supposée ‘’mobilité’‘ des Algériens suite…aux méga-programmes de construction de logements à travers le pays au cours de la décennie 1997-2007.  Là où la société en général, et la jeunesse en particulier, réclament une autre classe politique, un autre type de gouvernance et des horizons socioéconomiques qui leur permettent de s’inscrire dans une citoyenneté entièrement assumée, l’administration demeure toujours tentée par des solutions précaires, partielles et inefficaces. À son corps défendant, elle sera amenée un jour à des analyses plus percutantes et plus proches de la réalité lorsque les citoyens-électeurs auront décidé de leur destin en donnant leurs voix à une nouvelle classe en voie de formation, celle qui n’a pas participé au pouvoir politique du parti unique, qui n’a pas utilisé les anciennes organisations de masse comme moyen d’accès à la rente, qui évite la démagogie sur les questions identitaires et qui ne promet que ce qu’elle peut tenir.  Cette “révolution mentale’‘ qui s’ébauche ne doit pas se limiter à l’acte de vote et au bon choix des édiles locaux.  Elle est appelée à se mettre au diapason des défis qui se posent au pays dans la nouvelle phase de son histoire qui sera bientôt marquée, sur le plan de l’exercice du pouvoir, par le passage du flambeau de la génération de novembre à la nouvelle génération; sur le plan économique, cette phase est faite d’une mondialisation accrue et d’un challenge de sortie de l’économie rentière basée sur les hydrocarbures.  S’agissant de la Kabylie, l’ancien vote, longtemps confiné dans un ‘’bicaméralisme’‘ étouffant,- lorsqu’il n’est pas remplacé tout bonnement par le boycott- est en train de s’effilocher au profit d’une vision plus sereine, mobilisant une jeunesse jusque-là désabusée. Les présidents d’APC sont de plus en plus soumis à un contrat de performance avec les populations. Ils sont vus et jugés comme comptables de leur gestion, en dehors bien sûr de la problématique de la limitation des prérogatives des maires; argument derrière lequel se cachaient certains exécutifs municipaux pour justifier leur échec et se dérober de leur responsabilité.  C’est, d’ailleurs, en marchant main dans la main, que les maires et la population (avec ses représentants dans les associations ou dans les comités de village) pourront pousser les limites d’une gestion trop jacobine et encline à faire valoir la suprématie de l’administration.  Malgré les boniments des uns et les délires des autres, débités pendant les vingt-et-un jours de la campagne électorale, un mini-débat s’est indubitablement amorcé en direction des vrais enjeux de la gestion locale: cadre de vie, services publics, protection de l’environnement,…etc. Bref, une vision pragmatique et citoyenne devant prévaloir sur les jeux politiciens et les intérêts personnels. 

A.N.M.

Partager