Par Anouar Rouchi
Finis les temps où un Premier ministre français-Edouard Balladur – pouvait interpeller un président algérien – Liamine Zeroual – sur un ton qui frise l’irrévérence ! A travers ses banlieues qui s’embrassent, la France connaît sa propre guérilla urbaine avec ce que cela comporte de peurs et d’incertitudes. Brûler des voitures ou une école, ne saurait être l’œuvre de Pierre ou Paul. Par contre, cela cadre parfaitement avec le profil psycho-culturel de Moussa et Kader. La messe est dite. “Mater la racaille !” dit Sarkozy, pris dans le tourbillon électoral des présidentielles de 2007 et soucieux de récupérer les voix de l’extrême droite qui ne dédaigne jamais le spectacle d’une bonne ratonnade. Dominique de Villepin, autre candidat potentiel à la succession de Jacques Chirac se frotte les mains même s’il se garde de se féliciter ouvertement du dérapage de son ministre et non moins concurrent dans la course à l’Elysée.De par leurs fonctions, le président sortant et les deux candidats à sa succession sont aux avant-postes face à l’explosion des banlieues qui a gagné l’ensemble de l’Hexagone au bout d’une dizaine de jours d’émeutes. Devant l’ampleur du sinistre et leur incapacité à comprendre le phénomène, une idée s’impose à chacun des trois responsables français : appeler Alger !Chacun de son côté donc et dans le plus grand secret, Jacques Chirac, Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy ont appelé leurs homologues d’Alger pour demander conseil.On ne sait ce que se sont dit Jacques Chirac et Abdelaziz Bouteflika. Par contre, on sait que sitôt son téléphone raccroché, Jacques Chirac a décrété l’état d’urgence et le couvre-feu exhumant ainsi une loi de 1955 destinée à mater les Algériens durant long de la Guerre de Libération nationale.Rien n’a filtré non plus des entretien téléphoniques entre les ministres de l’intérieur français et algérien. Peut-être même qu’ils ne se sont pas parlé, Zerhouni ayant quelques bonnes raisons de bouder un Sarkozy surexcité, au vocabulaire sulfureux.Quant un dialogue Ouyahia-De Villepin, son contenu est sur la place publique et les mauvaises langues accusent les services de Sarkozy de la fuite. L’entretien ayant duré près de vingt minutes, il n’est matériellement pas possible de reproduire l’intégralité de son contenu dans cet espace. Aussi se suffira-t-on des échanges les plus significatifs.De Villepin : Bonjour M. le chef du gouvernement. Vous n’ignorez pas que des émeutiers ravagent nos banlieues et que la France est désarmée face à un phénomène qu’elle ne comprend pas. Vous qui avez l’habitude de ces situations…Ouyahia : Je le suis en effet et vous m’en voyez désolé. Par contre je ne vous cacherai pas ma satisfaction de voir la vieille Europe si sûre de son système s’en remettre à la Jeune Algérie indépendante…De Villepin : S’il vous plaît, M. Ouyahia ! Ce n’est pas le moment de raviver de vieilles plaies. Le problème est sérieux et urgent…Ouyahia : Le caractère sérieux du problème ne m’échappe guère. Quant à l’urgence… Si vous voulez mon avis, il faut vous préparer à une gestion dans la durée…De Villepin : Je m’en remets à votre expérience. Que préconisez-vous ?Ouyahia : Pour commencer, soignez donc votre communication. Ces émeutiers, il faut leur donner un nom qui ne blesse pas leur amour-propre. Appelez-les donc “les Archs des banlieues”…De Villepin : Si ça ne tient qu’à ça… Mais ensuite ?Ouyahia : Ensuite vous restez à l’écoute des conclaves qui ne manqueront pas de se tenir et de se multiplier. Il en sortira sûrement une plate-forme scellée et non négociable, en douze points, qui comportera, entre autres, l’officialisation de la langue arabe en France…De Villepin : Et vous pensez que l’affaire peut se régler avant la présidentielle de 2007 ?Ouyahia : Quel intérêt pour vous ? Les Archs des banlieues ne votent pas de toute façon.De Villepin : Merci beaucoup. Je vous tiendrai au courant des évolutions.
A. R.