3e partie
Roublard qu’il était, le propriétaire de la chèvre voit tout de suite le profit qu’il pouvait en tirer. Il procède à l’échange des petits, le chevreau est mis sous le pis de la vache, et le veau sous le pis de la chèvre, puis il se rendort. Dès qu’il commence à faire jour, les deux hommes se réveillent et constatent avec bonheur, que leur bêtes ont eu chacun un petit au courant de la nuit.En voyant le chevreau sous le pis de la vache, et le veau sous le pis de la chèvre, le propriétaire de la vache s’écrit : “Tu veux me jouer un tour mon ami ! Tu as substitué le veau par le chevreau, c’est trop gros. Depuis que le monde est monde, les vaches donnent naissance à des veaux et les chèvres à des chevreaux, et toi tu veux changer le cours des choses ! Ça c’est du culot !”Sans se démonter le propriétaire de la chèvre lui dit : “Moi je dormais, et toi tu veillais sur ta vache, si quelque chose s’est produit au cours de la nuit, tu l’aurais forcement vu ! S’il y a quelqu’un, qui doit être blâmé, ça ne peut être que toi mon ami ! Moi ma chèvre a donné naissance à un veau et il est à moi, je m’en tiens là !”L’autre insiste pour essayer de lui faire entendre raison, mais en vain. Sûr de son bon droit le propriétaire de la vache, débonnaire à souhait lui dit : “Afin d’éviter de nous quereller, allons voir le roi de ce pays. Lui seul peut nous partager”. La propriétaire de la chèvre accepte le compromis.Il se rendent tous les deux au palais et demandent audience à l’Ag’ellid’. Après avoir patienté durant des heures, ils sont enfin reçus par le souverain. Chacun des deux hommes raconte sa version des faits. Après les avoir écoutés, le monarque dit : “Chacun de vous sera propriétaire du petit qu’il a trouvé en train de téter sa mère ! C’est à dire que le propriétaire de la vache sera propriétaire du chevreau, et le propriétaire de la chèvre propriétaire du veau ! Sur ce, il les congédie.Le propriétaire de la vache n’est pas satisfait, il estime que le roi l’a arbitrairement dépossédé. Ne pouvant rien faire, il ne lui reste que ses yeux pour pleurer. Il sort du palais s’installe au pied du mur d’enceinte et se met à se lamenter. En le voyant en larmes, la femme du roi, demande à ses serviteurs de le lui ramener. Questionné il lui raconte ce qui lui est arrivé. Après avoir écouté attentivement son récit, intelligente qu’elle est, elle lui dit : “Demain, c’est jour de marché, tu attendras qu’il soit bondé de monde, tu monteras sur un toit et tu t’écrieras : Inithiyi-d a lghachiAnoua ig zarân thimz’ineeimegred ird’enanta tha founasthe id isân ighid’!”Dites-moi bonnes gens.Qui a semé de l’orge et récolté du bléQui a vu une vache engendrer un chevreauLe roi qui se trouvait là incognito se sent visé. Les deux choses sont insensées, mais puisqu’il a rendu son jugement à ce sujet, il ne peut se déjuger. Ce qui est fait est fait, qu’importe s’il s’est trompé, c’est le souverain du pays, personne ne peut le contester. L’ag’ellid’ réfléchit et se dit, qu’il n’y a qu’une seule personne au monde capable de le contredire, et cette personne n’est autre que sa femme.
Benrejdal Lounèsbenrejdallounes@yahoo.f
