M. Abdelhak Boudraa, nommé récemment directeur des œuvres universitaires de Béjaïa expose dans l’entretien qui suit sa feuille de route pour rétablir le climat de sécurité dans les résidences U
La Dépêche de Kabylie : Vu la situation « chaotique » dans laquelle baigne le secteur des œuvres universitaires de Béjaïa, est-ce-qu’on vous a nommé en qualité de redresseur de la situation ?
Abdelhak Boudraa : Absolument pas. Ma nomination s’inscrit dans le cadre d’un remaniement national des directions des œuvres universitaires, instruit par le ministère de l’Enseignement supérieur. Mais il est vrai que la situation à Béjaïa est particulière et qu’il faut aborder avec une démarche aussi particulière. Puisque c’est unique, il faut un traitement unique. J’avoue qu’en pas mal d’années de services, je n’ai vu, dans aucune wilaya du pays, une situation similaire. Je suis pantois par rapport à ce qui se passe. Je n’ai pris mes fonctions que depuis une semaine, il m’est impossible donc de m’imprégner de la situation aussi rapidement. Plusieurs problèmes, et pas des moindres, sont au menu. Insécurité grève des travailleurs et travaux à réaliser… etc. Pour l’heure, je m’affaire à recueillir des informations. J’attends de voir clair pour pouvoir comprendre les tenants et les aboutissants de toute la situation.
La situation sécuritaire au niveau des résidences universitaires est « inquiétante », ces dernières années, connaissez-vous les responsables ?
Dès mon arrivée, je me pose des questions et je cherche des réponses. Ce n’est pas facile vu la complexité et l’accumulation des problèmes à travers les années. Je suis d’ailleurs étonné de voir où la situation sécuritaire à l’université de Béjaïa est arrivée, et je me demande pourquoi ça n’a pas été réglé malgré la gravité de la situation. J’ai eu à entendre plusieurs rapports verbaux de la part des travailleurs, des syndicalistes et des étudiants. J’entends plusieurs sons de cloche. J’ai compris, d’après plusieurs versions, qu’il s’agissait d’un groupe d’étudiants et d’ex-étudiants, auxquels se sont joints vraisemblablement des extra-universitaires, qui sont derrière tous les actes de saccage et de violence qui font partie du décor universitaire de Béjaïa ces dernières années. Je n’arrive pas encore à croire que ces étudiants agissent seuls. A mon avis, ils ne sont que les exécutants d’un plan préétabli, ce qui veut dire qu’ils reçoivent leurs instructions d’ailleurs.
Comment comptez-vous rétablir la sécurité au niveau des résidences universitaires de Béjaïa ?
D’abord, il faut savoir que la sécurité et toutes les autres questions sont tributaires d’un climat de conscience générale qui implique tous les acteurs universitaires, en première ligne les étudiants. Je ne suis pas le « Zorro » qui débarque et prétend être l’homme de la situation. Il est vraiment étonnant de voir la position de la majorité silencieuse, c’est-à-dire, les 40 000 étudiants de l’université de Béjaïa, face aux moult dépassements de ce groupe d’agresseurs. En ce qui me concerne, je dois d’abord y voir clair et identifier de façon claire les vrais auteurs, y définir les mobiles, avant de m’attaquer à la partie apparente de l’iceberg. On doit découvrir à qui profite cette situation. D’ailleurs, je ne crois pas que ce soit de petits étudiants qui sont derrière tout ça. Le fait que ce groupe ait commis un tas d’actes de saccage et ait fermé les quatre chemins dans l’impunité totale laisse perplexe sur les véritables meneurs de jeu. Après l’identification des responsables, il faudrait avec les structures concernées.
Est-il vrai que ces gens-là s’interfèrent dans l’attribution des marchés en imposant des fournisseurs desquels ils tirent des dividendes ?
Personne ne peut imposer un fournisseur. Cela obéit à une procédure très stricte, conduite par une commission exigeante en matière de conformité aux closes des cahiers des charges. Je ne sais pas si cela se passe de cette façon à Béjaïa, je ne veux m’aventurer sur ce terrain là puisque je ne me suis pas totalement imprégné de la situation. Tout ce que je sais, c’est qu’il ne faut pas se fier à des faisceaux de présomption. Pour cette année, les marchés sont déjà attribués par l’ancienne direction. Il incombe aux directeurs des résidences universitaires de faire le suivi de l’exécution des tâches. Ce qui est de mon ressort, c’est de faire le travail de contrôle et de coordination.
Les événements nous montrent que certains responsables ont cédé aux pressions exercées par ledit groupe, comment réagirez-vous en cas d’éventuelles pressions ?
En ce qui me concerne, je ne cèderai devant aucune pression, si ce n’est celle du devoir. Le jour où je ne serai plus en mesure d’exercer mes fonctions convenablement, j’arrêterai. Je suis nommé dans le seul objectif de travailler au mieux pour les intérêts des étudiants et d’asseoir un climat de travail idéal pour les travailleurs. Je sais, par ailleurs, que le problème de la sécurité va se régler, mais il faut un peu de temps.
En votre qualité de directeur des œuvres universitaires, quelle solution apporterez-vous aux revendications des travailleurs ?
A la minute où je me suis installé je savais que la situation ne peut pas continuer comme elle l’est actuellement. Je tâcherai, avec les travailleurs, d’ériger un programme de redressement qui va aller de l’avant au niveau de la DOU de Béjaïa. On sait que pour cette année, il faut mener le bateau à bon port, c’est-à-dire continuer de travailler malgré tout, dans l’intérêt des milliers d’étudiants. Avec l’UGTA, nous avons convenu que les travailleurs reprennent du service à la base d’un accord qui promet une prise en charge des revendications des travailleurs. Pour ce qui est des travailleurs affiliés au SNAPAP, il est convenu d’une remise d’une plate-forme de revendications locale. Ces accords avec les différents syndicats vont dans le sens du rétablissement de la confiance et de la sécurité.
Les plaintes des étudiants concernant la prise en charge dans les résidences universitaires sont multiples, comment comptez-vous y remédier ?
Cela doit passer bien évidemment par la convocation de tous les directeurs des cités. Sur le plan de la restauration, c’est une question de culture. Désormais, on va insister sur la formation du personnel, de manière à l’accoutumer à la restauration collective et à l’hygiène. Pour ce qui est des chambres, la tâche est de donner un coup d’accélérateur aux travaux de réhabilitation des résidences universitaires, qui trainent depuis l’année passée. Nous nous engageons à redresser la situation pour améliorer sensiblement le cadre de vie des étudiants et des travailleurs. Même en un état de désordre pareil, il y a des gens qui ont de la volonté de bien faire. Avec tous les moyens de l’Etat, on n’a pas le droit d’échouer dans cette mission de redressement.
Entretien réalisé
par M. H. Khodja
