Vingt ans après l’assassinat de Tahar Djaout, premier journaliste algérien tué par des islamistes intégristes à Alger, son nom demeure toujours vivace dans les esprits des algériens. À Oulkhou, dans la localité d’Azeffoun, village natal du poète écrivain, les siens ne sont pas près de l’oublier. Un vibrant hommage vient lui être rendu, jeudi et vendredi dernier, par l’association culturelle Timezguida N’Ath Illoul et le centre culturel de la ville d’Azeffoun. Plusieurs des anciens amis de l’auteur de célèbre roman les « Chercheurs d’Os » sont conviés aux festivités. Un riche programme est tracé à l’occasion. Des membres de la famille de Tahar Djaout étaient aussi présent, notamment son frère et sa sœur. Cette dernière n’a pas cessé de parler de lui, plus d’une heure lors de la cérémonie d’ouverture, jeudi soir, au centre culturel qui porte aussi son nom. Elle est longuement revenue sur la vie de son frère. « Tahar était simple et modeste durant toute sa vie. Il est resté ainsi jusqu’à sa mort. Il a vécu dans la misère, la violence et la pauvreté », déclara à une multitude de journalistes venus beaucoup plus rendre hommage à son défunt frère, que de couvrir l’évènement. « Djaout est resté attaché à son village depuis sa naissance. Il n’a jamais voulu le quitter. Il ne pouvait pas rester plus de 15 jours sans lui rendre visite. D’ailleurs, il n’a pas pu rester plus de deux ans en France », nous a déclaré sa sœur cadette. Cette dernière attestera que son frère ne parle jamais de lui lorsqu’il discutait avec ses amis, mais toujours de la situation de notre société et des problèmes qui la guettait. « De toute sa vie, il n’a jamais raté une fête ni un enterrement au village. On ne sait pas comment il trouvait du temps pour son travail, écrire et venir incessamment au village », ajouta la sœur de l’écrivain. Hier, une foule nombreuse a accompagné les amis et la famille de Djaout pour se recueillir sur sa tombe à Oulkhou. Une gerbe de fleurs a été déposée sur sa tombe. «De son vivant il venait souvent au théâtre régional de Béjaïa. Il assistait attentivement aux pièces qu’on présentait et il était un fervent militant culturel mais aussi simple », nous dira un ancien responsable de la culture de la willaya de Béjaïa, venu lui aussi participer à l’hommage. D’autres habitants du village ont témoigné eux aussi, de cet homme de lettre qui a tout donné pour son pays, mais surtout pour sa culture berbère qu’il a défendu durant toute sa vie. « Je me souviens que le jour même de l’enterrement de Djaout, on était venu nombreux. Ce village était noir de monde. De retour à Tigzirt, nous avions trouvé qu’un groupe armé venait juste de signer son premier attentat terroriste en plein centre-ville. Dans une incursion terroriste, pour s’approprier d’un lot d’arme à la caserne de la gendarmerie de la ville de Tigzirt, très proche d’Azeffoun, deux jeunes policiers avaient empêché le groupe armé mais ils ont été tués. C’était le début de la décennie noire en Kabylie », fera rappeler un médecin de la région de Tigzirt.
Zahir Fellas