Journée d’études autour de l’innovation

Partager

L’Algérie est classée 132ème sur 142 pays en terme d’innovation. Ce constat donne déjà un aperçu sur la situation catastrophique dans laquelle se trouve le secteur de l’entreprenariat dans notre pays.

Ainsi et dans le but de débattre et tenter de trouver des solutions efficaces face à ce qu’il convient d’appeler un échec en la matière, une journée d’étude a été organisée, hier, par la direction de l’Industrie de la petite et moyenne entreprise et de la promotion de l’investissement (DIPMEPI) de Bouira.  C’est au niveau de l’auditorium central de l’université « Akli Mohend Oulhad » de Bouira, que plusieurs experts ont planché sur la question. Et le moins que l’on puisse dire, est que le constat dressé par les spécialistes est plus qu’alarmant. En effet, selon M. Boukrif Moussa, docteur en économie et professeur à l’université de Béjaïa, l’innovation en Algérie est quasi-inexistante. « Nous sommes face à une véritable tragédie. Nos entrepreneurs sont complètement inertes. D’ailleurs, le classement de 2013 est plus qu’éloquent !», martèlera-t-il. Pour M. Boukrif, l’innovation et l’entrepreneuriat sont des « moteurs fondamentaux de l’économie ». Par la suite, cet intervenant fera la dissociation entre l’invention et l’innovation, en déclarant : « L’invention implique la conversion de nouvelles connaissances dans un nouveau produit, un nouveau service ou un nouveau procédé. L’innovation, quant à elle, ajoute la phase critique de la mise à disposition de cette nouvelle offre, que ce soit par la commercialisation dans le cas des entreprises privées ou à d’autres moyens techniques de diffusion dans le cas des services publics. Les dilemmes stratégiques résultent de cette seconde phase ». Dans la foulée, le conférencier mettra en exergue « l’importance capitale » du département recherche et développement (RD), dans l’émergence de toute innovation. « On considère souvent que l’innovation est la conséquence de la technologie. Selon ce point de vue, appelé communément technology push, les scientifiques et les ingénieurs mettent au point des innovations dans leurs laboratoires de recherche et développement, puis ces innovations sont transformées en nouveaux produits, services ou procédés que le reste de l’organisation est chargé de fabriquer et de vendre », expliquera-t-il. Avant d’ajouter : « Ce sont donc les avancées technologiques qui déterminent ce qui sera commercialisé. De fait, les managers devraient avant tout écouter les scientifiques et les ingénieurs, les laisser suivre leurs intuitions et ne pas hésiter à financer leurs recherches : de généreux budgets de R&D seraient indispensables à l’apparition d’innovations ». D’après M. Boukrif, le département recherche et développement est « négligé » dans notre pays. « Lors de mes enquêtes sur le terrain, j’ai constaté que les responsable de ce département (RD, ndlr), n’assaillent pas vraiment son importance. Ils le conçoivent comme un fardeau qu’ils doivent trainer », a-t-il estimé. À propos de nos jeunes entrepreneurs, cet expert relèvera que : « Nos jeunes n’ont pas cette culture entrepreneuriale. Loin de là ils choisissent de créer une entreprise pour survivre et travailler et non pas dans le but de créer et d’innover ».

L’entreprenariat à l’épreuve du temps

Pour étayer ses propos, M. Boukrif, soulignera le fait que des diplômés choisissent d’« investir » dans les gargotes, pizzerias et autres fourgonnettes de transports. « C’est consternant de voir un jeune plein de ressources,  gâcher ses facultés dans une vision étroite et limitée », regrettera-t-il. Ensuite, il synthétisera ses propos en indiquant que l’innovation soulève trois dilemmes fondamentaux : vaut-il mieux proposer des technologies ou répondre au marché se focaliser sur les innovations de produit ou les innovations de procédé et se concentrer sur l’innovation technologique ou sur l’élaboration de nouveaux modèles économiques ? À toutes ces interrogations, l’orateur aura une réponse. « Pour faire bref, l’Algérie à deux choix à faire : Innover ou disparaître. Cependant, au rythme où vont les choses, j’ai bien peur que c’est le deuxième cas qui nous pend au nez », s’alarmera-t-il. Selon ce professeur, « l’innovation se diffuse selon un modèle dans lequel un démarrage lent est suivi par une croissance rapide lorsque le point de bascule est franchi, puis par une saturation de la demande », a-t-il encore noté. Et d’enchaîner en mettant en surbrillance le rôle des managers « efficaces et visionnaires », dans l’émergence de la culture de l’innovation. « Les managers peuvent influencer ce processus en combinant des initiatives liées à l’offre et à la demande. Ils ne doivent pas supposer que l’innovation suivra nécessairement cette courbe de diffusion et ils doivent rester attentifs aux diverses évolutions du secteur ».

Ramdane Bourahla

Partager